Couverture du journal du 19/04/2024 Le nouveau magazine

Pascal Chatonnet : technicien du vin

Les portraits de l'été - Il est né et a grandi dans le vignoble, pourtant, Pascal Chatonnet ne se destinait pas à se consacrer au vin. Mais son esprit rigoureux l’a rattrapé et, après avoir été chercheur et conseil, il gère aujourd’hui le vignoble familial.

vin

©Nathalie Vallez

Ce sont ses parents qui ont acheté en 1967 le vignoble (à l’époque en ruine), sur la commune de Néac, à proximité de Saint-Émilion : « à titre de hobby au départ », précise-t-il. Il a grandi à Montagne, et après des études agricoles, il passe un diplôme d’œnologue, « à une époque où les passerelles n’étaient pas évidentes entre les deux activités ». Pendant son service militaire, il est détaché dans un laboratoire de contrôle des achats. C’est là qu’il commence à s’intéresser aux analyses, et développe ses capacités de technicien. Sur les conseils du maître assistant de la faculté d’œnologie, il commence une thèse sous contrat avec une tonnellerie. Il développe une recherche sur le processus de fabrication des barriques. Cette première thèse lui permet de développer un savoir-faire dans la technique d’analyse des arômes – positifs ou négatifs – et de rebondir sur une seconde thèse d’État. Des recherches, prisées par les industriels, qui l’occupent pendant une vingtaine d’années. Pas très motivé par le professorat, il choisit de créer en 1992 – entre ses deux thèses – le laboratoire Excell.

LE GOÛT DU BOUCHON

Après 8 années, sur fond de conflits avec l’université, il décide de développer une activité de conseil en œnologie. Il revendra Excell en 2017 en le faisant fusionner avec un autre laboratoire. Pendant toutes ces années, il travaille sur les méthodes de bouchage. Missionné par des propriétés, d’abord dans le Bordelais, puis à l’international, il démontre que le goût de bouchon vient aussi des installations, et devient une référence. « Et les bouchonniers qui me lançaient des pierres ont commencé à me lancer des fleurs ! » De la même manière, en microbiologie, il montre la présence d’une levure dans les caves et qui laissait un arôme particulier dans les vins rouges. Cela permet de donner de nouvelles perspectives comme le rôle des phénols dans l’arôme des vins et d’initier de nouvelles recherches. « La première qualité du vin c’est l’absence de défaut », remarque-t-il.

MARCHE ARRIÈRE SUR LE BIO

Pendant ces années, il suit de loin les Vignobles Chatonnet, la propriété de ses parents, se consacrant uniquement à la partie technique et œnologique. Mais au décès de son père, il s’implique davantage, épaulant sa mère, puis reprenant tout en charge en 2020 : « Je suis la génération qui maintient », élude-t-il. Quant à une reprise éventuelle par sa fille : « je n’ai pas de volonté dynastique ». En parallèle de son activité de consulting, qu’il a conservée, il a contribué à l’optimisation des process : « On a fait
évoluer la viticulture en respect de l’environnement. On est revenu à un travail beaucoup plus précis ». Anti pesticides (il a beaucoup travaillé là-dessus) et herbicides, il commençait une conversion au bio avant de faire marche arrière : « Il fallait se passer d’une molécule luttant contre le mildiou. La prise de risques était trop forte ». Après avoir perdu plusieurs parties de ses récoltes, il s’investit dans un nouveau processus d’agri synergie : « c’est la synthèse de tous les modes de production respectueux au sens social et environnemental dans des conditions durables et responsables »

À MOTS DÉCOUVERTS

Cet été, cap sur…

« La Tanzanie. C’est rare que je prenne des vacances, mais je pars pour honorer une promesse faite à ma fille : un safari ! »

On trouve quoi dans votre valise ?

« Pas grand-chose ! »

Votre lecture de l’été :

« Le Dictionnaire philosophique d’André Comte-Sponville. L’avantage, c’est qu’on peut l’ouvrir à n’importe quelle page, et comme il y a 1 674 définitions, ça va m’occuper ! »

Le tube à écouter :

« Je suis très éclectique dans mes goûts. J’aime écouter de la musique en voiture. Avec Apple Music ça va de Camille Saint-Saëns à Lenny Kravitz. »

Votre cocktail signature ?

« Je viens de découvrir l’Olympia, une base un peu gin tonic, avec de l’amaretto. Le petit secret, c’est d’extraire l’huile essentielle de citron en pinçant les zestes. Ça change tout. »

Le meilleur endroit pour le siroter :

« Au coucher de soleil face à l’océan. » Votre meilleur spot girondin : « Saint-Émilion est une ville charmante, mais pas assez habitée. Il ne faut pas la voir seulement d’un point de vue touristique. »

Un projet pour la rentrée ?

« Les vendanges. Elles auront lieu fin septembre, mais on peut avoir des surprises : août fait le moût ! »