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Covid 19 : Vaccin obligatoire ou recommandé, quelles incidences ?

Des vaccins contre le virus COVID-19 seront prochainement disponibles. Le débat sur leur caractère obligatoire ou simplement recommandé est ouvert.

vaccins contre le virus COVID-19

Vaccins contre le COVID-19 © Shutterstock

Des vaccins contre le virus COVID-19 seront prochainement disponibles. Le débat sur leur caractère obligatoire ou simplement recommandé est ouvert.

L’ÉLABORATION DE LA POLITIQUE VACCINALE

En France, la politique de vaccination est élaborée par le ministère de la Santé qui fixe les conditions d’immunisation, énonce les recommandations nécessaires et rend public le calendrier des vaccinations après avis de la Haute Autorité de Santé (HAS). (article L.3111-1 du code de la santé publique). C’est en particulier la Commission technique des vaccinations (CTV) de la Haute Autorité de Santé (HAS) qui est chargée de proposer des recommandations concernant les vaccinations (article L.161-37 du CSS), les adaptations pour la mise à jour du calendrier vaccinal (article L.3111-1 du CSP) et les mentions minimales obligatoires des campagnes publicitaires portant sur des vaccins (articles L.5122-6 et L.5122-9 du CSP). Cette commission est composée de membres représentants des professionnels de santé, des sciences économiques, humaines et sociales, des représentants des usagers et des agences sanitaires.

LA DISTINCTION ENTRE VACCINATIONS OBLIGATOIRES ET VACCINATIONS RECOMMANDÉES

Les vaccinations obligatoires strictement encadrées Seul le législateur peut rendre une vaccination obligatoire. Il prend en compte le bénéfice pour la population concernée et la gravité de l’infection pour laquelle il existe un vaccin.

La vaccination a été rendue obligatoire dans plusieurs situations :

  • dans le cadre d’une activité professionnelle, exercée dans un établissement ou organisme, public ou privé, de prévention de soins ou d’hébergement de personnes âgées, et exposant à des risques de contamination (article L.3111-4 du CSP) ;
  • dans le cadre d’un cursus scolaire préparant à l’exercice des professions médicales et des autres professions de santé pour lequel une part des études a été effectuée dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention ou de soins (article 3111-4 du CSP) ;
  • au titre des vaccinations infantiles (article L.3111-2 du CSP) ;
  • pour certains territoires en raison de leur situation épidémiologique (article L.3111-6 du CSP).

Le refus de se soumettre ou de soumettre ceux sur lesquels on exerce l’autorité parentale ou dont on assure la tutelle, aux obligations de vaccination est puni de six mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende (article L.3116-4 du CSP). Le Conseil d’État, saisi d’une demande d’annulation du décret n° 2017-1076 du 24 mai 2017 (étendant de 3 à 11 le nombre de vaccins obligatoires pour les enfants), au motif que cette extension de la liste des vaccins obligatoires portait atteinte au droit à l’intégrité physique, reconnaît dans une décision du 6 mai 2019 n°415694 « qu’une vaccination obligatoire constitue une ingérence dans ce droit ».

Cependant, la juridiction suprême juge que les dispositions critiquées « ont apporté au droit au respect de la vie privée une restriction justifiée par l’objectif poursuivi d’amélioration de la couverture vaccinale pour, en particulier, atteindre le seuil nécessaire à une immunité de groupe au bénéfice de l’ensemble de la population, et proportionnée à ce but ».

Dans l’hypothèse où le ministre de la Santé souhaiterait après consultation de la commission technique des vaccinations rendre obligatoire la vaccination contre le virus Covid-19, il devrait définir la population visée par ces mesures (l’ensemble de la population, ou uniquement certaines catégories : personnes au-delà d’un certain âge, personnes vulnérables, catégories professionnelles…), le calendrier et les modalités de vaccination.

Me Pierre Ravaut et Me Jane Birot © Atelier Gallien

LES VACCINATIONS SIMPLEMENT RECOMMANDÉES

D’autres vaccins plus récents ont seulement été recommandés et non rendus obligatoires car les autorités sanitaires ont estimé que le recours à la vaccination n’en serait pas affecté. Pour faire face à des risques de santé publique, le ministère chargé de la santé peut être amené à prendre des mesures sanitaires temporaires en application de l’article L.3131-1 du CSP. C’est dans ce contexte que par arrêté du 4 novembre 2009, le ministre de la santé et des sports a lancé une campagne de vaccination contre le virus de la grippe A (H1N1). Dans le cadre de cette campagne, selon un calendrier arrêté par le Premier ministre et reposant sur le degré de priorité, l’assurance maladie a adressé à chaque citoyen un courrier l’invitant à se faire vacciner. Finalement, la couverture vaccinale réalisée dans le cadre de cette campagne a été d’à peine 8,5 % de la population totale. Le virus H1N1 s’est révélé être peu virulent et la catastrophe pressentie s’est transformée en une épidémie comparable à une grippe saisonnière.

Elle a confirmé une véritable défiance des Français à l’égard de la vaccination et a donné lieu à un rapport fait au nom de la Commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe A (H1N1).

L’épisode du virus H1N1 en 2009 a confirmé une véritable défiance des Français à l’égard de la vaccination

UN RÉGIME D’INDEMNISATION DIFFÉRENT SELON LA VACCINATION

L’indemnisation des effets indésirables d’une vaccination obligatoire :

Toute personne ayant subi un dommage suite à une vaccination obligatoire peut saisir soit le Tribunal compétent soit l’Office National d’Indemnisation des Accident Médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) d’une demande d’indemnisation. Dans cette hypothèse, l’Office se prononce (après l’organisation d’une mesure d’expertise s’il y a lieu), par une décision motivée :

  • sur le caractère obligatoire de la vaccination ;
  • le cas échéant, sur l’existence d’un lien de causalité entre le dommage subi par la victime et la vaccination à laquelle il est imputé.

Lorsque l’Office estime que le dommage est indemnisable au titre de l’article L. 3111-9 du CSP, il adresse à la victime, ou à ses ayants droit en cas de décès, dans un délai de 6 mois à compter de la réception d’un dossier complet, une offre d’indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis. La décision de l’Office formulant une offre d’indemnisation ou refusant de formuler une offre peut être contestée devant le Tribunal administratif territorialement compétent. Dans l’hypothèse où la vaccination contre le virus Covid-19 serait rendue obligatoire, les personnes victimes d’éventuels effets indésirables pourraient saisir l’ONIAM dans les mêmes conditions.

L’INDEMNISATION DES EFFETS INDÉSIRABLES D’UNE VACCINATION RECOMMANDÉE

Vaccinations réalisées en dehors du dispositif de mesures sanitaires d’urgence :

Les dommages imputables à des vaccinations qui ne sont pas obligatoires relèvent de la responsabilité de droit commun des acteurs de santé, notamment du régime de responsabilité des producteurs de produits de santé. (article 1245 et suivants du Code civil). Selon la date de la vaccination (postérieure au 4 septembre 2001) et la gravité du dommage, la victime peut saisir les commissions de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux d’une demande d’indemnisation amiable. La commission pourra diligenter une mesure d’expertise et émettra un avis sur les circonstances, les causes, la nature et l’étendue des dommages, ainsi que sur le régime d’indemnisation applicable. (article L.1142-8 du code de la santé publique). La victime peut également saisir la juridiction compétente contre le producteur du vaccin, le médecin prescripteur, le médecin vaccinateur et, le cas échéant, contre l’ONIAM. En l’absence de responsabilité d’un professionnel, d’un établissement, ou d’un producteur de produits, l’ONIAM est tenu d’indemniser les dommages résultant de vaccination non obligatoire si les conditions énumérées à l’article L.1142-1 II du CSP sont réunies.

Vaccinations réalisées dans le cadre du dispositif de mesures sanitaires d’urgence :

Le ministère chargé de la Santé peut être amené à prendre des mesures sanitaires temporaires en application de l’article L.3131-1 du CSP (modifié par les lois du 23 mars 2020 n° 2020-290 et du 11 mai 2020 n° 2020-546) comme c’est le cas actuellement dans le cadre de la pandémie de COVID 19. Ainsi, la campagne de vaccination contre le virus Covid-19, sans rendre la vaccination obligatoire, peut s’inscrire, comme cela a été le cas lors de l’épidémie de la grippe A (H1N1) dans le cadre de ses mesures sanitaires d’urgence. Dans cette hypothèse, si une personne s’estime victime de dommages en lien avec la vaccination, elle peut saisir la juridiction compétente contre le producteur du vaccin, le médecin prescripteur, le médecin vaccinateur et/ou l’ONIAM. Elle peut également directement saisir l’ONIAM d’une demande d’indemnisation, qui, s’il l’estime utile diligente une mesure d’expertise. Si l’ONIAM estime que le dommage est indemnisable en application des dispositions de l’article L.3131-4 du CSP, il adresse une offre d’indemnisation à la victime. L’ONIAM a 6 mois pour se prononcer à compter de sa saisine.

En conclusion, quelle que soit l’option choisie par le législateur, les éventuels dommages subis suite à une vaccination obligatoire ou recommandée dans le cadre de mesures sanitaires d’urgence contre le virus COVID 19, sont indemnisables au moyen d’une procédure simple, rapide et gratuite. L’État, dans le cadre de sa politique de santé publique, assume ainsi le risque lié à la vaccination.

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