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Travail et vie privée : plus difficile pour les femmes

Selon une enquête, consacrée à la conciliation entre vies privée et professionnelle, les femmes subissent davantage de reproches de leur entourage pour manque de disponibilité. Néanmoins, les résultats diffèrent suivant les caractéristiques individuelles et catégories socioprofessionnelles.

Horaires atypiques, intensité et charge de travail au bureau… les contraintes de la vie professionnelle se répercutent sur les relations avec les proches. Une vaste enquête du ministère du Travail (Dares), menée en 2016 auprès de 20 000 salariés du public et du privé, et dévoilée récemment, s’est intéressée à l’impact de l’empiétement de la vie professionnelle sur la vie familiale. Les résultats font ressortir une proportion quasi similaire de femmes et d’hommes (respectivement 13 % et 14 %) qui déclarent essuyer « toujours ou souvent » des reproches de leur entourage, à cause du manque de disponibilité. Mais à conditions professionnelles et personnelles équivalentes, la probabilité de subir des plaintes est de 20 % plus élevée pour les salariées. Et pour cause, les stéréotypes liés à la charge domestique, perdurent au détriment de celles-ci.

Les problèmes varient selon le type de ménage : sans surprise, 16 % des couples avec enfants mineurs peinent à équilibrer vie professionnelle et privée, contre 12 % de ceux avec des enfants plus âgés ou sans enfant. Les tensions avec les proches sont aussi plus fréquentes en cas d’inactivité de l’un des conjoints : 19 % des hommes et 15 % des femmes sont alors critiqués, contre respectivement 14 % et 13 % des salariés tous deux en poste.

Autre facteur impactant : la catégorie professionnelle. Les cadres, avec des horaires de travail plus longs, sont plus nombreux à avancer des difficultés avec leur entourage. Mais le fait d’être cadre est plutôt protecteur pour les femmes. Plus elles sont indépendantes professionnellement, moins le partage des tâches domestiques est inégalitaire dans le foyer. Et leur situation financière leur permet de recourir à des aides, comme pour la garde des enfants. Celles-ci reçoivent des reproches de l’entourage réduites de 20 % par rapport aux professions intermédiaires. Par ailleurs, le cumul de plusieurs emplois pèse davantage sur les hommes : 19 % font état de critiques, contre 12 % pour la gent féminine. Enfin, travailler dans le secteur privé est plus déséquilibrant en termes de rapports avec les proches que dans le public.

Horaires et durée du travail

Autre obstacle à la conciliation, les conditions de travail : les personnes en horaires larges et atypiques subissent plus de reproches dans leur vie personnelle, en particulier les femmes. Dans le cas de l’organisation du travail en 3 x 8, 29 % d’entre elles déclarent rencontrer des difficultés, contre 18 % des hommes. A fortiori, la probabilité de rapporter de tels problèmes est plus que doublée lorsque ces dernières passent à l’organisation en 2 x 8. Et, tout genre confondu, 25 % des salariés qui travaillent la nuit font face à ces critiques de l’entourage.

Le travail à temps partiel, de son côté, réduit le risque de reproches, notamment pour les femmes, davantage concernées. À l’inverse, opter pour les heures supplémentaires entrave la conciliation familiale et professionnelle de 27 % des salariés, contre 8 % pour ceux qui n’en effectuent pas. Autre constat de l’étude, plus le temps de trajet domicile-travail est important, moins la conciliation est facile. Les reproches sont alors adressées aux femmes, lorsque le temps consacré à ces déplacements est supérieur à une demi-heure par jour.

Autre constat, le soutien social au travail limite les risques de tensions. L’entraide entre collègues, pour s’absenter en cas de problèmes personnels, par exemple, ou la compréhension des supérieurs hiérarchiques contribue à l’équilibre professionnel et personnel, notamment pour les hommes : seuls 9 % de ceux-ci font état de difficultés avec les proches, contre 26 % de ceux qui ne disposent pas de cette souplesse. De plus, seuls 9 % des femmes et 11 % des hommes qui bénéficient de plus d’autonomie au travail ne parviennent pas à cet équilibre, contre 20 % de ceux qui n’ont pas cette possibilité.

Santé et bien-être impactés

Quant aux risques psychosociaux, 26 % des hommes et 21 % des femmes sujets au débordement de travail rapportent des difficultés de conciliation, contre 7 % de ceux qui ne sont pas dans ce cas. De la même façon, la charge mentale et la quantité de travail excessive accroissent davantage le risque d’être critiqué, en particulier pour les hommes. 

En outre, 41 % des femmes et 29 % des hommes qui déclarent être affectés par les récriminations de leurs proches signalent plus souvent un état de santé « altéré ». À cela s’ajoute la perturbation du sommeil qui toucherait 43 % des femmes et 31 % des hommes subissant des reproches de l’entourage, selon l’enquête.

Finalement, un trouble psychologique est évoqué par 18 % des salariés réprimandés contre 9 % de ceux qui ne rapportent pas de difficultés. Si ces situations multiplient par deux le risque dépressif pour les femmes, « le sens de la causalité entre difficultés de conciliation et état de santé dégradé et risque dépressif reste difficile à établir », note l’étude.