Après avoir connu une période de désuétude, la vente en viager revient aujourd’hui sur le devant de la scène dans le paysage immobilier. Face à l’inflation persistante, à la baisse du pouvoir d’achat, aux montants modérés des retraites qui peinent à suivre le coût de la vie et à l’augmentation des taux d’intérêt des prêts, ce mécanisme retrouve tout son intérêt. Souvent méconnu, le viager permet d’allier maintien dans son cadre de vie et revenus complémentaires. Cet article propose d’en découvrir les principes, les avantages et les précautions nécessaires.
Les acteurs de la vente en viager
La vente en viager repose sur deux protagonistes :
– le « crédirentier », c’est-à-dire le vendeur, qui reçoit en contrepartie de la vente de sa maison un capital initial (appelé bouquet) et une rente versée mensuellement jusqu’à son décès et, le cas échéant, jusqu’à celui de son conjoint ;
– le « débirentier », c’est-à-dire l’acquéreur, qui s’engage à verser, outre le bouquet, une rente viagère et deviendra plein propriétaire du bien au décès du crédirentier.
Un dispositif remis au goût du jour
Après avoir quasiment disparu de la pratique en raison, notamment, de la facilité d’accès au crédit bancaire, le viager retrouve une actualité forte. La hausse du coût de la vie et la stagnation des retraites conduisent de nombreux retraités, mais aussi certains actifs, à rechercher des revenus complémentaires. Le viager répond à cette attente en permettant de valoriser son patrimoine immobilier tout en conservant le droit de continuer à y vivre.
Le viager permet de valoriser son patrimoine immobilier tout en conservant le droit de continuer à y vivre.
Comment fonctionne le viager ?
Dans le cadre le plus fréquent d’une vente en viager occupé, le vendeur conserve un droit d’usage et d’habitation, voire un usufruit, sur son bien immobilier. Il perçoit un bouquet versé lors de la signature ainsi qu’une rente mensuelle, généralement indexée annuellement sur l’indice Insee des prix à la consommation des ménages. Cette indexation garantit au vendeur que le montant de sa rente évoluera en tenant compte de l’inflation.
Les avantages pour le crédirentier
Grâce aux rentes, le crédirentier bénéficie d’une source de revenus complémentaires sans quitter son logement. Il est par ailleurs déchargé de nombreuses obligations financières : la taxe foncière est généralement mise à la charge du débirentier, de même que les gros travaux (toiture, ravalement, remplacement de menuiseries, certains travaux lourds en copropriété…). Le vendeur ne conserve que les charges d’entretien courant, généralement par référence au décret n° 87-712 du 26 août 1987 relatif aux charges locatives. Néanmoins, la liberté est grande à ce sujet et il est possible de rédiger un contrat sur mesure quant à la répartition des charges et travaux.
Si le vendeur se retrouve dans l’obligation de quitter son logement, par exemple pour entrer en maison médicalisée, il est généralement stipulé dans l’acte de vente une clause prévoyant l’augmentation de la rente d’environ 20 à 30 % de son montant.
Les rentes viagères sont soumises à l’impôt sur le revenu mais sont en partie défiscalisées selon les situations.
Les avantages pour le débirentier
Pour l’acquéreur, le viager permet d’acquérir un bien immobilier à un coût réduit en raison du différé de jouissance bénéficiant au vendeur. En effet le prix global, composé du bouquet et des rentes mensuelles, est déterminé après déduction de la valeur du droit d’usage et d’habitation, ce droit n’étant pas compris dans la vente puisque conservé par le vendeur. Les droits fiscaux de mutation et les émoluments du notaire suivent cette logique et sont donc calculés sur une base réduite. Au décès du crédirentier, l’acquéreur devient plein propriétaire sans verser de supplément de prix ni de taxe. Il peut alors disposer du bien ou en jouir comme il l’entend.
Les précautions à prendre
Il est important pour le crédirentier de s’assurer de la solidité financière et de la solvabilité de son acquéreur puisqu’il ne faut pas éluder le risque de non-paiement des rentes. Pour sécuriser le vendeur, le notaire inscrira sur le bien vendu une hypothèque à son profit, lui garantissant la possibilité de recouvrer la propriété de son bien de façon privilégiée. Il sera également inséré au contrat une condition résolutoire de la vente en cas de défaut de paiement des rentes.
Si le débirentier décède avant le crédirentier, ses héritiers seront tenus au paiement des rentes. Il est donc recommandé, dans l’intérêt des deux parties, que l’acquéreur souscrive une assurance décès, comme dans le cadre d’un prêt immobilier.
En outre, la validité d’une vente en viager repose sur l’existence d’un aléa réel : le vendeur ne doit pas souffrir d’une maladie connue ou déclarée impactant son espérance de vie au moment de la conclusion du contrat. De même, le prix doit être sincère et équilibré : par exemple proposer une rente trop faible en viager libre par rapport à la valeur locative du bien ou encore permettre une vente à vil prix ou à un prix fictif au profit d’un héritier éloigné dans l’intention d’éluder les droits de succession remettrait nécessairement en cause la validité de l’opération.
Le prix doit être sincère et équilibré
Bien encadré par le notaire et réfléchi en amont, le viager s’impose aujourd’hui comme une solution moderne et humaine, basée sur une confiance et considération réciproques, pour répondre aux défis économiques et sociaux de notre époque. D’un côté, le vendeur assure son avenir financier et conserve son cadre de vie, de l’autre, l’acquéreur se constitue sur le long terme un patrimoine immobilier dans des conditions avantageuses.