Échos Judiciaires Girondins : Quelles conséquences la pandémie a-t-elle eu sur la fréquentation touristique à Saint-Émilion ?
Bernard Lauret : « Si l’on regarde les chiffres, nous accueillions jusqu’en 2019 un à un million et demi de touristes par an, entre Pâques et la Toussaint, avec des pics en juillet-août. En 2019, nous avons reçu la visite de plus de 2 500 bus. En 2020, seulement 108. Les horodateurs ont rapporté 660 000 euros en 2019 et en 2020, 280 000 euros. La taxe de séjour, qui était de 250 euros en 2019, est tombée à 140 euros l’année suivante. Nous avons un ensemble d’indicateurs qui montrent que la ville a subi plus de 50 % de perte avec la crise sanitaire. Jusqu’ici, les visiteurs arrivaient le matin et repartaient le soir, c’était un tourisme de masse, principalement à la journée. Ce modèle a été remis en cause par la crise, et puis les gens ont envie d’autre chose. Ce qu’on souhaiterait développer maintenant, c’est donc un tourisme de séjour. Nous voulons essayer de capter un tourisme familial, d’amateurs de vins et de patrimoine. »
Échos Judiciaires Girondins : C’est ce que viennent chercher les touristes à Saint-Émilion : du vin et du patrimoine ?
Bernard Lauret : « Nous avons la particularité, par rapport aux autres grandes appellations comme Margaux, Pauillac, Sauternes, Saint-Estèphe ou Pomerol, qui ne sont que des villes-appellations, d’avoir du patrimoine et du patrimoine bâti. Saint-Émilion est une cité médiévale qui a beaucoup souffert au fil des guerres de religion et de la Révolution, mais nous avons encore une quinzaine de monuments classés ou inscrits. Et surtout la plus grande église d’Europe creusée dans le rocher : la Monolithe de Saint-Émilion, avec ses catacombes (voir encadré). Il y a du bâti religieux, comme l’ancien Couvent des Cordeliers, qui appartenait à la commune et a été restauré par un investisseur, qui a refait le cloître et la toiture des bâtiments conventuels et de la chapelle. Nous faisons revivre les ruines avec des matériaux contemporains, nous devons entretenir ce patrimoine, le rénover. C’est un puits sans fond ! Mais notre volonté est de transmettre en bon état aux générations futures ce que les anciens nous ont transmis. Et puis il y a également le tourisme viticole. La notoriété du vin de Saint-Émilion n’est plus à faire : il est mondialement connu. J’ai eu la chance de voyager en Chine, au Japon, aux États-Unis… Dans le monde entier, tout le monde connaît Saint-Émilion. »
Échos Judiciaires Girondins : Quels sont vos leviers pour passer d’un tourisme de masse à la journée à un tourisme de séjour ?
Bernard Lauret : « Nous avons un peu plus de 300 lieux d’hébergement sur les 22 communes de la communauté de communes du Grand Saint-Émilionnais. Les propriétés s’ouvrent pour accueillir du public dans le cadre de l’œnotourisme. On essaye de faire comprendre aux gens qu’il n’y a pas que les monuments, qu’il y a aussi un paysage, des points de vue, des coins magnifiques à voir. On veut diffuser l’idée que le séjour de deux ou trois jours peut se faire au milieu des terres saint-émilionnaises. »

© Ville St-Émilion
Échos Judiciaires Girondins : Vous favorisez donc l’ouverture de lieux d’hébergement, de restaurants… ?
Bernard Lauret : « Nous avons la chance, à Saint-Émilion, d’avoir déjà trois restaurants étoilés : La Table de Pavie (deux macarons Michelin), Les Belles Perdrix (un macaron) et Le Logis de la Cadène (un macaron), ainsi que plusieurs restaurants gastronomiques. D’autre part, à la demande des viticulteurs et en accord avec la Chambre d’Agriculture, nous sommes en train de réviser les documents d ’urbanisme à la Communauté de communes afin de donner la possibilité, dans les bâtiments agricoles, de lancer une activité qui mette en valeur son produit dans le cadre de l’œnotourisme. Les exploitations peuvent donc créer des restaurants, des hôtels… Nous en avons déjà plusieurs sur le territoire comme par exemple le château La Dominique avec La Terrasse rouge ou T…