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L’incertitude pèse sur l’économie

La reprise rapide de l’activité, qui avait suivi le confinement, se tasse. La période qui s’ouvre est très incertaine pour les chefs d’entreprise néo-aquitains dans les secteurs de l’industrie, des services marchands et de la construction. Une tendance que l’on retrouve à l’échelle nationale, où l’activité demeure inférieure au niveau d’avant-crise.

Airbus Toulouse © D. R.

BANQUE DE FRANCE Bordeaux Yannick Portejoie

Yannick Portejoie, Responsable du Pôle Études économiques de la Banque de France Bordeaux © D. R.

« La reprise marque un palier en septembre », prévient la Banque de France en ouverture de sa note de conjoncture en Nouvelle-Aquitaine post-rentrée. Après la chute vertigineuse enregistrée au mois de mars 2020, puis une reprise rapide dans les mois qui ont suivi, « en aile d’oiseau », l’activité est entrée dans une phase de remontée lente et très progressive depuis le mois de septembre. Une tendance à l’opposé de l’effet rebond habituellement enregistré à la rentrée, après les fermetures estivales d’entreprises.

« Nous sommes dans la confirmation de l’anticipation des chefs d’entreprises, qui avaient prévu en août une reprise relativement moins favorable qu’habituellement », assure Yannick Portejoie, responsable du pôle études économiques de la Banque de France Bordeaux. Conséquence : une prudence et une réserve sur les perspectives aussi bien à court terme, qu’à moyen terme, « liées aux incertitudes quant à l’évolution de la pandémie et aux mesures sanitaires qui seront prises », précise Jacky Phillips, chef du département entreprises et des activités économiques régionales de la Banque de France.

 

CONTRACTION DE LA PRODUCTION INDUSTRIELLE

Une incertitude qui pèse sur tous les secteurs d’activité étudiés par l’institution. Dans l’industrie, la production se contracte, mais la situation demeure très variable d’un sous-secteur à l’autre.

Le retour à la normale dans l’aéronautique est désormais annoncé entre 2024 et 2027. Tout dépendra de la reprise effective du trafic aérien

Au niveau régional, on note sans surprise que l’industrie aéronautique se porte mal, avec peu de visibilité sur la reprise. « Nous avons de nombreux sous-traitants et fournisseurs dont les carnets de commandes sont dégarnis. Le retour à la normale dans l’aéronautique, initialement prévu pour 2023, est désormais prévu entre 2024 et 2027. Tout dépendra de la reprise effective du trafic aérien », détaille Jacky Phillips. Une situation qui entraîne dans certains cas une réorientation de l’activité vers d’autres secteurs. Même constat pour la construction de bateaux de plaisance, qui se portait très bien depuis 2 ans, et qui a dû faire face à des difficultés de livraison et à un fort fléchissement de la demande, notamment lié à l’incapacité de présenter les nouveaux modèles lors des grands salons nautiques. À l’inverse, l’industrie alimentaire et de boissons se maintient de façon globalement constante depuis le confinement.

BESOIN DE DIGITALISATION ACCRU

Le secteur des services marchands, quant à lui, est quasi-stable, avec d’importantes variations d’une activité à l’autre, certaines ayant surperformé et d’autres sous-performé, le tout se compensant. Sans surprise là encore, c’est l’hôtellerie qui se porte le plus mal, avec des taux de fréquentation très faibles et une absence de clientèle professionnelle. Néanmoins, « les situations sont disparates, surtout en fonction de l’emplacement des établissements », remarque Jacky Phillips.

La situation de l’hôtellerie et de la restauration engendre une baisse d’activité des agences de travail temporaire, qui subissent également le coup d’arrêt dans les industries aéronautique et nautique. À l’opposé dans les services marchands, les transports ainsi que toutes les activités spécialisées se sont bien tenus, en particulier l’informatique, « avec un besoin de digitalisation accru pour les entreprises pendant la période », note Yannick Portejoie.

REPRISE DES APPELS D’OFFRE

Enfin, le secteur de la construction a connu une légère contraction, après une bonne reprise dans le bâtiment à partir du mois d’août, malgré « des problèmes de rentabilité liés aux surcoûts directs et indirects des mesures sanitaires », constate Jacky Phillips. Globalement, les niveaux d’activité sont comparables à avant la crise, grâce à l’effet de rattrapage, mais avec des carnets de commande moins fournis et des difficultés à recruter sur certains métiers. Concernant les travaux publics, « l’effet pandémie et l’effet décalage des élections municipales ont engendré un retard des commandes qui n’est pas encore rattrapé », assure Yannick Portejoie.

Et malgré un retour des appels d’offre, y compris des collectivités, « on sent que l’incertitude est générale pour le second semestre 2021 », précise le responsable du pôle études, avec un manque de visibilité exprimé par une grande partie des chefs d’entreprises interrogés.

8,6 MILLIARDS D’EUROS DE PGE

Parallèlement à ses enquêtes de conjoncture mensuelles, la Banque de France a publié les statistiques des Prêts garantis par l’État (PGE), qui pourront être souscrits jusqu’en juin 2021. Ainsi sur une enveloppe de 300 milliards d’euros, seuls 122 milliards ont été consommés au niveau national, dont 8,6 milliards en Nouvelle-Aquitaine. Ce qui fait de la région la 4e de France en terme de PGE accordés. 90 % des entreprises qui en ont bénéficié sont des TPE, et elles se sont vues accorder des prêts de 145 000 euros en moyenne (contre 205 000 euros au niveau national).

Les banques ont joué le jeu, avec plus de 97 % des PGE demandés accordés

« Les banques ont globalement joué le jeu, car plus de 97 % des prêts demandés ont été accordés », note Jacky Phillips. Des chiffres confirmés par l’enquête trimestrielle sur l’accès au crédit en France, qui montre que la demande de crédits (PGE inclus) a été beaucoup plus importante sur le dernier trimestre. Pour les entreprises qui n’ont pas obtenu leur prêt, la médiation du crédit a aussi pleinement joué son rôle. Selon les statistiques publiées le 20 octobre par la Banque de France, la Nouvelle-Aquitaine est la 3e région en termes d’emplois conservés, et la 5e en nombre d’entreprises confortées, pour lesquelles la médiation a eu une issue positive.

Les services marchands spécialisés tels que l’informatique se sont bien tenus, en raison du besoin de digitalisation accru

Et si une forte baisse du nombre de saisines de la médiation du crédit avait été enregistrée en juin-juillet, la tendance est à la hausse ces dernières semaines en Nouvelle-Aquitaine, où l’incertitude et le manque de visibilité sont les maîtres-mots pour la fin d’année.

 


MÉTHODOLOGIE

Enquête mensuelle de conjoncture dans les secteurs de l’industrie et des services marchands, enquête trimestrielle dans le Bâtiment et les Travaux publics, réalisées par la Banque de France sur la Région Nouvelle-Aquitaine, présentant les soldes d’opinion de 900 chefs d’entreprise néo-aquitains.

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