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Communication culturelle : une mission d’intérêt général

« L’art est une activité sans produit » : cette phrase de l’artiste franco-américain Robert Filliou (1926-1987) introduit à merveille le sujet de la communication culturelle. Celle-ci ne vend pas un objet ou un service mais des valeurs, des idées et une expérience collective. Elle traduit une intention artistique en messages clairs et attractifs, tout en profitant de l’aura positive de la culture.

Communication culturelle, Lorraine Bezborodko © Louis Piquemil - Echos Judiciaires Girondins

Faire connaître un artiste, une programmation artistique ou une institution constitue la première mission de la communication culturelle. Sans information, il n’y a pas de public ; et sans public, il ne peut y avoir de rencontre entre l’art et la société. Affiches dans l’espace public, communication numérique, relations presse et partenariats médias, relations publiques, plaquettes d’activités, lancement de saison, vernissages… : les moyens et supports sont nombreux mais sont surtout complémentaires. Tous convergent vers un même objectif : rendre visibles les initiatives culturelles et inviter le public à venir à la rencontre de l’art.

Au-delà de ces campagnes de communication multicanales, il s’agit de traduire une intention artistique : en quoi cet artiste ou ce lieu se distingue-t-il ? Pourquoi cette œuvre est-elle importante à regarder ? Que raconte cette metteuse en scène à travers sa pièce ? La communication culturelle a pour but de mettre en lumière l’originalité et la pertinence d’un projet. Dans un paysage médiatique saturé d’informations et d’images, il est nécessaire de construire puis d’adapter un récit qui souligne la valeur unique de chaque proposition artistique. Ainsi, l’on réussira à capter une attention, éveiller la curiosité pour enfin attirer le public. Car si cette communication se distingue en un point capital, c’est l’invitation à une expérience collective que propose la culture. Informer, évidemment, et surtout partager.

L’attention qui compte

En outre, la communication culturelle n’est pas uniquement un vecteur promotionnel. Elle devient un outil stratégique visant à rendre la culture accessible à toutes et à tous, en particulier à celles et ceux qui en seraient les plus éloignés. En 1979, Pierre Bourdieu partageait ceci : « Les pratiques culturelles ne sont pas des choix libres : elles sont socialement conditionnées ». Il revient donc d’inventer des formes de communication sensibles, pédagogiques, inclusives. Grâce au travail des professionnels de la médiation culturelle, la communication va relayer des propositions innovantes (ateliers inclusifs, médiation sensorielle, expériences participatives…) qui renouvellent la relation au public. En rendant les œuvres et les intentions accessibles, la communication culturelle souhaite offrir aux publics la possibilité de s’approprier l’art et d’oser leur propre créativité.

Publics conquis, publics acquis ? La crise du covid 19 a eu un fort impact sur ce sujet. Le monde de l’art a redoublé d’efforts pour tenter de garder le lien avec ses publics durant cette période incertaine et restrictive : retranscription de concerts, de conférences, d’émissions de télé ou de radio enregistrées dans les expositions fermées au public, création de contenus ludiques ou éducatifs… En répondant aux attentes des publics et en gagnant leur confiance, la communication culturelle favorise leur fidélisation. Elle les incite à devenir non plus de simples spectateurs, mais de véritables acteurs, et plus encore, à devenir de réels ambassadeurs engagés avec sincérité.

Près de chez vous

En particulier à l’échelle locale, la communication culturelle joue un rôle notable dans la relation entre l’art et la société, là où les habitants vivent, travaillent, se rencontrent et se divertissent. En ce sens, elle agit comme un trait d’union entre la création artistique et le territoire. En adaptant les messages, les formats, les canaux de diffusion à des réalités de territoire – il faut citer là le rôle essentiel des médias locaux, la communication culturelle s’adresse à des personnes bien réelles, ancrées dans un quartier, attachées à une région, partageant un espace en commun. Cela favorise un sentiment de proximité et d’inclusion : la culture devient facilement une affaire de territoire. Qui n’a pas déjà entendu parler d’une ville ou d’un village grâce au festival de bandes dessinées, de musique, de cinéma, ou encore aux rencontres photos qui s’y déroulent chaque année ? Grâce à ce dynamisme culturel, la communication va pouvoir raconter le territoire et le rendre attractif autrement.

Au service de ces territoires, elle soulignera les démarches de coconstruction culturelle avec les habitants, en valorisant les artistes locaux, les projets participatifs, ou encore les lieux emblématiques.

La communication culturelle ne se résume donc pas à une campagne ou à un « coup de com’ » isolé, même si elle doit, elle aussi, savoir manier les codes de la communication et du marketing. Elle repose d’abord sur une stratégie globale, au service de la démocratisation culturelle.

Un levier de transformation

La communication culturelle est donc un champ passionnant, dépassant la simple diffusion d’informations pour devenir un levier de transformation sociale et créative. Elle ne se limite pas à faire connaître des événements ou des institutions : elle valorise la diversité des expressions artistiques.

La communication culturelle devient un outil de responsabilité sociétale

Elle peut notamment favoriser le croisement des disciplines (art, sciences, industrie, numérique, design…) pour susciter de nouvelles idées ou de nouvelles techniques : la rencontre d’un fabricant de pastels et d’une sculptrice, d’un atelier de fabrication bois et d’une compagnie de marionnettes, d’un studio de réalité augmentée et d’un artiste plasticien, en sont quelques exemples parmi d’autres. Pour un chef d’entreprise, la communication culturelle n’est pas qu’un outil de promotion de l’art : c’est un levier stratégique pour valoriser son image, affirmer ses valeurs, stimuler l’innovation, engager ses équipes autour d’un projet créatif et renforcer son rôle sociétal. C’est ainsi que la culture et sa communication peuvent être des déclencheurs de changement : les artistes sont et ont toujours été des témoins clairvoyants de leur époque. Ils et elles mettent en lumière des questions contemporaines (de nos jours, on peut citer l’écologie, la diversité, la transmission, les conflits politiques, etc.) et incitent à penser autrement. La communication culturelle devient un outil de responsabilité sociétale : elle aide à sensibiliser et accompagner les transitions écologiques, ou encore sociales. C’est une manière de positionner la culture comme bien commun, très éloignée d’un simple produit de consommation.

In fine, la communication culturelle ouvre une diversité de perspectives. En favorisant les échanges interculturels, elle résiste à tout discours figé ou compartimenté, tout en rendant la culture plus proche, plus vivante et plus partagée.

« L’art est ce qui rend la vie plus intéressante que l’art », disait Robert Filliou.

Les pratiques culturelles ne sont pas des choix libres : elles sont socialement conditionnées, Pierre Bourdieu

Sources : Pour une écologie de l’attention
Auteur : Yves Citton

La Distinction. Critique sociale du jugement
Pierre Bourdieu

À propos

L’Apacom, association loi 1901, a pour objectif de promouvoir les métiers de la communication, de favoriser les échanges et de valoriser le rôle stratégique de la communication auprès des chefs d’entreprise et des décideurs de la région Nouvelle-Aquitaine. Avec près de 500 membres adhérents qui représentent la grande diversité des métiers de la communication : elle représente l’une des plus importantes associations de communicants de France.

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