TotalEnergies, soumis à des critiques pour son maintien au Russie, a entamé « un début de repli » en annonçant mercredi une dépréciation de 4,1 milliards de dollars d’actifs concernant notamment le projet Arctic LNG 2.

Le logo de TotalEnergies, le 28 mai 2021, à La Défense, près de Paris (Tous droits réservés. © (2022) Agence France-Presse – Christophe ARCHAMBAULT)
Ce projet de gaz liquéfié est rendu incertain par les sanctions prises contre la Russie depuis son invasion de l’Ukraine, a-t-il expliqué.
Les « nouvelles interdictions font peser des risques supplémentaires sur la capacité d’exécution du projet Arctic LNG 2. En conséquence, TotalEnergies a décidé de provisionner au 31 mars un montant de 4,1 milliards de dollars concernant notamment Arctic LNG 2 », indique le groupe dans un communiqué, signalant là « le début d’un repli », selon un porte-parole.
Le géant français des hydrocarbures avait déjà décidé le 22 mars de ne plus enregistrer de réserves prouvées au titre d’Arctic LNG 2 et de ne plus apporter de capital au projet, « compte tenu des incertitudes que font peser les sanctions technologiques et financières sur la capacité à réaliser le projet en cours de construction ».
Mais depuis cette date, le 8 avril, « de nouvelles sanctions ont effectivement été adoptées par les autorités européennes, interdisant notamment l’exportation depuis le territoire de l’Union européenne de biens et technologies destinés à la liquéfaction du gaz naturel au profit d’une société russe », constate le groupe mercredi.
« TotalEnergies tire les conséquences de ce qui se passe. Cette provision de 4 milliards de dollars montre que TotalEnergies a commencé à tourner la page », indique le porte-parole.
Ce gigantesque site de production Arctic LNG 2, dont l’entreprise détient 10%, devait réaliser sa première livraison de gaz naturel liquéfié (GNL) depuis la Sibérie en 2023.
– Pays stratégique –
TotalEnergies avait déjà pris quelques distances avec la Russie, pays stratégique pour lui, en annonçant en mars renoncer à tout achat de pétrole, gazole et produits pétroliers russes au plus tard à la fin de l’année. Il avait aussi annoncé qu’il n’apporterait plus de capital à de nouveaux projets là-bas.
Il ne s’est pour autant pas retiré de ce pays dans lequel il est implanté depuis le début des années 1990, et où il produit 16,6% de ses hydrocarbures, et même 30% pour le gaz seul.
Le groupe est actionnaire à 19,4% du géant du gaz russe Novatek et détient une participation de 20% dans le champ gazier Yamal LNG, un projet lancé fin 2017 dans l’extrême nord russe et qui a produit plus de 18 millions de tonnes de GNL en 2020.
Pour lui, il serait contre-productif d’abandonner ces participations, avait-il précédemment expliqué, faute de trouver un acheteur non russe pour les racheter dans le contexte actuel. « Abandonner ces participations sans contrepartie financière contribuerait donc à enrichir des investisseurs russes en contradiction avec l’objet même des sanctions », avait expliqué l’entreprise en mars.
« Me retirer, c’est donner […] 13 milliards à des Russes, pour zéro car personne ne peut acheter » les usines dans lesquelles le groupe a investi, avait à l’époque déclaré son PDG Patrick Pouyanné.
TotalEnergies a fait l’objet de vives critiques pour son maintien, le candidat écologiste à la présidentielle Yannick Jadot l’ayant même accusé de « complicité de crimes de guerre ». La multinationale avait annoncé des poursuites en diffamation.
Le groupe a aussi été publiquement pris à parti par l’investisseur Clearway Capital pour lui demander de cesser ses activités en Russie ou de consulter ses actionnaires sur son maintien dans le pays.
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