Si le mécanisme juridique de la copropriété régit tout immeuble bâti ou groupe d’immeubles bâtis dont la propriété est répartie par lots entre plusieurs personnes, le lotissement correspond quant à lui à la division en propriété ou en jouissance d’une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis. Ainsi, le lotisseur, lors de la réalisation de son programme de vente de terrains à bâtir, devra non seulement obtenir les autorisations d’urbanisme idoines à la création d’un lotissement, mais aussi établir les différents documents contenant les règles applicables entre les futurs colotis.
LES AUTORISATIONS D’URBANISME
La création de tout nouveau lotissement est donc strictement encadrée par la loi, notamment aux articles L.442-1 et suivants du Code de l’urbanisme, et selon les cas, l’obtention d’un Permis d’Aménager (PA) ou d’une Déclaration Préalable (DP) sera obligatoire, l’autorisation de lotir ayant été supprimée depuis le 1er octobre 2007. Il résulte de l’article R.421-19 a) du Code de l’Urbanisme que la délivrance d’un PA sera nécessaire pour :
– les lotissements qui prévoient la création par le lotisseur ou l’aménagement de voies, d’espaces, ou d’équipements communs à plusieurs lots et propres au lotissement ;
– les lotissements situés dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable, dans les abords des monuments historiques, ou dans un site classé ou en en instance de classement À défaut d’être soumis au régime du PA, le lotissement devra être autorisé par un arrêté valant DP. Il est important de préciser que le régime du PA est davantage contraignant, notamment dans la mesure où le délai d’instruction est plus long (3 mois contre 1 mois pour une DP) et que la commercialisation des lots issus du lotissement est très encadrée :
– interdiction de signature de promesse avant l’obtention du PA ;
– après obtention du PA, seules les promesses unilatérales de vente sont admises, et les ventes définitives ne peuvent intervenir qu’après exécution des prescriptions imposées par l’administration au lotisseur dans le PA (sauf autorisation expresse, ou obtention d’une garantie d’achèvement). À ces autorisations d’urbanisme, s’ajoutent principalement trois autres documents qui sont récurrents dans les lotissements : les statuts de l’association syndicale, le règlement, et le cahier des charges.
LES STATUTS DE L’ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE
Lors de la création du lotissement, il peut être procédé à la création d’une association syndicale libre (ASL), dont l’objet sera de gérer l’entretien, l’amélioration et la mise en valeur des parties communes du lotissement (voies et espaces verts). Chaque coloti deviendra alors membre de cette ASL lors de l’acquisition d’un bien situé dans ledit lotissement. Les membres du bureau de l’ASL procèdent généralement à des appels de cotisation annuelle, à l’effet d’entretenir les espaces communs. Cependant, dans la majeure partie des lotissements, et dans la mesure où les voies sont ouvertes à la circulation publique, il n’est pas rare qu’une fois l’ensemble des aménagements et travaux exécutés par le lotisseur, les voies soient rétrocédées à la commune, de sorte que l’entretien sera alors réalisé par les services de la voierie. Bien souvent, lors de l’acquisition d’un bien immobilier dépendant d’un lotissement, vous serez donc en possession de statuts d’ASL qui n’a plus de réel objet, les voies et parties communes ayant été rétrocédées à la commune.
LE RÈGLEMENT DE LOTISSEMENT
Selon l’article 6 du Décret du 28 juillet 1959, ce document fixe « les règles et servitudes d’intérêt général imposées dans le lotissement et concernant notamment les caractères et la nature des constructions à édifier, la tenue des propriétés, les plantations et les clôtures ». Ainsi, ce règlement a pour but d’unifier et de fixer les règles architecturales applicables aux constructions érigées dans le lotissement. Ayant une portée réglementaire, ce document est donc opposable aux collectivités publiques et aux demandes d’autorisations d’urbanisme déposées. Ainsi, il peut arriver que le règlement de lotissement contienne des règles d’urbanisme plus strictes que le Plan Local d’Urbanisme du lieu de situation de l’immeuble (ou que tout autre document d’urbanisme en tenant lieu). Il convient donc d’être vigilant quant au respect des règles qu’il contient lors de la réalisation d’une construction ou de travaux ultérieurs.
Il peut arriver que le règlement de lotissement contienne des règles d’urbanisme plus strictes que le Plan Local d’Urbanisme
Cependant, l’article L 442-9 alinéa 1er du Code de l’Urbanisme a prévu un principe de caducité des règles d’urbanisme des lotissements à une double condition cumulative :
– si le lotissement est couvert par un Plan Local d’Urbanisme ou tout document d’urbanisme en tenant lieu (Plan d’Occupation des Sols ou Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur) ;
– si le lotissement a été autorisé depuis plus de 10 ans (date de l’autorisation de lotir initiale).
À cette double condition, les règles contenues dans le règlement de lotissement, qui sont donc par nature réglementaires, seront caduques, et seules les règles du document d’urbanisme du lieu de situation de l’immeuble seront alors applicables. Se pose alors l’épineuse question de la caducité du cahier des charges et des règles qu’il contient…
LE CAHIER DES CHARGES
Le cahier des charges est un document de droit privé, à portée contractuelle (régissant les rapports privés entre colotis) et n’est donc pas opposable aux collectivités publiques et aux demandes d’autorisation d’urbanisme. Dès lors, il serait possible qu’une autorisation d’urbanisme soit accordée par la collectivité, mais soit contraire aux règles contenues dans le cahier des charges. Tout coloti pourrait alors exercer une action contractuelle relative à l’infraction au cahier des charges constatée. Exemple : Un coloti souhaite réaliser un garage non attenant sur sa parcelle. Le Plan Local d’Urbanisme autorise 20 % d’emprise au sol et la construction d’une annexe non accolée. Tandis que le cahier des charges exige une unité de bâtiment, et un maximum de 15 % au sol. Pour délivrer son permis de construire, le service instructeur ne regardera que le PLU, et votre permis de construire sera donc accordé. En revanche, cette autorisation d’urbanisme sera en contravention avec les règles contractuelles contenues dans le cahier des charges. Dès lors, si la construction du garage non attenant est réalisée, tout coloti pourra exercer une action contractuelle en démolition pendant trente année. Il est important de noter que les règles contenues dans le cahier des charges sont imprescriptibles, et qu’à la différence du règlement de lotissement (cf. supra), le principe de caducité ne lui est pas applicable. Dès lors, il n’est pas rare de voir des cahiers des charges très anciens, dont les règles, bien que parfois de nature réglementaire, restent pleinement applicables. La superposition et la lecture combinée des règles de droit public (Plan local d’urbanisme ou tout autre document en tenant lieu) et des règles contractuelles convenues entre les colotis (cahier des charges) peuvent être source d’incertitudes lors de la vente/ acquisition de votre bien immobilier ou lors de la réalisation de travaux sur ce dernier. Nous ne pouvons donc que vous conseiller de prendre attache avec votre notaire, professionnel du droit qui saura vous accompagner dans la lecture et l’analyse des documents de lotissement.