Échos Judiciaires Girondins : Vous avez publié fin avril l’ouvrage « Exploite ta zone de confort » (Éd. Eyrolles). Une idée qui va à l’encontre de ce que l’on entend habituellement. Pouvez-vous tout d’abord nous donner votre définition de la zone de confort ?
Laure Dodier : Dans la définition donnée à l’origine par la psychologue américaine Judith Bardwick, que je conserve, il s’agit d’une zone neutre d’anxiété, dans laquelle on se sent en maîtrise et en sécurité. J’ajoute que c’est lorsqu’on se trouve dans cette zone que non seulement on peut être performant, mais également en bonne santé. Elle repose sur quatre éléments essentiels : notre état de santé physique et mental ; le respect de notre fonctionnement naturel ; la sécurité financière ; et la notion de fluidité. C’est un véritable enjeu dans le monde du travail actuel, car si on prend soin de la santé des humains en priorité, alors on a des résultats qui profitent à l’entreprise.
EJG : Dans votre livre, vous définissez sept clés pour « atteindre ses objectifs business, sans dépasser ses limites ». Quelles sont-elles ?
L. D. : La santé doit être placée au premier plan. La seconde clé, c’est la santé mentale. Le stress pathologique provoque des dommages sur les capacités cognitives et le corps. Il faut trouver comment, dans son business, limiter au maximum le stress à la source et libérer du temps pour des activités anti-stress. Dans le slowpreneuriat, on va chercher le point de rencontre entre nos besoins, nos réalités, nos talents, et les besoins du client.
Les clés trois et quatre consistent ainsi à apprendre à se connaître pour adapter son business : créer son business model, ses formats d’offres, établir ses prix, sa communication, ses ventes, etc., en co-construction avec ses clients, ce qui amène d’ailleurs des solutions créatives et distinctives. C’est un peu déstabilisant ou culpabilisant au départ, car on se rend compte qu’on obtient des résultats sans souffrir.
La cinquième clé est la sécurité financière, et elle nécessite de comprendre que la valeur de ce que l’on vend n’est liée ni à l’effort que l’on fournit, ni à la confiance que l’on a en soi, mais à ce que cela apporte réellement au client.
EJG : Qu’en est-il en termes de communication et de vente, des sujets essentiels pour développer son activité en tant qu’indépendant ?
L. D. : La sixième clé concerne la communication, le marketing et la vente, souvent sources de stress pour les indépendants. Ces trois champs offrent énormément de possibilités, il faut trouver la solution qui nous correspond.
La septième clé se concentre sur la notion d’essentialisme : il faut s’assurer que les actions que l’on mène nous font vraiment avancer vers nos objectifs. Il y a actuellement tellement d’injonctions à utiliser certaines méthodologies, outils, canaux de communication ou de vente, que beaucoup d’indépendants se surchargent de travail. Il faut donc faire un tri, ne garder que l’essentiel dans son planning, si possible les choses les plus confortables, où l’on excelle.
Il faut s’assurer que les actions que l’on mène nous font vraiment avancer vers nos objectifs
EJG : Il est pourtant communément admis que sortir de sa zone de confort est stimulant…
L. D. : On confond souvent la zone de confort avec l’habitude. La nouveauté est dans la zone de confort de nombreuses personnes, à l’opposé de l’immobilisme. À l’inverse, la nouveauté est inconfortable pour d’autres, qui ont besoin de routine. Lorsqu’on sort de sa zone de confort par choix, le moment choisi doit être opportun. Les deux questions à se poser sont donc : à quel niveau se situe ma jauge de stress ? Et l’objectif poursuivi est-il vraiment important pour moi ? Et si on prend l’habitude d’exploiter sa zone de confort et qu’on garde un niveau de stress le plus bas possible, alors on peut se lancer un challenge, on pourra l’absorber.

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EJG : Quel est votre parcours et comment vous est venue l’idée de ce livre ?
L. D. : Après une dizaine d’années en tant que salariée dans le marketing et la vente dans le domaine de la communication et du digital, j’ai fait un burn-out en 2017. Je me suis lancée en freelance, mais en 2019, les signes de l’épuisement revenaient. J’ai alors pris la décision radicale de réduire toutes les sources de stress dans mon travail, ce qui m’a permis, contre toute attente, de voir mon activité décoller. Ça a été une révélation. En 2020, j’ai mis un terme sur cette manière d’entreprendre : le slowpreneuriat, qui consiste à exploiter sa zone de confort, en construisant un business à but humain et à moyen lucratif, et pas l’inverse. J’ai lancé Ma Slow Boîte, et aujourd’hui, j’ai trois piliers d’activité : l’accompagnement d’entrepreneurs et de salariés ; la formation pour transmettre mon métier ; j’ai aussi un rôle de porte-parole de ce mouvement, dont le livre fait partie.
EJG : À qui s’adresse-t-il ?
L. D. : Je considère ce livre comme un outil, principalement dédié aux indépendants et aux chefs d’entreprise. Les profils qui font appel à moi et que je prends en exemple sont des gens qui ont souvent vécu un burn-out. Ils me découvrent via les réseaux sociaux ou dans des podcasts, et ce discours les soulage. De manière générale, je travaille avec des gens dont les réalités de vie ne semblent pas idéales pour entreprendre : de jeunes parents, des personnes atteintes de maladies chroniques, des aidants familiaux… Des profils extrêmement nombreux à qui je propose une solution pour construire un business autour de leur réalité de vie. Ce n’est pas nécessairement un frein, c’est un paramètre qui devient un terrain créatif.