Couverture du journal du 22/03/2024 Le nouveau magazine

[ Gironde, terre d’édition ] Monsieur Toussaint Louverture, Le méta-éditeur

Gironde - La maison d’édition Monsieur Toussaint Louverture créée par Dominique Bordes en 2004 à Cenon est devenue grande. La méthode de travail de cet éditeur visionnaire ne laisse rien au hasard. Elle repose sur l’idée que « le livre n’est pas qu’une chose physique ou littéraire ».

Monsieur Toussaint Louverture, Dominique Bordes

Dominique Bordes, le fondateur de Monsieur Toussaint Louverture © DR

Je veux que chacun des livres que je publie soit un pas vers plus de civilisation. » Les aspirations de Dominique Bordes, le fondateur de Monsieur Tous- saint Louverture, sont grandes. Tout comme le travail et l’énergie que l’homme déploie pour ses publications. Créée en 2004 sous la forme d’une revue littéraire, la maison d’édition indépendante tient aujourd’hui la première place en Nouvelle-Aquitaine. Pas par le nombre de salariés qu’elle emploie, au nombre de 3, secondés par 4 freelances (un éditeur et 3 attachés de promotion) et 4 traducteurs à l’année, ainsi que son partenaire diffuseur-distributeur Harmonia Mundi. Ni par le nombre de livres qu’elle publie, entre 6 et 8 par an. Mais par sa singularité et les succès accumulés, tels que Blackwater, une série de 6 livres de Michael McDowell écoulée à 800 000 exemplaires, ou le roman graphique Moi ce que j’aime c’est les monstres d’Emil Ferris dont 100 000 exemplaires ont été vendus. « Je me préoccupe avant tout de qualité et d’exceptionnalité », affirme Dominique Bordes, qui publie principalement de la littérature, qu’elle soit blanche ou de genre, de la BD et des livres jeunesse, avec beaucoup d’inédits étrangers. « Le fil rouge, c’est la solidité littéraire et l’intemporalité. Les petites briques qui fabriquent une culture européenne et mondiale de la pensée et de la langue », expose l’éditeur.

CRÉER DU DÉSIR

Privilégiant « un modèle qualitatif », Dominique Bordes passe plusieurs années sur chaque projet, auquel il consacre « un travail profond et non reproductible ». Derrière sa méthode, « il y a des gens, une vraie passation humaine », aime- t-il rappeler. « En amont, il y a tout un travail de conviction. J’envisage tout le process, toutes les difficultés à lever », commence-t-il. Ensuite débute « le cœur de notre travail » : l’édition, qui regroupe la traduction et l’édition du texte, « dont chaque phrase est pesée, repensée, travaillée dans le plus pur respect de l’auteur ». Mais aussi le dessin de la maquette, la conception de la couverture… « Nous interrogeons la forme du livre, tout en essayant d’être séduisant », confie l’éditeur. Le prix est lui aussi mûrement réfléchi, tout comme le positionnement du livre en rayon. « C’est essentiel. L’un des rôles de l’éditeur est de fabriquer le lecteur du livre. Il s’agit d’un travail très spécifique de création de désir, de définition de ce qu’est le livre », estime-t-il.

L’un des rôles de l’éditeur est de fabriquer le lecteur du livre.

ÉTENDRE L’UNIVERS DU LIVRE

Ce travail, Dominique Bordes et ses équipes le font à travers l’écriture de longs argumentaires. « Pour qu’un livre existe, il faut savoir en parler. Nous créons donc des contenus sur les personnages, l’histoire, l’auteur, la logique littéraire dans laquelle le livre s’inscrit, les films ou séries dont l’univers se rapproche… », énumère-t-il. Destinés à ses représentants auprès des libraires et de la presse, ils servent également « à étendre l’univers du livre ». Un journal de nouvelles façon XIXe siècle accompagnait ainsi le premier tome d’Anne de Green Gables et des cartes postales anciennes signées des personnages complétaient la série des Blackwater.

La série Blackwater, vendue à 800 000 exemplaires. © DR

RADIOACTIVITÉ

Pour Dominique Bordes, « un livre n’est pas qu’une chose physique ou littéraire : c’est une économie, une façon de penser, de parler, un environnement, une fiche Wikipédia, un site internet, des tweets, de la répétition, des avis… Quand on a tout fait, quand on a inventé mille choses pour donner envie de le lire et que le livre est solide, en général, cela fonctionne ». Son approche, il la résume ainsi : « Notre rôle est de contaminer les autres avec une certaine vision des choses, pour qu’ ils contaminent eux-mêmes les autres par radioactivité ». L’éditeur, qui se fixe pour chaque publication un point d’équilibre à un niveau de ventes très élevé, assure l’atteindre « assez régulièrement ». Il s’attache ensuite à faire vivre le plus long- temps possible ses titres, « les nouveaux comme les anciens », qu’il ne republie pas en poche mais dans ses différentes collections : « Les Grands Animaux », qui réunit « des classiques contemporains », et « Monsieur Toussaint Laventure », sa collection jeunesse. La Maison dans laquelle de Mariam Petrosyan y sera bientôt publiée dans sa troisième version. Avant deux prochaines sorties d’inédits, prévues en mai 2023 et janvier 2024.

1re parution : « Brûlons tous ces punks pour l’amour des elfes, de Julien Campredon. »

Votre best-seller : « Blackwater, de Michael McDowell, l’exemple-type de ma méthode de travail. »

Votre coup de cœur : « Quelques fois j’ai comme une grande idée, de Ken Kesey, mon coup de cœur total, le plus grand chef d’œuvre que j’ai publié et que je publierai jamais. »

Prochain à paraître : « Swan Song, de Robert McCammon qui sortira en mai, un roman d’aventures post- apocalyptique très grand public. »

L’œuvre que vous auriez aimé éditer : « Le Seigneur des porcheries, de Tristan Egolf, on ne peut pas tout avoir… mais on peut essayer ! »

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