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Les TPE et les PME investissent peu

Les TPE et les PME accèdent facilement au crédit, d'après la Médiation du crédit. Mais elles investissent peu. Et continuent de subir les retards de paiement des grandes entreprises.

Forcément, on trouvera des témoignages d’entrepreneurs discordants. Mais globalement, la situation de l’accès des PME et des TPE au crédit est saine, d’après l’Observatoire du financement des entreprises, rattaché à la Banque de France. Le 18 décembre 2019, à Paris, lors d’un déjeuner de presse, Frédéric Visnovsky, médiateur national du crédit et président de l’Observatoire, présentait l’état des lieux le plus récent. Ce dernier est un « constat partagé », précise Frédéric Visnovsky : l’une des spécificités de l’Observatoire réside, en effet, dans le fait de réunir les représentants du monde économique dont ceux du secteur bancaire et des entreprises (Medef, CPME, U2P), afin de disposer d’une base de discussion commune. Car l’enjeu est de taille pour les PME et les TPE. Pour l’essentiel, ces entreprises dépendent du financement bancaire : 85 % de leurs dettes financières sont constituées de crédits bancaires. 

Aujourd’hui, globalement, le contexte d’accès au crédit est favorable, encouragé par la politique de taux bas de la Banque centrale européenne (BCE). De plus, « en France, le taux de crédit aux entreprises est plus faible que dans les autres pays européens, même si l’écart s’est réduit », précise Frédéric Visnovsky. Sur la période récente, pour les petites entreprises, les taux d’accès au crédit ont atteint des niveaux inédits : soit, pour les PME, proches de 90 % sur les quatre derniers trimestres pour les crédits de trésorerie, et supérieurs à 95 % pour les crédits d’investissement. Pour les TPE, les taux demeurent plus bas : sur la même période, ils sont de 70 % pour les crédits de trésorerie et de 87 % pour les crédits d’investissement. « Il demeure une spécificité des TPE qui tient au fait qu’entre 20 et 25 % d’entre elles ne disposent pas de capital », analyse Frédéric Visnovsky. En dépit de ce bémol, pour l’Observatoire du crédit, il n’existe pas de problème spécifique d’accès au crédit. Quand les entreprises ne les obtiennent pas, c’est en raison d’une situation de solvabilité ou de rentabilité dégradée.

Le « name and shame » inefficace ?

À confirmer cette analyse, aujourd’hui parmi les soucis évoqués par les chefs d’entreprises, le financement n’arrive qu’en sixième position, note l’Observatoire. Les entrepreneurs se préoccupent d’abord de trouver des clients, de la concurrence, des coûts de production ou du travail, de la réglementation, et, avant tout, de la disponibilité de travailleurs qualifiés. Mais si l’accès au crédit ne semble pas poser de problème en soi, le Médiateur pointe d’autres difficultés, d’ordres divers, qui touchent les PME et les TPE. Tout d’abord, « aujourd’hui, la problématique, c’est les moyens humains », note Frédéric Visnovsky. Autre souci de taille, le « problème sur les délais de paiement » demeure. Les retards de paiement des grandes entreprises représentent de 15 à 20 milliards d’euros. Or, « depuis trois ou quatre ans, ces retards, défavorables aux petites entreprises, restent stables. Il n’y a pas d’amélioration », constate le Médiateur du crédit. Le recours du gouvernement au « name and shame » et le durcissement des sanctions financières n’ont pas produit d’effets perceptibles. 

D’autres problèmes qui concernent les PME et surtout les TPE tiennent en revanche à leur fonctionnement propre, surtout dans une période où nombre d’entre elles sont jeunes, avec 800 000 nouvelles entreprises crées chaque année. La Banque de France, qui compte parmi ses missions l’éducation financière (des entreprises et des particuliers), estime ainsi qu’il existe un manque de compétences sur ce sujet dans les TPE, où le chef d’entreprise doit assumer à lui seul de nombreux rôles. La situation impacte négativement la relation avec le banquier, qui gagnerait à être plus régulière.

Un dernier point préoccupant, enfin, concerne un recours jugé insuffisant au crédit. D’après l’Observatoire, moins de 10 % des PME et TPE en font la demande, signe que ces entreprises ne réalisent pas les investissements indispensables aux transitions nécessaires à leur survie, en matière de numérique, notamment. Cette année, la situation devrait demeurer favorable en matière de conditions d’accès
au crédit.