Notre politique du logement doit toujours conduire à davantage d’équilibre territorial et de justice sociale en faveur des plus fragiles, être un moteur durable de l’économie locale comme de l’économie nationale et un vecteur d’innovation. Les Français ont besoin de logements en phase avec leur mode de vie contemporain ; plus connectés, plus écologiques, plus modulables, et mieux adaptés à la diversité de leurs parcours. Ils ont également besoin de pouvoir y accéder ou en changer plus facilement. L’action du gouvernement doit répondre à tous ces enjeux ; il convient de lutter contre les fractures territoriales, adapter les solutions de logement pour les plus démunis, autrement dit à la fois libérer et surtout protéger.
DE NOMBREUSES LOIS SUR LE LOGEMENT SE SONT SUCCÉDÉES DEPUIS DES DÉCENNIES :
- Loi du 21 juillet 1994 relative à l’habitat
- Loi du 13 décembre 2000 sur la solidarité et le renouvellement urbain (loi SRU)
- Loi du 17 janvier 2002 sur la modernisation sociale.
- Loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (loi ENL)
- Loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové
- Loi du 23 novembre 2018 dite loi ELAN, dernière en date portant notamment sur l’encadrement des loyers.
Face à l’augmentation croissante des loyers notamment dans les grandes métropoles comme Bordeaux, et malgré la mise en place du principe du plafonnement desdits loyers dans les « zones tendues », l’encadrement des loyers des locaux à usage d’habitation principale est de nouveau sur le devant de la scène, initialement prévu par la loi du 24 mars 2014 ; ce dispositif a été instauré dans la loi ELAN. L’article 140 de la loi ELAN numéro 2018 -1021 du 23 novembre 2018 prévoit la possibilité d’instaurer un encadrement des loyers et ce, à titre expérimental dans les zones tendues, mais sans intégrer ce dispositif facultatif dans la loi du 6 juillet 1989.
Ce dispositif n’est pas applicable uniformément sur tout le territoire français
Ces dispositions s’appliquent à titre exceptionnel et pour une durée de 5 ans à compter de la publication de la loi ELAN (24 novembre 2018), soit jusqu’au 24 novembre 2023. Ce dispositif n’est pas applicable uniformément sur tout le territoire français ; la collectivité qui souhaite son application doit être située en zone tendue et en faire la demande. La liste des communes situées en zone tendue figure en annexe du décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 ; la ville de Bordeaux en fait partie.
QUELS SONT LES LOGEMENTS CONCERNÉS ?
Ce dispositif concerne les locaux nus loués à titre de résidence principale, les locations meublées ainsi que les locations consenties dans le cadre d’un bail de mobilité, et régit la fixation du loyer initial pour l’ensemble de ces baux. Précision ici faite que ce dispositif ne concerne pas les biens des organismes dit HLM lorsque le logement est conventionné.
La loi ELAN ne révolutionne pas les rapports locatifs, elle a plutôt pour finalité de corriger les excès de la loi ALUR
CONDITIONS D’APPLICATION DU DISPOSITIF ET FIXATION DU LOYER
On rappelle le principe de liberté de fixation du loyer instauré par l’article 17.II de la loi du 6 juillet 1989, l’exception se trouvant dans l’article 140 de la loi ELAN, qui prévoit que lorsque le dispositif d’encadrement des loyers est mis en place, c’est le Préfet qui fixe chaque année et par arrêté, des loyers de référence, exprimés par un prix au mètre carré de surface habitable, pour chaque catégorie de logement et secteur géographique.
LOYER DE RÉFÉRENCE
Chaque loyer de référence est égal au loyer médian calculé à partir des niveaux de loyers constatés par l’Observatoire Local des loyers, selon les catégories de logements et des secteurs géographiques. Le loyer de référence majoré est égal au loyer de référence augmenté de 20 % ; le loyer de référence minoré est égal au loyer de référence diminué de 30 %. Le loyer de base est fixé librement entre les parties, bien entendu dans la limite du loyer de référence majoré (calculé comme indiqué ci-dessus), cependant un complément de loyer pourra être éventuellement appliqué pour les logements présentant des caractéristiques de localisation ou de confort le justifiant, et ce par comparaison avec des logements de même catégorie situés dans le même secteur géographique.
PARTICULARITÉ DES LOGEMENTS MEUBLÉS
On peut signaler que le loyer de base peut aussi être inférieur au loyer de référence minoré, car la fixation du loyer est libre dans le seul respect du loyer de référence majoré. Une particularité s’applique aux logements meublés pour lesquels le loyer de référence ainsi que les loyers de référence majorés ou minorés, sont déterminés par l’application d’une majoration unitaire par mètre carré aux loyers de références nus ; le complément de loyer doit tenir compte des équipements et services associés à ces logements meublés. Il est ici précisé qu’aux termes dudit contrat de bail, devront être obligatoirement mentionnés :
- le loyer de référence,
- le loyer de référence majoré ou minoré,
- et éventuellement le complément de loyer et les caractéristiques du logement le justifiant.
COMMENT ARTICULER L’ENCADREMENT DE LOYER DÉJÀ EXISTANT ET LE PLAFONNEMENT DES LOYERS, INSTAURÉ PAR LA LOI ELAN ?
Il est nécessaire de préciser que le plafonnement des loyers et l’encadrement des loyers, souvent confondus, sont deux dispositifs distincts, qui dans certains cas peuvent se cumuler. L’article 18 de la loi du 6 juillet 1989 est une exception à la liberté de fixation des loyers, cet article prévoit en effet que dans les zones tendues « un décret en conseil d’État, pris après avis de la commission nationale de concertation, fixe annuellement le montant maximum d’évolution des loyers des logements vacants et des contrats renouvelés ». Le régime actuel est fixé par le décret du 29 juin 2021, applicable pour une période d’un an jusqu’au 31 juillet 2022. Ce texte détermine le champ d’application du principe du plafonnement et en précise les exceptions. On peut rappeler que par principe le loyer du nouveau contrat de location ne peut excéder le dernier loyer appliqué au précédent locataire ; cependant par exception le loyer pourra être librement fixé si le logement était vacant depuis au moins dix-huit mois ou si des travaux d’amélioration ont été faits dont les caractéristiques sont définies par le décret.
DEUX RÉGIMES VONT DÉSORMAIS SE CUMULER À BORDEAUX :
Le plafonnement du montant des loyers édicté par l’article 18 de la loi du 6 juillet 1989 et l’encadrement de ce même loyer issu de l’article 140 de la loi ELAN, se cumuleront uniquement pour la ville de Bordeaux ; dans les villes de la Métropole, situées en zone tenue, seul le régime de l’article 18 (principe du plafonnement) s’appliquera.
QUELLES SONT LES RECOURS ET SANCTIONS EN CAS D’INOBSERVATION DE CES DISPOSITIONS ? :
- Lors de la conclusion du contrat de bail, une action en diminution du loyer peut être engagée par le locataire si le loyer de base prévu dans ledit contrat est supérieur au loyer de référence majoré en vigueur à la signature du contrat.
- Le locataire peut également contester le principe du complément de loyer, dans le délai de trois mois à compter de la signature du contrat en saisissant la commission départementale de Le bailleur devra alors démontrer que le logement présente effectivement des caractéristiques de localisation ou de confort justifiant ce complément de loyer. En cas de non-conciliation, le locataire aura alors un délai de trois mois à compter de la réception de l’avis de la commission pour saisir le juge d’une demande en annulation ou en diminution du complément de loyer.
On peut dire que la loi ELAN ne révolutionne pas les rapports locatifs. Elle semble avoir plutôt pour finalité de corriger les excès de la loi ALUR (fixation autoritaire du loyer principalement). Il est à souhaiter qu’une nouvelle loi ne vienne pas dans un proche avenir modifier l’équilibre fragile des relations bailleurs /locataires…