Echos Judiciaires Girondins : Le top 14 fait sa rentrée ce week-end avec une affiche puissante : l’UBB reçoit le Stade Toulousain. Comment vous sentez-vous à quelques heures de la reprise ?
Laurent Marti : « Ce qu’il y a de fabuleux avec ce championnat, c’est qu’après une 12e année en Top 14, on a l’impression de redémarrer à chaque fois une nouvelle aventure. On ne se lasse de rien, quand c’est fini, on est tous sur les rotules mais quand cela redémarre, on est assez euphorique et excité de recommencer le jeu. En revanche, quand vous démarrez par la réception de Toulouse, vous vous mettez une pression énorme parce qu’on sait que le Stade Toulousain a pu reposer ses internationaux et que n’ayant rien gagné l’année dernière, cela leur donne un supplément d’âme et de motivation. Déjà qu’ils n’en ont pas besoin ! On s’attend donc à un match plus dur que celui de la saison dernière où nous les avions battus à Chaban. Mais c’est aussi très excitant car Chaban-Delmas sera plein et parce que ça reste le Stade Toulousain.
En plus, nous avons souhaité inviter 1 000 pompiers pour les remercier de leur incroyable travail durant l’été. C’est une action qui s’est faite naturellement, en accord avec le CIVB (Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux), qui leur offrira des bouteilles. »
EJG : Pour cette nouvelle saison, l’UBB comptera combien de partenaires ?
M. : La bonne nouvelle c’est que nous avons 130 nouveaux partenaires ! Nous allons ainsi dépasser un total de 800 partenaires et nous allons encore en signer durant la saison. Nous en avons perdu quelques-uns, comme chaque année en raison souvent de problèmes économiques. Il faut noter aussi que l’UBB enregistre 1 500 abonnés particuliers supplémentaires et que nous dépassons ainsi le nombre de 10 000 abonnés alors que nous avions atteint ce chiffre l’an passé en milieu de saison, après avoir lancé une campagne d’abonnement de mi-saison. Ces deux chiffres déterminants nous prouvent que l’UBB s’installe, progresse et que nous occupons une place importante dans la métropole. Cela nous réjouit car on sait qu’il faut asseoir ce club. »
EJG : L’asseoir économiquement ?
M. : « Tout le monde sait que je finance le club régulièrement, avec des années où ça se passe mieux mais où on en profite pour mettre de côté pour les années plus difficiles. Mais l’objectif, c’est que le club ne dépende plus de moi économiquement. Ce jour-là, on aura gagné car cela voudra dire que le club sera définitivement installé et que, à partir du moment où les résultats sportifs continuent à être bons, on sera capable de garder ce rythme de croisière. C’est d’autant plus important car on voit que quand un club professionnel est dépendant de ses actionnaires, d’un mécène ou d’une entreprise, un jour, il peut lui arriver un pépin. C’est ce qui s’est passé avec les Girondins de Bordeaux… Si à l’UBB nous continuons à travailler fort et à avoir un soutien local, nous pourrons installer ce club dans un équilibre économique. C’est un objectif fort que nous nous sommes fixés car, s’il est rempli, il assurera la pérennité du club, à laquelle je suis très attaché. J’ai toujours dit que j’étais l’actionnaire largement majoritaire mais je n’ai jamais considéré que c’était mon club. »
Pour ce 1er match, nous avons invité 1 000 pompiers pour les remercier de leur incroyable travail cet été
EJG : Comment parvenir à l’équilibre économique, par une ouverture de capital ?
M. : L’ouverture de capital que j’avais proposée avant le Covid n’avait pas eu un grand succès et cela a peu évolué. C’est une grande question car même en faisant entrer 2 millions d’euros, ce n’est pas suffisant. L’objectif, c’est plutôt de faire entrer des entreprises solides qui assureront notre avenir. C’est un dossier qui doit redémarrer mais je me demande vraiment si ce n’est pas ma présence qui freine l’ouverture de capital. »
EJG : Pour revenir à vos 800 partenaires, vous touchez tous types d’entreprise ?
M. : « On est complètement dans la PME girondine et il faut souligner que nous sommes de plus en plus attractifs dans les départements limitrophes comme la Dordogne, les Landes, le Lot-et-Garonne ou la Charente. Cela montre l’envergure régionale de l’UBB aujourd’hui. »
EJG : Quels sont les atouts du club pour attirer ces nouveaux partenaires ?
M. : « On pourrait résumer cela en disant que : venir à Chaban, c’est l’assurance de passer un bon moment ! C’est un stade de centre-ville beau et convivial, il y a un public et une ambiance incroyables et il se passe des choses sur le terrain avec, globalement, de bons résultats. Enfin, c’est l’assurance d’être dans les réceptifs d’après-match avec entre 2 500 et 3 000 personnes qui sont, pour la plupart, des chefs d’entreprises ou des dirigeants de grandes boîtes. Ce côté business est aussi très porteur pour l’UBB. »
EJG : Une étude de la CCI a bien montré l’impact économique du club sur l’agglomération et au-delà ?
M. : « Il était en effet de 100 millions d’euros, alors que nous n’avions pas les mêmes résultats qu’aujourd’hui. Cela a permis de montrer aux collectivités locales le rôle économique de l’UBB. »
Nous allons dépasser un total de 800 partenaires entreprises et nous allons encore en signer durant la saison
EJG : Cela a eu des répercussions quand on sait que certains clubs du Top 14 sont fortement soutenus par les collectivités locales ?
M. : « Oui globalement ça va, surtout tant que nous avons le stade Chaban-Delmas dans des conditions très correctes, même si nous ne sommes pas les mieux lotis ».
EJG : Après la crise sanitaire, quelle est la situation financière de l’UBB ?
M. : « On a rendu les Prêts Garantis par l’État (PGE) et nous allons clôturer la saison 2021/2022 en positif, ce qui est une excellente nouvelle, mais c’est grâce à la solidarité de nos partenaires et de nos abonnés ainsi qu’aux aides de l’État. Une partie de ces aides va être décalée sur cette saison 2022/2023, pour laquelle on ne devrait pas avoir de difficultés financières vu les bons chiffres des partenariats et abonnements. En revanche, quand on se projette vers 2023/2024, on constate qu’on pourrait à nouveau retrouver des déficits. Ce qui est embêtant, c’est qu’on s’aperçoit que nous sommes à un plafond de verre à Chaban où nous n’aurons plus rien à vendre. »
Nous sommes de plus en plus attractifs dans les départements limitrophes (24, 40, 47)
EJG : Peut-on envisager de nouveaux aménagements du stade ?
M. : « On y pense sans cesse mais c’est un vieux stade et inscrit au patrimoine. De plus, il n’y a pas beaucoup de surfaces car elles sont bloquées par la plaine des sports derrière et l’accueil, bien légitime, des Bordelais et des scolaires. On se retrouve un peu pris en étau. »
EJG : Est-ce difficile de bâtir un budget chaque saison face à la concurrence des autres clubs ?
M. : « Si l’UBB se rapproche de l’équilibre économique, c’est grâce à la baisse du Salary Cap (plafonnement de la masse salariale mis en place par la LNR). Et hormis si certains trichent, ce qui reste possible, nous serons tous à peu près à égalité. »
EJG : Quelle part représente la masse salariale dans votre budget ?
M. : « En incluant les charges patronales nous sommes sur des sommes qui représentent entre 60 et 70 % du budget. »
EJG : Parmi les nouveautés, il y a l’arrivée de provinces sud-africaines en coupe d’Europe…
M. : « Déjà, il faut savoir que la coupe d’Europe n’est pas très intéressante économiquement pour une simple raison, des droits télé moins élevés et des affluences dans les stades moins bonnes que pour le Top 14. En France, la culture est basée sur le championnat avant tout mais on a tout de même besoin de la coupe d’Europe. Faire entrer l’Afrique du Sud ne va rien nous apporter économiquement mais cela va faire évoluer, dans le bon sens, la compétition. Je comprends que nous perdons un peu d’identité mais il ne faut pas mourir de notre fermeture d’esprit avec une compétition où l’on retrouve souvent les mêmes équipes. Rappelons que le rugby n’est pas un sport planétaire et qu’il n’est pas non plus présent dans certaines régions françaises. Moi je suis pour l’ouverture. »
EJG : Votre passion est-elle toujours intacte à l’aube d’une nouvelle saison ?
M. : « Même s’il y a toujours des petits moments de lassitude ou de désespoir, comme lors de notre défaite en demi-finale contre Montpellier, ce championnat reste passionnant car c’est le plus dur au monde. Il y a 11 équipes qui partent avec quasiment les mêmes moyens et qui jouent la qualification. Sur ces 11 équipes, 6 ou 7 peuvent être championnes ! C’est un combat permanent et c’est ce qui m’intéresse, que ce soit difficile. Avec Bayonne qui monte avec des moyens, je m’attends à une saison encore plus dure que l’année dernière. »
EJG : Vous êtes également dirigeant de Kariban (qui regroupe 6 marques de textile), comment organisez-vous votre agenda avec ces deux activités ?
M. : Depuis 3 ans j’ai pris plus de temps pour mon entreprise et je suis ravi car on va atteindre les 250 millions d’euros de chiffre d’affaires et plus de 400 personnes employées. On est en train de devenir le numéro 1 européen après avoir beaucoup investi et lancé de nouvelles marques. J’aime mon métier et les gens avec qui je travaille, c’est une super aventure et je change facilement de casquettes entre mes deux activités. »
EJG : Quels sont les projets de développement du club ?
M. : « On en a plusieurs ! D’abord celui d’agrandir le Ceva Campus (notre centre d’entraînement à Bègles), celui de fermer un virage de Chaban, que j’ai soumis à la mairie de Bordeaux, afin d’en faire une salle de réception qui nous fait cruellement défaut. Toujours à Chaban, nous souhaitons construire un bâtiment sur le parvis pour accueillir les supporters, réaliser une boutique et une brasserie. Nous travaillons aussi sur un projet en centre-ville dont je ne peux pas trop parler pour l’instant.
L’UBB EN CHIFFRES
100 millions d’euros d’impact économique sur Bordeaux Métropole
27 millions d’euros de budget pour la saison 2022/2023
800 partenaires dont 130 nouveaux cette saison
10 800 abonnés avant la reprise (une 1re dans l’histoire du club)
1 500 abonnés supplémentaires 2e centre de formation de France 25 000 supporters en moyenne au stade soit la meilleure affluence d’Europe
30 salariés au club (hors sportif)