Couverture du journal du 19/04/2024 Le nouveau magazine

Bordeaux Métropole : les nouvelles mobilités

Aujourd’hui, RER, tramway, bus, bateaux, vélos, trottinettes et scooters. Demain, télécabines, lignes à grande vitesse, métro ou même drones ! Un large éventail de solutions de mobilité et de nouvelles infrastructures doit répondre à l’augmentation du nombre de déplacements dans la Métropole. Revue de détail.

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© Shutterstock - photo d'illustration

Six millions de personne vivaient en Nouvelle-Aquitaine en 2020, selon le dernier recensement Insee publié fin 2022, dont plus d’un quart en Gironde. Sixième département le plus peuplé de France, la Gironde est également le troisième département métropolitain où la population croît le plus fortement, avec 20 000 nouveaux habitants chaque année, dont 10 000 dans Bordeaux Métropole, selon la dernière enquête Mobilités réalisée en 2021 par l’intercommunalité. Si « l’augmentation de la population est surtout endogène », tient à préciser le président de Bordeaux Métropole et maire de Mérignac Alain Anziani, elle entraîne avec elle une augmentation du nombre de déplacements par jour et par habitant. C’est pour y répondre que la mise à deux fois trois voies de la Rocade sera effective dès le mois de juin. Et que Bordeaux Métropole a adopté en 2021 son nouveau schéma des mobilités 2020-2030, avec un budget prévisionnel 2021-2026 de 3,3 milliards d’euros. Objectif : « décongestionner l’agglomération, en proposant une pluralité de solutions permettant à chacun de trouver le moyen de transport qui lui correspond, tout en décarbonant les mobilités », précise Alain Anziani.

RELIER LES TERRITOIRES ET LES RIVES

RER, tramway, bus, vélo, bateaux, services en free-floating de trottinettes, vélos, scooters ; et demain télécabines, lignes à grande vitesse, métro ou même drones : un large éventail de solutions est étudié pour relier la Métropole avec les territoires voisins, mais aussi la rive droite avec la rive gauche. Dans ce cadre, les possibles télécabines, le futur tramway et les voies dédiées aux bus devraient aider à améliorer le franchissement de la Garonne, tout comme le pont Simone-Veil, dont la charpente métallique relie depuis le 20 janvier Floirac à Bègles. Pas encore suffisant selon Alain Anziani qui l’affirme : « nous restons sans doute une des agglomérations qui a le moins de ponts, ce qui engendre encore trop d’embouteillages ». Autre nécessité : « desservir les zones qui comportent de très grandes entreprises comme l’Aéroparc de Mérignac où se trouvent Dassault, Thalès… Le fait que le tramway aille jusqu’à l’aéroport est une réponse », poursuit le maire de Mérignac, qui convient avoir souvent entendu cette demande.

« Nous restons une des agglomérations qui a le moins de ponts, ce qui engendre encore trop d’embouteillages » Alain Anziani

TITRE DE TRANSPORT ET TARIF UNIQUES

En parallèle, afin de réussir la mise en place effective de l’intermodalité, des « pôles intermodaux » comme la gare Sainte-Germaine du Bouscat, qui doit ouvrir en juin, ou la gare de la Médoquine à Talence, sont en cours d’aménagement. La Métropole collabore également avec la Région Nouvelle-Aquitaine afin de proposer un titre de transport unique permettant de passer d’un mode à l’autre et d’un territoire à l’autre. « C’est un sujet sur lequel nous travaillons activement pour simplifier la vie des usagers. Pour moi, c’est une priorité », affirme le président de Bordeaux Métropole. Qui se heurte néanmoins à d’importantes contraintes techniques. « Il faut en particulier que la Région et la Métropole se mettent d’accord sur un tarif unique pour le train, le RER et le tram. Comment chacun prend-il sa perte ? C’est ce qui bloque aujourd’hui. Mais nous y travaillons ! », assure Alain Anziani. En attendant, comment se décline cette « multimobilité » sur le territoire ? À quoi ressembleront nos transports demain ? Éléments de réponse, modalité par modalité.

Soutenu par le président Macron, le RER a fait l’objet d’une concertation publique fin 2022 qui a confirmé l’intérêt des usagers

RER MÉTROPOLITAIN : LE TER AUGMENTÉ

« Écologie, économie, qualité de vie, maillage du territoire… Les intérêts du projet sont évidents », estime Renaud Lagrave, vice-président du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine en charge des mobilités. Porté par la Région, Bordeaux Métropole, le Département de la Gironde et l’État, le projet de RER Métropolitain repose sur 3 lignes qui traverseront la Métropole pour relier le Médoc à Bordeaux, Libourne à Arcachon, et Saint-Mariens à Langon sans changement (voir carte).

Lancé en 2018, ce projet, qui nécessite de nombreux aménagements et la rénovation des lignes de TER, devrait permettre d’atteindre la cadence d’un train toutes les demi-heures dès 2028, puis un quart d’heure au-delà. Pour cela, « des rames supplémentaires ont déjà été commandées », assure Alain Anziani.

Soutenu par le président Emmanuel Macron, qui veut développer des réseaux de RER dans 10 grandes agglomérations dont Bordeaux, le RER a fait l’objet d’une concertation publique menée fin 2022 qui a confirmé l’intérêt des usagers. Deux nouvelles gares ouvriront, au Bouscat et à Talence, d’ici 2025.

En 2030, le RER métropolitain devrait compter 300 km de lignes, 54 gares (dont 17 pôles d’échanges intermodaux dans la Métropole), transporter 38 000 passagers par jour et couvrir un territoire de 1,2 million d’habitants.

Coût : un milliard d’euros minimum jusqu’en 2028.

RER MÉTROPOLITAIN

©Région Nouvelle-Aquitaine

BATCUB : PLUS DE NAVETTES FLUVIALES

Objectif : disposer de 6 navettes fluviales d’ici 2025, contre deux aujourd’hui, afin d’augmenter le transport de passagers et développer celui des marchandises. « Une expérimentation est actuellement en cours. Néanmoins, le bateau doit encore rencontrer son public, en particulier du côté des passagers », reconnaît Alain Anziani.

Coût pour l’achat de 4 navettes fluviales (auprès d’OCEA) : 10,3 millions d’euros

BATCUB

© Bordeaux Métropole

BUS : LE CHAÎNON INDISPENSABLE

Signée en juillet 2022 entre Bordeaux Métropole et Keolis pour la période 2023-2030, la nouvelle délégation de service public (DSP) pour le réseau de Transports Bordeaux Métropole (TBM) a pour objectif de convertir les usagers de la route au transport public en étoffant l’offre. « Dès septembre, nous allons donc considérablement élargir le nombre et les horaires des bus, afin de desservir les 28 communes de la Métropole, y compris le dimanche et jusqu’à 23 heures », annonce Alain Anziani. À l’origine d’importants travaux d’aménagement de voies dédiées, sept lignes de bus express urbains (l’ancien « BHNS ») permettant des liaisons structurantes, circulaires, de périphérie à périphérie et vers les zones d’activités vont également être mises en place, comme celle faisant le tour des boulevards. Particularité de ces bus : à forte fréquence, rapides et confortables, ils doivent connecter les usagers à d’autres modes de déplacements tels que le tram ou le RER. Des extensions sont étudiées pour aller jusqu’à Saint-Aubin-du-Médoc, Talence-Thouars-Malartic, Artigues, et entre les boulevards et la Rocade.

En complément, des lignes de cars express régionaux portées par la Région, la Métropole et les territoires, notamment dans le Blayais ou le Val de l’Eyre, devraient également être créées, à l’image de la ligne Créon-Bordeaux, qui comptabilise plus de 400 voyageurs par jour et 140 000 voyages par an.

Coût de la DSP TBM : 2,2 milliards d’euros sur 8 ans.

Coût moyen par km du bus express : 7 millions d’euros.

TRAM : 20 ANS, 3 NOUVELLES LIGNES

Le tramway fêtera ses 20 ans en 2023 avec l’extension de la ligne A vers l’aéroport de Bordeaux-Mérignac. En cours d’expérimentation depuis le 25 janvier, elle doit être mise en service en avril 2023. « Cette extension reliant l’aéroport au centre de Bordeaux en 35 minutes, en passant par l’une des plus grandes zones commerciales, Mérignac-Soleil, et la plus grande zone d’emplois de l’agglomération était un enjeu majeur », estime Alain Anziani. La nouvelle DSP signée avec Keolis prévoit également d’ici 2025 la création de la ligne E, qui reliera Floirac-Dravemont à Blanquefort ; et de la ligne F, reliant Bègles à la gare Saint-Jean à l’aéroport Bordeaux-Mérignac, grâce à un nouveau système d’aiguillage Porte de Bourgogne. Si rien n’est arrêté pour la suite, « des réflexions sont déjà en cours, notamment pour relier Cenon au Stade Matmut Atlantique via le pont Chaban-Delmas, sans repasser par Bordeaux », dévoile le président de Bordeaux Métropole.

Coût pour l’extension de la ligne A : 90 millions d’euros pour Bordeaux Métropole, 7,63 millions pour l’État.

Coût moyen par km du tram : 25 millions d’euros.

tramway bordeaux

© Bordeaux Métropole

VÉLO : UNE MÉTROPOLE CYCLABLE

« La pratique du vélo a encore progressé de 14 % dans la Métropole en 2022. Il s’agit de l’une des plus fortes augmentations jamais constatées », affirme Alain Anziani. Pour faire monter la part modale du vélo à 18 %, des déplacements à l’horizon 2030 (contre 8 % en 2017), le 3e plan vélo a été doté d’un budget inédit de 150 millions d’euros pour la période 2022-2030, afin notamment de développer le réseau vélo express (ReVE), qui comptera à terme 280 km de pistes cyclables, 14 itinéraires et une multiplication des places de stationnement. Une flotte de 2 500 vélos V3 en libre-service (dont la moitié en électrique) ont également été intégrés à la nouvelle DSP, et 2 000 vélos à assistance électrique vont être proposés à la location par Bordeaux Métropole dès le mois de mai 2023. « C’est tout à fait nouveau et il s’agit d’un véritable effort public », juge Alain Anziani.

Coût du 3e plan vélo : 150 millions d’euros sur 8 ans.

FREE-FLOATING : LE CHOIX DE LA RÉGULATION

Alors que l’ensemble des grandes villes françaises s’interrogent sur la façon de gérer l’offre de véhicules en libre-service, très populaires, dans l’espace public, Bordeaux Métropole a opté pour la régulation. Cette démarche unique en France a consisté, à l’issue d’un appel à manifestation d’intérêt, à désigner les opérateurs autorisés à proposer leurs engins dans l’aire urbaine, afin de leur imposer « plus de contrôle, des engagements, un développement harmonieux sur le territoire, une offre globale élargie, un stationnement maîtrisé et des vitesses limitées », précisait l’intercommunalité dans sa présentation. Les vélos de Bird (750 vélos à assistance électrique – VAE) et Pony (550 VAE et 200 vélos mécaniques) complètent ainsi l’offre de V3 de la Métropole ; les trottinettes électriques de Dott (750) et TIER (750) ainsi que les scooters électriques E-Dog (250) et Yego (250) sont désormais proposés sur 24 communes de la Métropole. Cette offre pourra évoluer en fonction de la demande.

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© Bordeaux Métropole

TÉLÉCABINES : SURVOLER LES OBSTACLES

« Pour nous, ce n’est pas un gadget : c’est le moyen le plus rapide de traverser la Garonne », assure Alain Anziani. Neuf projets de tracés pour un service de télécabines reliant la rive droite (Cenon/Lormont) à la rive gauche (Bordeaux Bassins à Flots/Bacalan) ont été soumis à la concertation qui se terminera le 13 février. Le tracé choisi devra résoudre une équation complexe, avec des contraintes liées au classement de Bordeaux au patrimoine mondial de l’Unesco, à l’interdiction de survoler certaines entreprises, mais également à l’avis des riverains au-dessus desquels passeraient ses câbles.

Le tracé final de ce transport, qui fait du fleuve et des coteaux de la rive droite un atout, sera proposé au printemps 2023 et la décision de poursuivre ou non le projet prise en mai. Pour une modalité que pourraient emprunter quotidiennement jusqu’à 17 000 passagers à l’échéance 2028.

Coût : entre 55 et 75 millions d’euros en fonction du tracé.

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Des modèles de télécabines exposés sur les quais de Bordeaux © JB Mengès / Bordeaux Métropole

MÉTRO : UNE SOLUTION ONÉREUSE

« Je suis très perplexe sur la solution métro », admet d’emblée Alain Anziani. Le président de Bordeaux Métropole prévoit néanmoins de lancer au deuxième trimestre « une étude d’opportunité technique et financière » afin de confirmer les coûts potentiels du développement d’un métro dans l’agglomération bordelaise. « Le sous-sol bordelais étant très instable, nous devons aussi vérifier si c’est techniquement possible. Nous aurons alors tous les éléments d’information pour alimenter le débat qui ne manquera pas de suivre », précise Alain Anziani. Rendez-vous en 2024 pour les résultats de l’étude sur le métro, qui, s’il s’avère techniquement et financièrement viable, ne serait lancé qu’après 2030-2035.

Coût moyen par km du métro : 100 millions d’euros

GPSO : DES VERTUS DE PROXIMITÉ

S’il constitue d’abord un corridor entre le Nord et le Sud de l’Europe, le Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO), qui repose sur la création de deux nouvelles lignes à grande vitesse (LGV) entre Bordeaux et Toulouse et entre Bordeaux et l’Espagne, intégrera « une composante forte » : « l’amélioration des transports du quotidien au Sud de Bordeaux », précisent les porteurs du projet dans sa description. « L’accès à la LGV va obliger à créer d’autres sillons apportant beaucoup plus de transports de proximité dans ces zones », confirme Alain Anziani. Fervent soutien, tout comme Alain Rousset, du GPSO, contrairement aux maires de Bordeaux, Bayonne et Irún, qui ne cessent d’afficher leur opposition au projet, le président de Bordeaux Métropole et celui du Conseil régional se sont félicités de l’arrivée du nouveau préfet de Gironde et de Nouvelle-Aquitaine, Étienne Guyot, ancien préfet-coordinateur du GPSO. Membres éminents de la société de financement du GPSO mise en place en juillet, parmi les 25 collectivités territoriales qui financeront 40 % des premiers tronçons de la LGV (l’État assumera 40 % et l’Union européenne 20 %), la Région Nouvelle-Aquitaine et Bordeaux Métropole figurent parmi ses premiers financeurs. Les préfets de département doivent maintenant « conduire le dialogue territorial avec les acteurs locaux au moyen de comités de suivi pour accompagner les phases de mise au point finale des lignes et gares nouvelles », précisait à l’issue du COPIL d’octobre dernier Étienne Guyot. Objectif de début des travaux du GPSO : fin 2023, pour une mise en service de la LGV en 2032.

Coût estimé pour Bordeaux-Dax-Toulouse : 14 milliards d’euros

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DRONES : LE FUTUR SERA-T-IL AÉRIEN ?

Cette modalité ne devrait pas émerger avant 2027 pour le transport de personnes, mais une expérimentation européenne de « mobilité aérienne urbaine » (UAM), en partie menée à Saint-Julien-Beychevelle en bord de Gironde, a été conclue mi-janvier.

« Nos essais ont consisté à faire évoluer plusieurs types d’aéronefs : un hélicoptère et différents drones pour tester notre plateforme de détection et de résolution des conflits en vol », décrit Stéphane Bascobert, président de la société toulousaine Innov’ATM, leader français des solutions de gestion de trafic aérien, qui coordonnait le projet européen TindAIR (Tactical Instrumental Deconfliction And In-flight Resolution). Impliquant 11 partenaires, dont la société bordelaise de conception de drones SkyBirdsView, et 4 pays européens, sous l’égide du programme européen SESAR, cette expérimentation a permis de tester différents cas d’usages : livraison urgente de matériel médical, transport de marchandises, mais aussi transport de personnes, le type de charge transportée définissant la priorité de l’aéronef.

L’entrée en vigueur en Europe de la libéralisation des couloirs aériens dédiés au trafic des drones (« U-space ») fin janvier devrait permettre le développement du transport de matériel dès 2023. Reste à améliorer « l’acceptation sociale » du transport par drone : « il existe encore des inquiétudes à lever sur la sécurité, le respect de la vie privée ou les nuisances sonores. Pour l’instant, les citoyens souhaitent un trafic dédié aux situations d’urgences. Mais si demain le transport aérien s’avère efficace, rapide et écologique, les gens pourraient y adhérer », estime Stéphane Bascobert. Des liaisons régulières par taxi volant sur des couloirs aériens précis pourraient être mises en place dès 2027. « Pour rentabiliser ce service très coûteux, il faudra en effet une récurrence des trajets et une forte densité du trafic », prévient Stéphane Bascobert.

Budget de développement de la plateforme TindAIR : 4 millions d’euros.

TindAIR

© TindAIR

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