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Abatilles : De source girondine

Arcachon - La source des Abatilles aura bientôt 100 ans. Après avoir appartenu à Vittel et Nestlé, ses propriétaires depuis 10 ans, Hervé Maudet associé à Jean Merlaut, l’ont considérablement transformée en tablant sur la communication, les partenariats et la modernisation de l’outil industriel. Avec la réussite à la clé : 50 millions de bouteilles sortent chaque année du site arcachonnais et l'entreprise a atteint 16 millions d'euros de chiffre d'affaires.

hervé maudet, abatilles

Hervé Maudet, directeur général de la Source des Abatilles ©Louis Piquemil - Echos Judiciaires Girondins

Le petit kiosque dessiné sur les bouteilles d’Abatilles existe toujours. La fontaine, où venaient s’abreuver les curistes au début XXe siècle, est ceinte d’un joli bâtiment art déco avec des vitraux orange et bleu. Il jouxte les bureaux, bel édifice dans le pur esprit arcachonnais et l’usine de production de 900 m2. Bienvenue à la Source des Abatilles, abritée par des pins parasols, dans les beaux quartiers d’Arcachon. À sa tête depuis 10 ans, Hervé Maudet, associé à Jean Merlaut, deux hommes également investis dans le négoce du vin qui ont su apporter de nouveaux codes. Une belle réussite pour cette entreprise girondine qui fêtera bientôt ses 100 ans.

Des clients nommés Faure, Arthur Martin ou Brandt

Les premiers clients d’Hervé Maudet, lorsqu’il a lancé son activité de négoce, s’appelaient Faure, Arthur Martin ou Brandt ! Normal, ce Girondin avait commencé sa carrière dans l’électroménager. Mais en 1999, il décide de créer sa maison de négoce M.Vins, qu’il continue de diriger en parallèle des Abatilles. « À l’époque, il y avait de grosses opérations qui correspondaient à plusieurs milliers de bouteilles pour l’animation des réseaux. C’était de gros marchés. J’ai continué à développer M.Vins mais au bout d’un moment, j’avais beaucoup plus de clients que de stock ! » Pour rééquilibrer, il sollicite le négociant girondin Jean Merlaut en 2007 pour approvisionner ses stocks.

Abatilles, une histoire centenaire

La source des Abatilles a été découverte en 1923 lors un forage destiné à extraire du pétrole. L’or noir est devenu transparent ! Mais sur l’étiquette c’est 1925 qui est marqué, date des premières bouteilles. Entre 1925 et 1930, la Société Thermale des Abatilles est constituée avec une chaîne d’embouteillage, un établissement thermal, un restaurant, un kiosque et un parc paysager. En 1961, le site est racheté par Vittel, puis en 1991 par Nestlé. En 2008, la source est reprise par deux investisseurs Messieurs Bertrand et Padois qui la revendent en 2013 à Jean Merlaut et Hervé Maudet. « On va essayer de fêter dignement nos 100 ans », s’amuse ce dernier.

Quelle bonne idée !

Très vite, celui-ci lui propose une association : « Il me dit toujours qu’il a été bien plus visionnaire que moi », s’amuse Hervé Maudet qui n’accepte que 8 jours plus tard. « Tout le monde m’a dit que j’étais fou de réfléchir. Pour moi, c’était avant tout une rencontre humaine. » L’association se passe si bien qu’ils décident de lancer un autre projet. Au hasard d’un déjeuner à Arcachon, fin 2012, Hervé Maudet se retrouve assis à table à côté de Roger Padois, PDG de la Source. Sur un coup de tête, les deux hommes vont visiter le site. Les Abatilles sont à vendre : « Je ne sais pas pourquoi j’ai su que c’était pour nous, j’ai appelé Jean Merlaut en sortant pour le lui dire, il m’a répondu : « C’est génial. Quelle bonne idée ! » ».

Opération CHR

Mais le site est économiquement faible : l’entreprise comptait 20 salariés (contre 53 aujourd’hui) et l’outil industriel était vétuste. « On n’avait pas de compétence dans l’eau mais on connaissait les lignes d’embouteillage dans le vin. » Et surtout, Hervé Maudet compte un gros réseau en CHR (Cafés, hôtels et restaurants) et décide d’emblée de développer cette partie. Qui n’est pas gagnée pour autant : « Plusieurs personnes nous ont dit qu’on ne serait pas rentable ». Ils décident d’emblée de trouver un positionnement et de développer la communication : « Dans l’eau, c’est primordial », remarque-t-il. Ils investissent la partie design, accompagnés de l’agence Hello, à l’époque dirigée par son épouse et qui assure toujours toute la communication. « On a utilisé les codes du vin avec une étiquette épurée et une contre-étiquette plus technique », souligne Hervé Maudet.

On a utilisé les codes du vin avec une étiquette épurée et une contre-étiquette plus technique »

Girondins, UBB…

« Au démarrage, on l’a vraiment joué local avec un développement clair : monter des partenariats avec des acteurs locaux dans deux secteurs d’activité principaux : le sport et la gastronomie », annonce Hervé Maudet. Ils deviennent partenaires de plusieurs clubs sportifs et événements liés à la gastronomie et au vin : Girondins, UBB, boxeurs, Burdis (volley), hand et ils sont présents sur les salons officiels comme Vinexpo, Exp’Hôtel, ainsi que des expositions parisiennes de dégustation des vins (ils sont partenaires du CIVB). « On a construit notre image comme ça », se satisfait-il.

La Bordelaise

Le gros investissement concerne la partie industrielle : l’embouteillage, les préformes. Les futures bouteilles plastiques arrivent sous forme d’éprouvette, elles sont ensuite soufflées, puis remplies et conditionnées : « On a 2 lignes de production : une « l’eau tous les jours » par packs de 6 x 1,5 l qu’on trouve en grande distribution qui représente un volume important de 20 000 bouteilles/heure et une ligne qui fait les formats La Bordelaise, en plate ou en pétillante, verre ou plastique, qui représente 8 à 10 000 bouteilles/heure. La Bordelaise, la jolie bouteille en forme de bouteille de vin qui est devenue leur signature : « Elle est très différenciante ». »

Trois-huit

L’équipe de 53 personnes est structurée comme « une entreprise classique » : 4 équipes de production de 5 personnes qui assurent les trois-huit (la chaîne de production tourne en continu), une équipe de maintenance de 4, une équipe d’encadrement technique, le service qualité, la logistique, les services support, puis 3 commerciaux en grande distribution (seulement régionale, comptant la Nouvelle-Aquitaine et Toulouse) et 8 commerciaux pour les CHR (comprenant la côte atlantique, le Pays basque, Bordeaux, La Rochelle, Nantes et Paris.)

Référence locale

Tous ces investissements ont été payants ! Aujourd’hui, l’eau des Abatilles est très présente sur les tables des restaurants en Gironde, Landes, Pays basque, La Rochelle et Toulouse (où ils sont partenaires du Stade toulousain et du TFC) : « Humblement, c’est devenu une référence locale », reconnaît Hervé Maudet, « pour les consommateurs et les restaurateurs ». Mais la marque continue de faire son trou et se développe maintenant à Paris. Pour ces marchés-là, ils ont tablé sur la Bordelaise en verre : « Sauf à Bordeaux, on l’accepte en plastique parce qu’elle est jolie et que c’est du local. »

C’est devenu une référence locale pour les consommateurs et les restaurateurs »

L’eau de saison

Aujourd’hui ils produisent environ 50 millions de bouteilles par an (dont 5 millions de bouteilles en verre) : « Mais il y a un élément qu’on ne maîtrise pas, c’est la température », explique Hervé Maudet. Car la consommation d’eau est très liée à la saisonnalité : « Entre les mois d’été et d’hiver, on est à un rapport de 1 à 2,5 ! ». L’eau provient d’une nappe phréatique très profonde à 472 mètres de profondeur, protégée par d’autres nappes au-dessus et donc non soumise aux épisodes de sécheresse. L’eau est analysée chaque jour par le contrôle qualité doté sur place d’un laboratoire d’analyse en microbiologie et deux fois par mois par l’ARS.

Plastique recyclé

Toutes les matières premières utilisées (bouteilles en verre et préformes) sont françaises et les étiquettes sont fabriquées en Charente. L’équipe a aussi développé une bouteille en plastique recyclé. Lancée il y a 2 ans, elle commence à bien fonctionner selon son directeur qui ajoute : « Toutes nos bouteilles sont recyclables à 100 %. Et celle-ci est en matière recyclée à 100 % ». Une orientation importante car le plastique garde son intérêt : « En termes de bilan carbone, quand un camion arrive avec les préformes en plastique, il en a 700 000, quand c’est du verre, on est à 20 000. » Ils ont aussi rajouté les bouchons solidaires sur les bouteilles et investi dans la réduction des déchets. Le site a ainsi atteint sa vitesse de croisière et s’impose comme une référence girondine reconnue.

Les Abatilles en chiffres

53 salariés
2 marques : Les Abatilles et La Source des Pins (vendue à 90 % par Monoprix, issue d’un forage voisin et produite sur le site)
50 millions de bouteilles par an
Dont 5 millions de bouteilles en verre
Chiffre d’affaires : 16 millions d’euros
900 m2 d’usine
2 chaînes de production