Si l’usage de l’intelligence artificielle n’est pas nouveau dans les métiers de la banque et de la finance, l’avènement de l’intelligence artificielle générative représente une véritable révolution. C’est pour en aborder les défis majeurs, qui sont autant technologiques, réglementaires, d’usage, qu’humains, que Bordeaux Place Financière et Tertiaire (BPFT) organisait début décembre une conférence sur « L’IA générative : un outil-clé pour la banque, la finance et le conseil de demain ? » au sein de l’école de commerce ESSCA, en partenariat avec French Tech Bordeaux, Bpifrance et Les Échos Judiciaires Girondins.
Devant un parterre de dirigeants, professionnels et étudiants de ces secteurs, Laurent Babin, avocat associé chez Redlink et vice-président de BPFT en charge de la commission innovation, et Vincent Maymo, professeur des universités à l’IAE Bordeaux en charge de la commission jeunesse de BPFT, également chroniqueur aux Échos Judiciaires Girondins, ont reçu « huit pionniers qui affrontent ces défis au quotidien ».
Souveraineté
« L’IA générative est importante car elle est entrée dans nos quotidiens à tous. Tous ceux qui arrivent sur le marché du travail ont une IA dans leur poche », remarque d’entrée Olivier Lantran, responsable du Lab Innovation de la Banque de France. Si le choix des outils technologiques est important, puisqu’il touche à la souveraineté et à la gestion de données réglementées, « il est crucial de se les approprier, notamment pour la Banque de France, en tant que régulateur », rappelle Olivier Lantran.
Laurent Inard, directeur de la R&D chez Forvis Mazars ; Martina Machet, directrice du département Data Intelligence de la Société Générale ; et Morgan Jacob, responsable de l’IA Factory du Crédit Mutuel Arkéa, représentent les entreprises qui ont opté pour des services internes capables de produire leurs propres outils. « La souveraineté sera aussi la capacité à faire nous-mêmes. D’autant que l’expertise métier est essentielle », remarque en effet Morgan Jacob.
Arthur de la Brunière, manager d’EY Fabernovel, et Thomas Van Cauwelaert, directeur financier de la start-up LightOn, délivrent quant à eux conseils et solutions. Yoris Pujol, coresponsable du master MAS-IREF à l’université de Bordeaux et responsable risques et conformité du cabinet SeaBird ; et Dejan Glavas, enseignant-chercheur responsable du master finance à l’ESSCA et directeur de l’Institut IA for sustainability, à l’origine d’un baromètre sur l’usage de l’IA dans les entreprises, forment pour leur part les étudiants et futurs professionnels de ces secteurs.
Premiers cas d’usage
« Les outils d’IA générative représentent une incroyable opportunité dont on doit imaginer les cas d’usage, remarque Yoris Pujol. Ils permettent de réduire les coûts d’entrée sur un certain nombre de sujets à définir, et d’automatiser des taches pour libérer du temps pour l’analyse, en traitant en masse des données de natures et de formes différentes. »
Parmi les premiers cas d’usage concrets, Lassie est un assistant de recherche documentaire interne à la Société Générale. « Compliant by design », intégrant la réglementation et ses évolutions, il propose une interface pour poser des questions en langage naturel et des réponses étayées par des sources documentaires vérifiables. Chez Forvis Mazars, Gaya permet de proposer un centre documentaire et un système de tri de documents en masse.
Tous deux se basent sur un RAG (Retrieval-augmented generation), qui permet d’utiliser la puissance de l’IA générative, mais en basant ses réponses sur des sources précises et faisant autorité ou sur les données internes d’une organisation.
Risques
Si l’IA générative est une opportunité, il faut également tenir compte des risques, dont « les biais et hallucinations de l’IA », note Olivier Lantran de la Banque de France. L’humain est ainsi central dans son déploiement, la vérification et l’esprit critique quant aux réponses produites étant indispensables, s’accordent les participants. « Les salariés doivent savoir utiliser ces outils, mais surtout créer de la valeur par-dessus », insiste Laurent Inard, de Forvis Mazars.
Les salariés doivent savoir utiliser ces outils, mais surtout créer de la valeur par-dessus
C’est pourquoi « la conduite du changement est fondamentale pour que l’usage se diffuse. Les performances de l’IA étant fonction des utilisateurs, on doit les accompagner, c’est essentiel. D’autre part, il faut utiliser l’IA pour ce qu’elle apporte comme valeur, mais pas forcément partout, car elle a un coût environnemental important », rappelle Martina Machet de la Société Générale. « L’humain est le sujet. Il doit comprendre que l’IA n’a pas de portée sur les emplois, mais sur les tâches », tranche Olivier Lantran.
« L’avenir, ce sera les agents. C’est encore plus ambitieux et ce sera énorme », anticipe Laurent Inard. Au-delà de répondre à des questions sous forme de texte, d’image ou de sons, ces agents pourront en effet réaliser certaines tâches, comme créer un contrat, par exemple.