« Nous sommes des conquérants. » 10 ans après la création d’Eat Salad qui compte 75 restaurants, Antoine Barat, cofondateur de l’enseigne avec son frère Joseph, le revendique volontiers. Tout a commencé en 2012 aux États-Unis. « Sur Times Square, j’ai été surpris par une file d’attente tellement grande que, pour ne pas prendre toute la chaussée, la clientèle s’était organisée en L. Je suis entré, c’était un bar à salade. J’ai été convaincu par le produit avant même d’avoir goûté », rapporte Antoine Barat.
Un marché de niche
À l’époque, il y voit une niche. Dans la restauration rapide, il y a des hamburgers, des pizzas, des sandwichs, mais pas de salade. « Il y avait bien des opérateurs en Île-de-France, mais personne de structuré au niveau national. Personne n’était le leader incontesté de son marché. Même à l’échelle mondiale, on ne l’a pas identifié. Je vous défie de trouver le leader en salade ! »
Notre cœur de cible, c’est l’actif du secteur tertiaire en hypercentre
Le jour où il découvre le concept, Antoine Barat, qui vient d’obtenir son diplôme en école de commerce en enchaînant « tous les métiers de la terre », appelle son frère, cuisinier de formation, pour lui proposer de plancher sur un projet de restauration rapide, version salade. « Il m’a donné son accord immédiatement. Nous avions 21 et 22 ans. »
Créer un concept pour mieux le dupliquer
Ils partent d’une page blanche en commençant par le concept. « On a appris à marcher avant de courir », confie-t-il. Mais dès le début, l’ambition est claire : il s’agissait de créer un concept pour le dupliquer. Ils trouvent un nom qu’ils déposent, dès le départ, dans 69 pays, rédigent des manuels opératoires, le savoir-faire. Il leur a fallu 18 mois pour passer de l’idée au projet.
Le premier restaurant pilote a ouvert en avril 2013 dans le centre de Bordeaux. Nés de parents breton et espagnol, les deux frères ont jeté leur dévolu sur le Port de la Lune pour son important ratio de fast-food par habitant. « On s’est dit que si, avec une importante concurrence, ça marchait à Bordeaux, ça marcherait partout ailleurs. Nous avions aussi besoin de soleil », souligne Antoine Barat. Le deuxième restaurant a ouvert en novembre 2014 en zones d’activités à Mérignac où est désormais installé le siège social. « Notre cœur de cible, c’est l’actif du secteur tertiaire en hypercentre et en zone d’activité », explique Antoine Barat.
L’argument de la cuisine saine
Le concept d’Eat Salad est simple : le client choisit une base (salade verte, riz, pâtes, pita…), les ingrédients pour composer sa salade puis la sauce. La tête de réseau travaille avec un fournisseur national qui s’approvisionne auprès de coopératives locales. Mais le leitmotiv d’Eat Salad, c’est la restauration rapide couplée à une cuisine saine. « Je joue davantage sur la nutrition que l’origine des produits. Une portion apporte tant de nutriments et tant de calories. Les clients font attention à ce qu’ils mangent », se justifie Antoine Barat. « Ils ont pris conscience qu’il n’est pas possible de manger frit tous les jours et ils aiment le sur-mesure. » Depuis sa création, il y a 10 ans, la gamme a été élargie. Il y a désormais une carte été et une carte hiver. Des salades, bien sûr, mais aussi des soupes ou gaspachos, des tartes salées et des plats saveurs du monde.
Mais au-delà du menu, les deux frères ont surtout décortiqué 580 éléments, classifiés en 13 catégories, pour composer le concept Eat Salad. La tête de réseau affiche ainsi 100 règles pour le positionnement marketing ou encore 80 pour la signalétique. L’idée : transmettre efficacement le concept.
Inspiration McDonald’s
Mais le concept ne suffit pas. « Notre force, c’est le concept associé au système de franchise », insiste Antoine Barat. Sa source d’inspiration ? « McDonald’s ! Le système est gagnant-gagnant. Les franchisés gagnent bien leur vie et c’est parce qu’ils gagnent leur vie que le modèle est si fort. » Antoine Barat n’a lui-même rien inventé. « C’est Alfred P. Sloan dans les années trente qui a inventé l’ingénierie du système de franchise et c’est exceptionnel. C’est le levier de croissance le plus puissant au monde. Les franchisés investissent avec leurs deniers. Ils se comportent comme des chefs d’entreprise parce que c’est leur argent, qu’il y a leur nom sur le bail commercial, sur les contrats de travail et l’offre de prêt. En revanche, ils ont compris que pour réussir individuellement, il fallait d’abord réussir collectivement. Et cette solidarité entre les parties fait rouleau compresseur face à la concurrence. »
Ce n’est pas le joueur qui compte, c’est le club, c’est l’institution
S’il est convaincu que le modèle de la franchise présente une rentabilité supérieure au modèle d’indépendant isolé, c’est grâce à la massification des achats, au fait d’avoir une meilleure logistique, d’être reconnu auprès des bailleurs, des pôles franchise des banques. C’est donc le collectif avant tout, sans émotion. « On ne fait pas ce qu’on aime, on fait ce qu’il faut. Ce n’est pas le joueur qui compte, c’est le club, c’est l’institution, et nous sommes au service de ce collectif. »
La force du collectif
Un restaurant Eat Salad réalise un million d’euros de chiffre d’affaires annuel au bout de trois ans selon la tête de réseau qui se rémunère via les royalties. Le droit d’entrée de 35 000 euros, payé par le franchisé, est intégralement réemployé pour accélérer la croissance. « Plus de l’argent est réinvesti, plus le réseau se développe, plus la notoriété et les innovations se développent, plus le chiffre d’affaires des franchisés se développe et plus les marges partagées se développent », déroule Antoine Barat qui insiste sur l’importance d’assigner les redevances aux bons services, par exemple le 1 % de communication. « Plus je fais de la com’, plus j’ai de la notoriété, plus je convaincs de franchisés de signer, plus il y a de clients, plus le chiffre d’affaires croît. Plus on est nombreux, plus on massifie les achats, et plus on est compétitif, plus on fait bénéficier le client d’un meilleur rapport qualité-prix. Voyez la puissance de la franchise quand c’est bien piloté. Mais comme il n’y a pas d’école de la franchise en France, tout se fait à l’instinct. »
En tout, les deux frères ont ouvert 13 restaurants en propre dont ils se séparent progressivement. L’idée était de planter des drapeaux, de réserver certains territoires, d’éprouver le concept dans d’autres régions de France. Mais « c’est compliqué d’être aussi performant qu’un franchisé », reconnaît Antoine Barat. « Le franchisé qui ouvrirait un Poitou-Charentes Salad serait moins performant qu’un restaurant Eat Salad qui bénéficie de la logistique et de la notoriété. Dans le même temps, si j’ouvrais seul un restaurant Eat Salad en Poitou-Charentes sans connaître le tissu économique local, les comportements alimentaires, je ne serais pas aussi performant. » Pour tenir ce rôle, Eat Salad cherche, non pas des restaurateurs mais des gestionnaires, des commerçants, des managers.
30 points de vente par an
Eat Salad a jusqu’à présent recruté 50 franchisés qui ont chacun pour objectif d’ouvrir 3 à 5 restaurants. Entre 90 et 100 franchisés devraient encore rejoindre le réseau pour mailler le territoire national. 392 territoires ont d’ores et déjà été identifiés pour de nouvelles implantations. « Pour établir cette carte, nous avons analysé les modèles pilotes les plus rentables. Il en ressort que 392 zones présentent un potentiel similaire. C’est un peu le GPS de ma croissance. »
Eat Salad prévoit 25 ouvertures cette année
Eat Salad prévoit 25 ouvertures cette année. « Nous devrions ouvrir le 100e », se réjouit Antoine Barat qui a l’ambition d’ouvrir 30 nouveaux points de vente par an en ciblant aussi des canaux supplémentaires : les aéroports et les stations-service, la première ouvrira avant l’été sur l’A7. Un restaurant ouvrira également à Barcelone.
Depuis la création d’Eat Salad, six établissements ont fermé. « Le modèle n’était plus adapté aux emplacements. Le Covid est aussi passé par là. Le comportement alimentaire a évolué, les clients se font beaucoup livrer. Ils prennent à emporter. Il y a donc moins besoin de places assises. Les surfaces des restaurants ont donc été réduites, ce qui a pour conséquence immédiate d’avoir des loyers moins chers et un investissement moins lourd », explique Antoine Barat.
En 2023, Eat Salad a annoncé un chiffre d’affaires consolidé de 65 millions d’euros, restaurants et tête de réseau compris.
Eat Salad en chiffres
Création en 2014
65 millions d’euros de chiffre d’affaires consolidé en 2023 (restaurants + tête de réseau)
75 restaurants, 100 d’ici fin 2024
50 franchisés
100 franchisés devraient encore rejoindre le réseau
35 000 euros de droit d’entrée