Échos Judiciaires Girondins : Quand l’IHU Liryc a-t-il été créé et dans quel but ?
Pierre Jaïs : « J’ai commencé à travailler avec son fondateur le Pr Michel Haïssaguerre en 1992, et nous avons créé l’IHU Liryc avec le Dr Mélèze Hocini en 2012. Issues du Programme d’investissements d’avenir (PIA), les IHU sont des structures complètement nouvelles dans le paysage de la recherche en France, et même dans le monde. Elles réunissent des compétences pluridisciplinaires, sous la direction de médecins, et des plateformes technologiques de très haut niveau, le tout au service d’une cause médicale. Le but est d’avoir un impact sur les soins aux patients, c’est ce qui est complètement nouveau. En réunissant sous le même toit des mathématiciens, des spécialistes de l’électrophysiologie cellulaire, de l’imagerie, du métabolisme, de l’histologie, de la biologie moléculaire… Nous avons levé un des verrous majeurs de la recherche, qui est le fractionnement et les silos. C’est à mon avis la force des IHU : tout cela crée des opportunités extraordinaires. »
Nous avons fait une découverte qui a complètement bouleversé la prise en charge de la fibrillation atriale dont 500 000 personnes bénéficient chaque année dans le monde
EJG : Sur quels sujets les équipes de l’IHU Liryc travaillent-elles précisément ?
© D. R.
Pierre Jaïs : « Le but premier de l’IHU est de soigner les maladies du rythme cardiaque, dont essentiellement trois pathologies. La première, la fibrillation atriale, est un emballement du rythme qui correspond à l’arythmie la plus fréquente dans le monde. Elle concerne 1 % à 2 % de la population générale et peut avoir des conséquences délétères comme une augmentation du risque d’insuffisance cardiaque, un risque de développer la maladie d’Alzheimer multiplié par deux, elle est également à l’origine de 20 % des AVC. Nous avons fait une découverte qui a complètement bouleversé la prise en charge de cette arythmie, en identifiant la zone du cœur où elle commence. Nous avons construit un traitement non médicamenteux, dont 500 000 personnes bénéficient chaque année dans le monde.
Deuxième pathologie : les arythmies ventriculaires, qui sont à l’origine de la mort subite. Dans ce cas, une tornade électrique fait monter les battements d’une soixantaine à plusieurs centaines de coups par minute. Le cœur ne pouvant plus se contracter à cette vitesse-là, le cerveau meurt dans les trois minutes. C’est un thème majeur selon nous, puisqu’elle concerne 50 000 personnes en France chaque année. Là aussi, notre équipe a identifié le point de départ de certaines de ces arythmies ventriculaires, et nous avons développé plusieurs traitements totalement nouveaux. Enfin, troisième thème majeur : les insuffisances cardiaques. Le cœur est une pompe qui se contracte pour expulser le sang dans tout notre corps. C’est une étincelle électrique qui déclenche cette contraction, et de la qualité de cette étincelle et de sa propagation homogène dépend l’efficacité de la contraction, tout dérèglement pouvant provoquer une insuffisance cardiaque d’origine électrique. Nous avons de nombreux programmes de recherche sur ce thème, et l’un des membres de notre équipe a énormément contribué au traitement avec des stimulateurs (pacemakers) capables de resynchroniser la contraction en resynchronisant l’activation électrique qui la précède. »
50 centres dans le monde utilisent la technologie InHeart, qui a contribué à ce jour à traiter plus de 3 000 patients
EJG : Quelles sont les grandes missions de l’IHU ?
Pierre Jaïs : « L’IHU a quatre missions : la recherche, le soin, l’innovation et l’ensei…