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L’économie néo-aquitaine à l’heure du ralentissement

CONJONCTURE. Les prévisions économiques à mi-année confirment un ralentissement qui reste « d'ampleur modérée » dans tous les secteurs d’activité en 2023, selon les études de la Banque de France régionale et de la CCI Nouvelle-Aquitaine.

économie, Nouvelle-Aquitaine

Jean-François Clédel, président de la CCI Nouvelle-Aquitaine et Denis Lauretou, directeur régional de la Banque de France © DR

Le ralentissement de l’activité économique se confirme en France au 2e semestre 2023. Mais l’optimisme reste de mise pour la Banque de France régionale et la CCI Nouvelle-Aquitaine. Dans leurs enquêtes de conjoncture respectives à mi-année (1), présentées le 19 septembre à Bordeaux, les deux institutions retiennent la résistance de l’économie, en dépit d’un contexte affecté par une demande intérieure peu dynamique et une inflation marquée. Mais contenue. « L’engagement des banques centrales à maîtriser l’inflation devrait permettre de passer d’une augmentation de l’indice des prix à la consommation harmonisé de 5,9 % en 2020/2021, à 5,8 % en 2022/2023, à 2,6 % en 2023-2024, puis 1,8 % en 2024/2025, sauf choc externe », s’est félicité Denis Lauretou, directeur régional de la Banque de France Nouvelle-Aquitaine, dont il s’agissait de la dernière prise de parole avant son départ pour Marseille début octobre. Si la lutte contre l’inflation a pesé sur la dette publique française, elle n’a, en revanche, « pas provoqué de récession, la prévision de croissance du PIB français sur l’année 2023 ayant même été revue légèrement à la hausse, de 0,7 % à 0,9 % », ajoute-t-il. Une reprise de la consommation des ménages est par ailleurs espérée en 2024 et 2025, ainsi que de l’investissement des entreprises, à partir de 2025.

CONTEXTE PEU PORTEUR

Le niveau de défaillance des entreprises, quant à lui, est remonté à 3 077 en Nouvelle-Aquitaine (pour environ 50 000 au niveau national), mais se situe toujours sous le niveau d’avant crise sanitaire, où il culminait à 4 351 fin 2019. « Nous sommes toujours sur la voie de la normalisation », estiment Denis Lauretou et Jean-François Clédel, président de la CCI Nouvelle-Aquitaine. Tous secteurs confondus, « le contexte est peu porteur en Nouvelle-Aquitaine et l’attentisme est de mise au 2e semestre 2023 », note Jean-François Clédel. Et même si les chiffres d’affaires devraient légèrement augmenter dans la plupart des secteurs, les carnets de commande stagnent, les difficultés de financement pèsent sur les trésoreries et les marges se rétractent. Il est à noter que « l’inflation est une difficulté majeure pour 49 % des entreprises, suivie par la baisse de la demande (pour 32 % d’entre elles) et le poids des charges (29 %). Les entreprises semblent en revanche s’être adaptées aux problèmes de recrutement et d’approvisionnement », remarque Jean- François Clédel. Les difficultés de recrutement ont néanmoins concerné 78 % des entreprises qui présentaient des besoins.

EFFET VOLUME ET PRIX

Dans le détail, l’industrie régionale se maintient en 2023, avec une projection de croissance de chiffre d’affaires à mi-année de 4,3 %, revue légèrement à la hausse, liée à « un effet volume et surtout un effet prix », précise Jacky Phillips, chef du département des entreprises et activités économiques régionales à la Banque de France Nouvelle-Aquitaine. La hausse des coûts se propageant sur le prix des produits finis. Dans un contexte atone, les situations diffèrent fortement d’un sous-secteur à l’autre, celui de l’industrie agroalimentaire connaissant un repli d’activité en 2023. Le constat est identique dans les services marchands, marqués par un fort ralentissement dans certains secteurs, avec une projection de croissance des chiffres d’affaires de 1,7 % au lieu des 3,7 % attendus en début d’année. Le secteur du commerce subit quant à lui la baisse de consommation des ménages, le commerce de détail non-alimentaire étant particulièrement touché. Mais « les commerçants anticipent une reprise de la demande pour l’année à venir », rassure Carole Lucante, cheffe de projets études économiques à la CCI Nouvelle-Aquitaine. Le secteur des Cafés-Hôtels-Restaurants (CHR) reste dynamique, 36 % des entreprises interrogées s’attendant à une augmentation de chiffre d’affaires, en dépit de difficultés dans la restauration. Les forts investissements (39 %) des entreprises dans ce secteur traduisent la confiance des chefs d’entreprise dans l’avenir, 72 % se déclarant confiants, soit + 12 points par rapport au premier semestre.

 

Les mises en chantier dans le bâtiment sont au plus bas depuis 20 ans

PESSIMISME DANS LE BÂTIMENT

Le secteur de la construction, enfin, est tiré par le bâtiment et affiche une projection de croissance de chiffre d’affaires de 2,5 % à mi-année, alors qu’une baisse de 0,3 % était attendue en début d’année. Si les carnets de commande dans le second œuvre et la rénovation se maintiennent, ceux du logement neuf subissent en revanche un coup d’arrêt et l’activité ne reprend pas dans les travaux publics. De plus, « la rentabilité des entreprises baisse, en raison de l’inflation, de la hausse des coûts de l’énergie et des salaires que les entreprises ne parviennent pas à répercuter sur les devis. Les résultats devraient donc baisser en 2023 », conclut Jacky Phillips. « Les prévisions pour la fin de l’année ne sont pas optimistes, avec des difficultés de recrutement qui persistent et surtout, un nombre de mises en chantier au plus bas depuis 20 ans », assure Carole Lucante. Actuellement, « la construction de logements neufs est en grande difficulté et on s’attend à de nombreuses défaillances d’entreprises dans ce secteur », annonce Jean-François Clédel.

(1) L’enquête semestrielle de la Banque de France Nouvelle-Aquitaine a été réalisée auprès d’un échantillon de 1 000 chefs d’entreprises représentant 150 000 salariés. L’enquête de la CCI Nouvelle-Aquitaine, réalisée entre le 3 et le 19 juillet, repose sur un solde d’opinions de 4 000 chefs d’entreprises néo-aquitains, dont 94 % ont moins de 10 salariés.