Couverture du journal du 19/04/2024 Le nouveau magazine

Printemps littéraire : les auteurs girondins à l’honneur

De la Cordillère des Andes à la province de Kaboul, en passant par Cadillac ou Bordeaux, les auteurs girondins nous font voyager dans le monde et dans le temps, à la recherche de leurs ancêtres ou par pur plaisir de fiction.

Agathe portail

Agathe portail © D. R.

Chevauchée argentine

Ils chevauchent côte à côte, lui Danilo qui quitte définitivement sa cabane d’estive pour amener ses derniers chevaux à l’estancia à laquelle il les a vendus. Et elle Alma, taciturne jeune femme tehuelche (amérindiens de Patagonie, NDLR) rongée par un secret. Au terme de cette épopée, ils vont devoir traverser les gorges du Rio, un barrage hydro électrique qui montre des signes de défaillance inquiétants alors que des pluies diluviennes doivent s’abattre dans les prochaines heures. Celui-ci est justement surveillé par un autre binôme Benoît et sa collègue Sandra. Les deux Français, venus assurer la mise en eau du barrage, se retrouvent livrés à eux-mêmes alors que l’ingénieur chargé de l’ouvrage a mystérieusement disparu. Agathe Portail a quitté son Sud-Ouest de prédilection (elle vit dans la région bordelaise) pour la Cordillère des Andes. Elle propose dans ce roman une sorte de western moderne, un roman d’aventures, porté par un rythme intense, qui nous entraîne dans les grands espaces. Tout au long de la traversée de ces paysages époustouflants (admirablement décrits) les personnages se dévoilent et gagnent en épaisseur. Un récit profond et haletant qui nous transporte. « Les âmes torrentielles » d’Agathe Portail (Actes Sud)

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Pour K.

K c’est la première lettre du prénom Khatera. C’est ainsi que la journaliste Maurine Bajac a surnommé son amie afghane. K c’est aussi la première lettre de Kaboul, là où l’enfer a commencé en août 2021. Comme tout le monde, Maurine Bajac a assisté, impuissante, à la reconquête du pouvoir par les Talibans. Comme tout le monde, elle a espéré, en vain, que ceux-ci seraient plus modérés. Mais quand le flot de l’actualité nous mène vers d’autres conflits, d’autres contestations, d’autres combats, Maurine Bajac est restée elle connectée avec celle qu’elle a su apprivoiser. Tout a commencé par un échange via Twitter. La famille progressiste de Khatera a fait partie de cette foule compacte, agglutinée devant l’aéroport de Kaboul, qui a regardé désespérée décoller les derniers avions internationaux, sans jamais réussir à avoir un laisser-passer. Pourtant en Afghanistan, ils sont maintenant la cible des Talibans, condamnés à une vie d’errance. Le désespoir de Khatera va vite laisser place à sa détermination et son courage : « Je sais qu’un jour ils me tueront (…) S’ils me trouvent ils me tueront quoi que je fasse. Alors autant continuer d’agir. » La confiance entre les deux jeunes femmes va aboutir à ce projet de livre à 4 mains. Les récits se suivent, ponctués d’échanges de textos. Maurine de son Sud-Ouest natal où elle retrouve sa jumelle. Khatera, depuis le village où elle se cache, qui raconte ses combats pour jouer au foot quand elle était enfant, puis l’école clandestine qu’elle vient de monter, les récits des sévices supportés par les villageoises soumises au bon vouloir de leur père ou leur mari. Aux dernières nouvelles, elle y est toujours, résistant encore, « car ça ne durera pas. Même s’il faut sacrifier deux ou trois générations, nous serons là ». « Je vous écris de Kaboul » de Khatera Amine et Maurine Bajac (Albin Michel)

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Fille du soleil

Mourir d’amour. C’est si romantique. Bien plus que de passer 40 ans dans un asile psychiatrique. Ainsi, la légende familiale disait qu’Anne Décimus, l’arrière-grand-mère de la narratrice, était morte de chagrin, brisée après la mort de ses deux fils et de son mari. Pourtant, lorsque Stéphanie Dupays, (statisticienne au ministère de la Santé) fait des recherches sur internet, elle découvre qu’Anne Décimus a passé les 40 dernières années de sa vie internée à l’hôpital Charles Perrens (autrefois Château-Picon). Revenue à Bordeaux pendant le confinement, elle va glaner les rares traces laissées par l’existence mystérieuse et niée de son aïeule : « Je reprends le carnet et je mets par écrit tout ce dont je dispose sur Anne Décimus, le cœur brisé et l’asile. » Un puma dans le cœur raconte son cheminement intime, cette quête de vérité sur les traces d’une femme au destin bouleversant. Ses courriers signés « Fille du soleil », sont particulièrement éloquents et à travers elle se dessine également une image de la psychiatrie dans la première moitié du XXe siècle. Les chapitres, très courts, sont toujours précédés d’un titre lui-même révélateur de l’introspection de l’auteure : « Oublieuse mémoire » ; « Mot à mot j’oublie la nuit » ; « Solaires ou lunaires les jours sont lunatiques acrobatiques ». Ce récit hybride, éminemment émouvant, mêle ainsi enquête, récit, pensées et poésie. « Un puma dans le cœur » de Stéphanie Dupays (Éditions de l’Olivier)

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En poche

Héritages

À travers les histoires de son grand-père Chaïm (interné à l’hôpital de Cadillac jusqu’à la fin de sa vie) et de son père Albert, dénoncé comme juif, qui a traversé la Pologne pour regagner la France à la libération des camps, François Noudelmann raconte le destin de sa famille liée aux deux conflits mondiaux qui ont marqué l’histoire du XXe siècle. Des récits qui l’amènent à s’interroger lui-même sur sa judéité et son rapport à l’État d’Israël. « Les enfants de Cadillac » de François Noudelmann (Folio)

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Trajectoire

Il est des vies éminemment romanesques. Celle de l’avocat Georges Kiejman a commencé de manière tragique : issu d’un milieu très modeste, juif polonais, il a subi les persécutions et a perdu son père déporté à Auschwitz. L’ascension sociale fulgurante qu’il a connue ensuite n’en est que plus épatante. Devenu avocat, il sera de tous les grands procès (qu’il relate), et deviendra même ministre délégué à la Justice. Un parcours au cours duquel il croise d’autres grands destins : il sera l’ami de Mendes France, Mitterrand, Simone Signoret ou encore François Truffaut. Malheureuse coïncidence de l’actualité, le brillant avocat vient de décéder au moment où ses mémoires, co-écrites avec la journaliste Vanessa Schneider, sortent en poche. Dans ce recueil intime, il révèle ses doutes, ses combats, ses victoires. Amoureux des livres et des femmes, il se livre avec franchise, et ce n’est pas sans une certaine ironie qu’il avoue être L’homme qui voulait être aimé. « L’homme qui voulait être aimé » de Georges Kiejman et Vanessa Schneider

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