« Je suis très marqué par la Cour des comptes, c’est ma première vie professionnelle et celle à laquelle je suis revenu régulièrement. Je suis très attaché à cette institution ». Vincent Léna, président de la chambre régionale des comptes (CRC) depuis février, s’intéresse avant tout au fait local : « il n’y a pas de politique nationale sans politique locale ».
Sous-préfet
Dès sa sortie de l’ENA – « un cursus classique » commente-t-il – il entre à la Cour des comptes et demande à faire un stage dans une chambre régionale. Une demande bien moins classique. « La Cour des comptes c’est formidable, continue-t-il, car ça permet d’avoir des compétences techniques, juridiques ou économiques, et ça autorise à s’ouvrir à d’autres métiers. »
Il devient ensuite sous-préfet dans le Pas-de-Calais, « ça m’a beaucoup marqué car par la suite, j’ai alterné entre des fonctions dans les ministères et le terrain en tant qu’élu local ou responsable associatif. J’ai toujours eu cette crainte de me déconnecter de la vraie vie ».
Plan banlieues
Il garde un souvenir « intense » de ses expériences en cabinet ministériel avec Claude Bartolone ou Brigitte Bourguignon, « elles réconcilient avec l’action publique ». Il a également été rapporteur du plan Borloo pour les banlieues : « certaines mesures en cours, dont le chantier des cités éducatives, sont issues de cette expérience de terrain ». Pour cela, il a passé 2 ans dans une banlieue à Grigny, à la rencontre des habitants et des associations : « on a construit beaucoup de choses », se souvient-il.
Il a, par la suite, lancé 80 cités éducatives (il y en a 250 aujourd’hui n.d.l.r.) en tant que coordonnateur interministériel de ce chantier : « ça a passionné tous les acteurs de la politique de la ville. » Il reste en relation avec les ministres de la Ville et a d’ailleurs fourni un rapport, en février dernier, sur l’accompagnement des familles monoparentales dans les quartiers. « C’est mon fil rouge, précise-t-il, c’est sur les territoires qu’il y a des enjeux. »
Vincent Léna s’est également engagé localement en politique, en tant qu’adjoint au maire à Boulogne-sur-Mer et à Berck, et que conseiller régional chargé de la jeunesse et du sport dans le Nord-Pas-de-Calais.
Servir le débat public
Il voulait présider depuis longtemps une chambre locale pour retrouver les acteurs de l’action publique. Il a fait ce choix car la réforme des juridictions financières, sous l’impulsion de Pierre Moscovici, offre aux chambres « plus de champs d’action ». « Ça change le rapport qu’on peut avoir avec ceux qu’on contrôle. Il est plus frontal car des leviers permettent maintenant de lancer les procédures contre les mauvaises gestions. En même temps on a des outils pour les accompagner ».
La Cour des comptes, en s’investissant dans le débat public, en activant une campagne citoyenne, en publiant en ligne ses rapports, devient de plus en plus médiatique. « Les chambres régionales vont suivre la même trajectoire d’ouverture et de notoriété ». À la chambre, il assure un double rôle de management en interne, « avec l’enjeu de travailler sur les parcours », et l’organisation extérieure qui permet de présenter la réforme de la chambre régionale. « J’aimerais que la CRC soit perçue comme un endroit qui fournit une information fiable qui sert le débat public, c’est mon travail d’ambassadeur ».
À mots découverts
Votre dernière lecture : J’ai toujours un livre sur moi. Pour mon travail, je lis L’emprise scolaire, un essai de François Dubet (avec Marie Duru-Bellat), un Bordelais, sociologue de l’éducation, qui est intervenu à la CRC. Sinon, je suis passionné de littérature japonaise et je relis La mer de la fertilité, de Yukio Mishima, c’est un livre incroyable. Et j’ai beaucoup aimé Abel d’Alessandro Baricco, un auteur italien génial.
Écoutez-vous de la musique ? : J’écoute toute sorte de musique, du classique au rap !
Un lieu culturel où vous aimez aller : J’aime beaucoup la Dordogne, avec un très beau patrimoine historique : Lascaux, le Périgord noir…
Un spectacle qui vous a marqué : Brad Mehldau, un pianiste de jazz incroyable qui est passé à l’auditorium. Il fait des improvisations sur du Bach, j’ai été scotché.
Êtes-vous cinéphile ? : J’aime autant les films d’action grand public que les films japonais ou coréens.