Il est presque toujours demandé aux emprunteurs de souscrire une assurance pour l’obtention d’un crédit immobilier. Cette assurance vient couvrir, totalement ou partiellement, les risques de décès, invalidité absolue et définitive, et d’incapacité de travail de l’emprunteur.
I – Le coût de l’assurance décès-invalidité
Ce coût correspond aux primes qui sont ajoutées aux échéances du prêt. Il est une composante du taux annuel effectif global (TAEG) du financement et peut varier en fonction de la politique de la banque mais surtout de l’âge, de l’état de santé des emprunteurs et du risque couvert. La baisse des taux des crédits immobiliers de ces dernières années a eu pour effet d’accroître le poids de l’assurance de groupe dans le coût total du crédit, ce qui est surtout visible pour une certaine catégorie d’emprunteurs (plus âgés, fumeurs, avec des difficultés de santé, etc.). Pour diminuer ce coût, il est conseillé de demander à la banque la souscription d’un contrat individuel auprès d’un courtier ou d’un assureur indépendant : on parle alors de délégation d’assurance emprunteur.
La loi Lagarde (du 1er juillet 2010) impose aux banquiers de respecter le choix du client qui préfère souscrire un contrat d’assurance autre que celui proposé par la banque mais présentant des garanties équivalentes. Malheureusement, cette loi n’a pas eu l’effet escompté car de nombreuses banques refusaient les délégations d’assurance pour des motifs non justifiés.
Pour contrer cette situation, la Loi Hamon (loi n° 2014-344 du 17 mars 2014) a permis de changer après coup (et sans frais), dans les 12 premiers mois qui suivent la signature du contrat de prêt de respecter un formalisme (lettre recommandée adressée à la Banque au moins 15 jours avant la fin de la date échéance des 12 mois). En cas de refus, la banque doit présenter un motif qui, pour être recevable, porte sur les critères d’équivalence des garanties. En effet, pour refuser une délégation d’assurance, les banques doivent désormais se baser sur la grille du Comité Consultatif du Secteur Financier (CCSF) qui a été établie pour uniformiser la comparaison des contrats d’assurance des emprunteurs.
II – Le bénéficiaire de l’assurance décès-invalidité
A) Dans l’hypothèse de la souscription du contrat d’assurance groupe « proposé » par la Banque
Techniquement, si le client souscrit à l’assurance groupe qui est présentée par le banquier, le bénéficiaire de l’assurance sera la banque.
1re hypothèse :
Chacun s’assure simplement pour la quote-part de prêt qu’il doit rembourser (par exemple 50 % en cas d’achat par moitié). Les héritiers de l’emprunteur n’auront pas à continuer à rembourser la quote-part qu’il assure (l’assurance soldera cette quote-part à sa place) mais le
coacquéreur devra continuer à payer sa part de remboursement de crédit puisque l’autre fraction, celle qui lui incombe, n’est pas assurée.
En effet la Cour de Cassation (Civ. 1er, 12 Mars 2002 – n° 00-21271) considère que, sauf convention contraire, l’assurance vient payer la quote-part de l’assuré qui décède, et seulement cette part. Cette solution est souvent la meilleure, surtout si les clients laissent des enfants mineurs qui auraient une grande difficulté pour payer une quote-part de l’emprunt. Le décès de l’assuré, qui constitue la réalisation du risque couvert, entraîne l’extinction de sa dette envers l’établissement de crédit et décharge les héritiers du poids définitif de celle-ci.
2e hypothèse :
Chacun des membres du couple s’assure pour 100 % du crédit. Si un des emprunteurs décède, la totalité du crédit est alors prise en charge par l’assurance : les héritiers et le coacquéreur sont complétement libérés de la dette. Le conseil du notaire est que chaque assuré écrive que l’autre ne devra rien à la succession, parce que la souscription du contrat (garantissant pour chacun 100 % de l’emprunt et donc tant sa part que la part de l’autre acquéreur) est un acte de prévoyance.
La cour de Cassation (Cass Civ. 1re, 28 mars 2018 n° 17-18.127) a précisé que le jeu de l’assurance invalidité, souscrite par un seul des concubins pour le remboursement du prêt destiné à financer l’acquisition d’un immeuble indivis, ne donne pas lieu à indemnité au profit de celui-ci. L’extinction de la dette profite donc au survivant, sans qu’il n’ait à s’acquitter de sa part contributive. Dans tous les cas, la question du bénéfice de l’assurance décès, même s’il s’agit de l’assurance groupe de la banque, doit être abordée avec le notaire, dans l’idéal au moment de l’acquisition, sinon dans un testament.
B) L’intérêt fiscal de la souscription d’un contrat d’assurance individuel de préférence au contrat groupe de la Banque
Il s’agit ici de conseiller au client, pour une raison d’économie, de souscrire auprès d’une assurance externe à la banque (en se faisant au besoin assister par un courtier) un contrat d’assurance individuel garantissant le capital restant dû au prêteur en cas de décès-invalidité. Le bénéficiaire dans ce cas n’est pas directement le banquier mais la personne que l’acquéreur choisit, à charge pour ces bénéficiaires de payer la banque.
Concrètement, si le bénéficiaire du contrat est la banque, le prêt se trouve remboursé du fait du décès de l’acquéreur et ses héritiers n’ont plus aucun passif à déduire. Tandis que si les bénéficiaires de l’assurance sont directement les héritiers de l’acquéreur, ils bénéficient d’une somme d’argent qui ne subit aucun impôt d’une part (effet de l’assurance) et doivent payer le prêt restant dû d’autre part, ce qui laisse subsister un passif à déduire dans la succession de l’assuré.
De même, l’intérêt de cette délégation d’assurance prend son sens pour éviter une lourde fiscalité lorsque l’emprunteur est une société. En effet si le bénéficiaire est le banquier, les capitaux versés par l’assureur viennent annuler la dette de la société et constituent donc mécaniquement un résultat comptable exceptionnel pour cette société.