Dans un huis clos submersif, deux bonnes ressassent leurs frustrations et leurs humiliations jusqu’à l’acte de haine pure. La pièce de théâtre de Jean Genet raconte une histoire de l’enfermement. Écrit en 1947, mais déniant tout lien avec le fait divers des sœurs Papin (auquel on pense tout de même !), Jean Genet tire le drame du côté de la lutte des classes. Tous les soirs, Claire et Solange inventent des histoires, se fardent, s’habillent et jouent à être une autre pour échapper à leur sinistre quotidien. Genet célèbre ici la puissance libératrice de l’imaginaire et du jeu. Madame, la patronne, incarnation de la hiérarchie sociale et de l’ordre établi, devient une créature fantasmée, une surface de projection pour qu’éclate la révolte des deux sœurs. Cette présence fantasmée est incarnée sur scène par le comédien Yuming Hey, qui est doué d’un fort pouvoir de transformation. En s’emparant de cette œuvre, le metteur en scène Mathieu Thouzé comble son goût pour les paillettes, les contradictions et le décorum. La scénographie est un savant mélange d’épure et de sophistication. Dans un décor blanc, de multiples escaliers et des meubles suspendus viennent compliquer la donne. Le trio célèbre ici la théâtralité et la force de l’imaginaire.
Les Bonnes, du 9 au 12 avril au TNBA
