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[ JO de Tokyo 2021 ] Maroussia Paré : Objectif podium !

À seulement 25 ans, la sprinteuse de l’US Talence Maroussia Paré participera à ses deuxièmes Jeux Olympiques. Elle nous dévoile les coulisses de sa saison passée, bousculée par la crise sanitaire, mais aussi les secrets de sa préparation pour les Jeux de Tokyo, qui débutent le 23 juillet 2021. Elle nous explique aussi comment elle garde la tête sur les épaules en conciliant sa carrière sportive avec son métier de psychologue. Entretien.

Maroussia Paré athlétisme JO

Maroussia Paré, équipe de France d’athlétisme (4 x 100 mètres) © Atelier Gallien - Echos Judiciaires Girondins

Échos Judiciaires Girondins : Vous allez participer aux Jeux Olympiques de Tokyo, l’une des plus importantes compétitions pour un athlète. Quel est votre objectif ?

Maroussia Paré : « Avec l’équipe de France du 4 x 100 mètres, discipline pour laquelle j’ai été sélectionnée, nous visons le podium olympique, donc au moins la médaille de bronze. Participer aux Jeux Olympiques est déjà quelque chose d’indescriptible, mais recevoir sa médaille, entendre l’hymne de son pays… Ce serait vraiment émouvant. Pour une majorité de sportifs, en athlétisme ou en judo notamment, une médaille d’or aux JO est la plus belle distinction que l’on puisse recevoir. »

Recevoir sa médaille, entendre l’hymne de son pays… ce serait vraiment émouvant

EJG : Que pensez-vous en retirer sur le plan sportif, mental, etc. ?

Maroussia Paré : « Participer aux Jeux Olympiques, c’est un capital confiance énorme. Et ce sera mes deuxièmes Jeux, à seulement 25 ans. Même si les JO de Rio, en 2016, n’ont pas été une très bonne expérience sur le plan sportif, puisque je pensais être titulaire au 4 x 100 mètres et que je n’ai été que remplaçante. Mais en termes de confiance et de carrière, cela reste assez beau. Et c’est un véritable avantage, car quand il y a des moments compliqués, c’est ce capital confiance qui grossit et qui peut prendre l’ascendant. C’est essentiel dans mon sport, où la confiance et le mental peuvent faire la différence. Il m’est arrivé à plusieurs reprises de débuter un championnat avec un chrono pas forcément bon, après une blessure, et de terminer finaliste en battant mes records. À mon niveau, on a tous du talent, on travaille tous de la même façon, on a tous le potentiel pour gagner. Et à qualité égale, ce sera l’athlète avec un mental plus efficace ou adapté qui va tirer son épingle du jeu. »

À qualité égale, c’est l’athlète avec un mental plus efficace qui tirera son épingle du jeu

Maroussia Paré athlétisme JO

Maroussia Paré, équipe de France d’athlétisme (4 x 100 mètres) © Atelier Gallien – Echos Judiciaires Girondins

 

EJG : Quelles sont vos autres qualités en tant qu’athlète ?

Maroussia Paré : « Physiquement, ce serait mon pied. En athlétisme, on dit qu’on a du pied quand le pied est léger, qu’on rebondit et qu’on passe très peu de temps au sol. Ce serait aussi ma foulée : contrairement aux autres sprinteuses, je suis plutôt longiligne (sans être trop grande), avec des segments longs, ce qui me permet d’être très élastique et de faire des grandes foulées, en même temps efficaces. Ce rapport poids / puissance / élasticité est vraiment intéressant. En revanche, ce qui me manque par rapport à une sprinteuse pure, c’est l’explosivité. Ce n’est pas une grosse lacune, car c’est compensé par mes qualités physiques. Mais sur la sortie de starting-block ou sur les premières foulées, je ne suis pas la meilleure. C’est une fois en course que je vais plus vite. C’est notamment pour cela que le 4 x 100 mètres me convient très bien, car le départ se fait debout. »

 

EJG : Quelle est votre histoire, comment êtes-vous devenue athlète professionnelle ?

Maroussia Paré : « Je suis née à Bordeaux et j’ai grandi dans les Landes avec mes parents et mes deux grandes sœurs. Ma mère était préparatrice en pharmacie et mon père, postier. Quand il était jeune, il était triathlète, donc pour lui, c’était obligatoire que toute la famille fasse du sport. Il me prédestinait à être athlète, il aurait clairement aimé faire tout ce que j’ai fait. Je n’ai pas honte de dire qu’il vit son rêve à travers moi. Donc quand j’ai commencé, il était vraiment à fond derrière moi, il m’a d’ailleurs entraîné une année. Aujourd’hui, je suis obligée de lui imposer quelques limites… J’ai eu 25 ans le 18 juillet, j’ai commencé ma carrière de professionnelle très tôt : je suis entrée à 18 ans en équipe de France sénior. Mais honnêtement, ça m’est vraiment tombé dessus. Vers 15-16 ans, j’ai même voulu arrêter l’athlétisme, parce que ça prenait beaucoup trop d’importance dans ma vie. Finalement, j’ai continué et j’ai bien fait. »

Les infrastructures de Gironde ont vraiment été un avantage pour moi

EJG : Vous êtes donc originaire de la région Nouvelle-Aquitaine, et licenciée à l’US Talence depuis 2015. Est-ce que les infrastructures locales (CREPS, filières sport…) ont constitué un avantage pour vous ?

Maroussia Paré : « C’est certain, les infrastructures de Gironde ont vraiment été un avantage pour moi. À Talence, il va bientôt y avoir un tout nouveau stade, un très grand centre sportif, avec une énorme salle de musculation de 300 mètres carrés, ça va être vraiment super pour les athlètes. La ville va même pouvoir accueillir des délégations qui vont venir s’entraîner. C’est un avantage considérable d’avoir les bonnes infrastructures quand on veut faire du haut niveau. »

Pour éviter les tentations du village olympique, nous n’arrivons que 2-3 jours avant le début des épreuves d’athlétisme

EJG : Pouvez-vous nous décrire vos journées-types en ce moment ? Comment se passe la préparation pour les JO ?

Maroussia Paré : « Jusqu’à fin juin, c’était un peu particulier, parce que nous étions en période de compétition, quasiment tous les week-ends et plusieurs fois par semaine. Il y a notamment eu le championnat de France, qui ne s’est pas très bien passé pour moi puisque j’ai fini quatrième (alors que j’ai l’habitude de monter sur le podium…), même si c’était mon meilleur chrono de la saison. Donc, nous étions dans une période avec vraiment beaucoup de récupération, de qualitatif et un peu de technique. Ensuite, j’ai fait un premier stage du 10 au 17 juillet à l’Insep (Institut national du sport) à Paris, puis nous sommes partis en camp d’entraînement à Kobé, au Japon, pour une période de 10 à 15 jours (car les athlètes qui participent aux JO sont mis en quarantaine). On rejoindra juste après cela le village olympique. Les Jeux débutent le 23 juillet, mais les épreuves d’athlétisme ont lieu la dernière semaine, à partir du 30 juillet. Et depuis 2016, pour éviter les tentations du village olympique (dont McDo est le partenaire officiel !), nous n’arrivons que 2-3 jours avant le début des épreuves d’athlétisme. »

En parallèle de ma carrière d’athlète, je suis psychologue consultante en bien-être et santé mentale auprès des entreprises et des sportifs

EJG : Est-ce que vous avez des techniques de concentration particulières avant une course ?

Maroussia Paré athlétisme JO

Maroussia Paré, équipe de France d’athlétisme (4 x 100 mètres) © Atelier Gallien – Echos Judiciaires Girondins

Maroussia Paré : « En effet, je fais beaucoup d’imagerie mentale : je visualise toute ma course, les sensations que j’aimerais avoir, etc. Je fais également de la cohérence cardiaque et je me concentre sur ma respiration pour vraiment me focaliser sur le moment présent. Parce que quand je m’apprête à courir, beaucoup de choses peuvent venir me perturber. Or il ne faut pas louper le coche. Donc l’idée est de basculer sur quelque chose que je maîtrise, qui est contrôlable dans le moment présent. Tout cela demande de l’entraînement, notamment la visualisation, car c’est assez compliqué. Mais c’est une routine à avoir. »

 

EJG : Comment s’est passé votre saison ?

Maroussia Paré : « Ma saison individuelle ne s’est pas très bien passée. Je pense qu’au niveau de ma préparation, nous avons des choses à modifier avec mon coach. Tous nos choix n’ont peut-être pas été judicieux, et ça s’est ressenti au niveau des chronos. L’athlétisme est un sport de détail, donc un détail, plus un détail, plus un détail, à la fin, ça fait beaucoup. D’ailleurs, j’aurais aimé aussi me qualifier aux JO sur le 200 mètres (il faut dire qu’un sportif veut toujours plus !), mais ce sera pour la pro- chaine fois… »

 

EJG : Vous pensez que cela peut être lié à la situation sanitaire ?

Maroussia Paré : « Pas forcément, car j’ai eu la chance de pouvoir continuer à m’entraîner. Pendant le premier confinement, j’ai essayé de garder la vie la plus normale possible, car je ne voulais pas être désorientée, être dans un faux rythme ou un mauvais rythme. Donc mon coach m’envoyait des séances que je suivais. Je me réveillais tous les jours à 7 heures du matin. Trois fois par semaine, je m’entraînais deux fois par jour, comme habituellement. Et le soir j’allais sur les chemins de vignes pour courir longtemps.

Ensuite pendant le deuxième et le troisième confinement, j’ai pu m’entraîner normalement, puisque je suis professionnelle, donc j’avais une dérogation. Mais peut-être que la situation a pu jouer de manière insidieuse, nous avions moins de repères, les objectifs sportifs tombaient au fur et à mesure… S’entraîner sans but, c’est compliqué. Et puis en parallèle, il a fallu que j’obtienne mon master de psychologue clinicienne spécialisée en psychopathologie, diplôme que j’ai eu en 2020. »

 

EJG : C’était important pour vous d’obtenir ce diplôme ?

Maroussia Paré : « Oui, c’était vraiment important pour moi de continuer mes études en parallèle de ma carrière sportive. D’abord parce que très très peu de personnes vivent de l’athlétisme. Et puis, j’estime que c’est un sport qui, même s’il prend du temps, en laisse encore un peu pour faire autre chose à côté. C’est aussi un sport qui peut s’avérer très ingrat, car quand bien même on s’entraîne tous les jours et on se sent performant, les résultats ne sont pas toujours là. Donc, pour moi, n’avoir que cela en tête, c’est beaucoup trop dangereux. Par ailleurs, avoir une autre activité à côté protège du burn out sportif. Enfin, c’est également important d’avoir des pistes pour ma reconversion. Car même si, jusqu’ici, j’ai toujours fait passer l’athlétisme avant mes études et avant le travail, je pense à ma sortie de carrière. »

 

EJG : C’est pour cela que vous avez créé, en parallèle de votre carrière sportive, la structure « Sport et psycho » ? Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s’agit ?

Maroussia Paré : « En effet, en parallèle de ma carrière d’athlète, je suis psychologue consultante en bien-être psychologique et santé mentale. J’interviens auprès des entreprises, où je dispense des formations sous forme d’ateliers, de conférences, etc. ; auprès des sportifs, pour qui je fais plutôt de l’accompagnement et du coaching ; et dans les écoles supérieures, où je donne des cours de motivation. J’ai donc créé ma structure, « Sport et psycho », à travers laquelle je fais des prestations. Même si c’est difficile de porter seule son entreprise, c’est quelque chose qui me tenait vraiment à cœur de pratiquer une fois que j’avais obtenu mon diplôme. Mais je ne pouvais pas proposer du suivi classique, puisque parfois, avec les déplacements, je suis indisponible, cela me gênait sur le plan éthique. Aujourd’hui, cela représente 10 à 15 heures de travail par semaine. Mais en termes de rémunération, pour l’instant, c’est juste un complément. »

J’ai aussi un mécène : le cabinet d’avocats d’affaires Laude Esquier Champey

EJG : Quelles sont vos sources de revenus actuellement ?

Maroussia Paré : « Je suis une athlète professionnelle, donc je suis en contrat avec la Fédération française d’athlétisme et avec mon club de Talence, qui me rémunèrent. J’ai aussi un mécène : le cabinet d’avocats d’affaires pari- sien Laude Esquier Champey, avec qui j’ai commencé un partenariat en septembre 2020. C’est vraiment un bonheur d’être avec eux, parce qu’ils me soutiennent et sont très encourageants, sans me mettre la pression sur les résultats, contrairement à Adidas, avec qui j’ai été en contrat équipementier pendant 5 ans. »

 

EJG : Votre carrière de sportive et votre expérience de la compétition représentent-ils un atout dans votre métier de psychologue ?

Maroussia Paré : « Oui, j’avais vraiment envie que cela me serve d’expérience et me permette de créer le lien avec les patients. Le parcours d’un sportif peut être très inspirant. Et cela me sert d’illustration pour aborder des thèmes qui sont universels. Je propose donc un catalogue de 6 thèmes autour de l’auto-efficacité ou le sentiment d’efficacité personnelle (le fait de croire que mes capacités vont me permettre de produire un résultat donné) ; de l’affirmation de soi (il s’agit plus de communication, de techniques pour, par exemple, savoir comment dire non ou comment demander quelque chose à quelqu’un) ; de la gestion du stress ; de la gestion des émotions ; de la gestion de l’échec ; et enfin de la motivation. Ce sont des thèmes universels, mais aussi très sportifs. Ça fait vraiment le lien entre mes deux métiers. »

 

EJG : Vous êtes assez présente sur les réseaux sociaux, qui semblent tenir une place de plus en plus importante dans la vie des sportifs. Comment les utilisez-vous ?

Maroussia Paré : « Effectivement, c’est très important pour moi. Au niveau sportif d’abord, où je fais le débrief de mes compétitions en demandant aux personnes qui me suivent ce qu’elles ont envie de savoir, et je me rends compte qu’elles sont très curieuses de connaître les coulisses d’un sportif. Cela permet vraiment de créer du lien. Pour les sponsors aussi, c’est très important : certaines marques demandent à leurs sportifs d’être beaucoup plus présents sur les réseaux sociaux et je pense qu’à terme, il y aura même des clauses dans les contrats imposant un certain nombre de followers, de publications… Enfin, les réseaux me servent aussi en tant que psychologue. C’est un métier autour duquel il existe beaucoup de mythes, de préjugés et de croyances limitantes. Je suis une jeune psy de 25 ans, c’est une de mes motivations d’être très présente et d’expliquer mon métier afin que les gens n’aient pas peur de demander l’aide d’un psychologue. »

 

EJG : Quels sont vos prochains objectifs ?

Maroussia Paré : « En 2022, il y aura les Championnats du monde, aux États-Unis, dans un superbe stade où j’ai déjà eu la chance de courir lors des Championnats du monde juniors. Ensuite, la prochaine grosse étape, ce sera les Jeux de Paris 2024. J’espère que nous aurons une belle équipe de France (que j’en fasse partie ou pas, d’ailleurs !). Mais ce qui est certain, c’est qu’avoir les Jeux chez soi, ça va être grandiose ! »

La prochaine grosse étape, ce sera les Jeux de Paris 2024. Ça va être grandiose

MAROUSSIA PARÉ : PALMARÈS

L’athlète de l’US Talence est spécialiste du sprint sur les épreuves de 100 mètres, 200 mètres, le relais 4 x 100 mètres, mais aussi le 200 mètres et le 60 mètres en salle

2015 : Médaille de bronze aux Championnats d’Europe juniors sur le 200 mètres

2016 : Première participation aux JO de Rio à seulement 20 ans

2017 : Médaille de bronze aux Championnats d’Europe par équipes, Vice-championne de France sur le 200 mètres, Double championne de France (Élite et Espoirs) en 200 mètres en salle

2019 : Championne du monde du relais 4 x 200 mètres, Championne de France Élite du 200 mètres en salle, Vice-championne de France sur le 200 mètres

2020 : Championne de France Élite du 200 mètres en salle

2021 : Deuxième participation aux JO de Tokyo

LES ATHLÈTES GIRONDINS AUX JO DE TOKYO

La délégation française aux JO de Tokyo sera composée de 378 athlètes (212 hommes et 166 femmes) qui représentent 31 fédérations. Parmi eux, 10 athlètes girondins :

Maroussia Paré (US Talence) : athlétisme

Melvin Raffin (Bordeaux Athlé) : athlétisme

Gabriel Tual (US Talence) : athlétisme

Ryan Zeze (Bordeaux Athlé) athlétisme (remplaçant)

Jérémy Chardy (Villa Primrose) : tennis

Manon Valentino (Stade bordelais BMX) : BMX

Joris Daudet (Stade bordelais BMX) : BMX

Samuel Kistohurry (USSAP Boxe) : boxe (52-57 kg)

Lucile Tessariol (SA Mérignac) : natation course

Carole Cormenier (Tir club Dubourdieu Cestas) : tir sportif

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