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Tribunal judiciaire de Bordeaux : vigilance de mise

Frédérique Porterie, procureur de la République et Éric Ruelle, président du tribunal judiciaire de Bordeaux, ont présidé l’audience solennelle de rentrée le 27 janvier dernier. Stocks contenus ou réduits, délinquance en baisse,
les motifs de satisfaction sont importants mais la vigilance reste de mise.

Frédérique Porterie, bordeaux

Frédérique Porterie, procureur de la République de Bordeaux © Atelier Gallien

« Le service public, c’est le patrimoine de ceux qui n’en ont pas » a énoncé de prime abord Frédérique Porterie, procureur de la République, précisant que l’audience solennelle de rentrée n’honore pas seulement les chefs de juridiction mais l’ensemble des personnes qui concourent, au sein du tribunal judiciaire de Bordeaux, à ce service public. « Lorsque j’ai pris la tête de ce parquet », a remarqué la procureur Frédérique Porterie, « une lettre de mission m’avait confié la charge de le moderniser » pour ainsi répondre aux phénomènes de délinquance qui s’installaient depuis quelques mois. De facto, la délinquance recule de 14 % (sans compter les procédures en attente), le taux de classement sans suite augmente de 17 %, les délais de jugement sont maîtrisés et les stocks de dossiers contenus font partie des motifs de satisfaction. Et de citer tous ceux qui y ont concouru.

Un sujet de vigilance demeure concernant le nombre très élevé de dossiers d’assistance éducative en cours dans les cabinets des juges pour enfants

ANNÉE DE LA SIMPLIFICATION

Cependant, la procureur a mis en garde : « si la justice se réduit aujourd’hui à des arbitrages de contentieux, (…) si dans la quête d’une justice à qui on demande toujours plus, le manque de moyens continue de se traduire par une logique productiviste (…), si le sentiment généralisé d’abandon continue de se propager et si les crispations dans les services conduisent à des fractures (…) en 2023, nous assisterons encore au déclin de cette vieille dame qu’est la justice, dont le lifting ne pourra cacher indéfiniment la décrépitude du reste du corps, le ralentissement du cœur et l’obstruction des poumons par trop de fumée avalée ». Mais restant résolument positive, Frédérique Porterie a appelé de ses vœux une année 2023 qui sera celle de la modernité, du numérique, de la simplification de la procédure pénale, de l’amélioration des procédures et de l’espérance.

BAISSE DE 93 % DU STOCK DE DÉPARTAGE PRUD’HOMAL

Pour sa part, le président du tribunal judiciaire, Éric Ruelle, a fait le point sur l’activité civile avec un taux de couverture positif dans la plupart des contentieux. C’est le cas notamment au contentieux civil général avec une baisse (depuis 2020) de 25 % des affaires familiales, de 30 % de la protection et de la proximité, de 65 % au pôle social et de 93 % du départage prud’homal (depuis 2018). « Néanmoins, quelques sujets de vigilance demeurent », a-t-il tempéré, concernant le nombre de dossiers en cours de protection des incapables majeurs ainsi que le nombre très élevé de dossiers d’assistance éducative en cours dans les cabinets des juges pour enfants. Autres sujets de vigilance : les augmentations constantes du service d’application des peines et d’activité des juges des libertés et de la détention. Le président du tribunal a également pointé quelques défis : celui du numérique, puis des moyens humains, notant la constitution de l’équipe autour du magistrat. Des perspectives qui relèvent un double enjeu de clarification et de redéfinition des missions : « La constitution et l’animation d’une équipe autour du magistrat, c’est faire passer le juge d’une fonction d’homme-orchestre à celle de chef d’orchestre ».