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DRH, des « business makers »

La place de la DRH est aujourd'hui centrale pour suivre les changements organisationnels, digitaux et managériaux de l’entreprise. Son rôle de « business maker », accompagnateur de la transformation, a été mis en avant dans un récent webinaire organisé par Top Employers : « Le rôle des DRH réinventé ». Illustration avec l’enseigne Monoprix.

DRH business makers

© Shutterstock - TierneyMJ

Les RH, qui ont souvent piloté la gestion de crise ont eu l’opportunité de passer d’un rôle de « business partner » à un rôle de « business maker », affirme Vincent Binetruy, directeur France de Top Employers Institute. La fonction a démontré son agilité et son engagement sans pareil, souvent au prix d’une charge de travail et d’un niveau de stress très important. » La priorité numéro un des entreprises : aligner la stratégie RH et la stratégie business. « Chez 100 % des top employers, la direction a mené des actions de soutien actif vers les RH. Cela démontre la prise de pouvoir des RH au sein des comex », poursuit Vincent Binetruy. Les postes de RH, personnes clés dans la transformation des entreprises, confondent souvent des responsabilités de DRH et liées à la transformation. « Près de 9 RH sur 10 ont mis en place des programmes d’accompagnement pour aider les collaborateurs à comprendre l’impact de la crise sur leur rôle et leur responsabilité », se félicite Vincent Binetruy.

L’enseigne Monoprix a formé ses collaborateurs au savoir-être, grâce à des ateliers comme la « Oui Attitude »

Accompagner la transformation

L’enseigne de distribution Monoprix – 700 magasins, 21 000 collaborateurs, 5 milliards d’euros de CA en 2019 –, qui a essuyé une perte de 15 à 20 % de son chiffre d’affaires en magasin, a entrepris de repenser l’expérience d’achat des consommateurs. « Nos clients veulent faire des achats plaisir, nous devons donc sublimer leur expérience d’achat en magasin. Notre enjeu est de créer un maximum de valeurs humaines dans nos magasins pour avoir une complémentarité entre nos magasins physiques et notre espace digital », explique Sandra Hazelart, directrice des ressources humaines de Monoprix. Pour ce faire, les RH ont entrepris de chasser toutes les tâches sans valeur ajoutée pour les clients.

« Nous avons fait un ménage des fiches de poste et déployé toutes les technologies possibles pour automatiser le plus grand nombre de tâches, comme le suivi des dates de péremption des produits frais ou l’inventaire des produits. » L’entreprise a repensé l’organisation du travail pour que chaque heure travaillée soit en lien avec le client. « L’objectif est de réhumaniser nos magasins et de proposer toujours plus de nouveaux services et produits », justifie Sandra Hazelart.

L’enseigne a également formé ses collaborateurs au savoir-être, grâce à des ateliers comme la « Oui attitude », pour définir les bonnes postures à adopter vis-à-vis des clients. Pour prendre soin d’eux et passer d’une relation client de masse à une relation plus personnalisée où le collaborateur Monoprix saura écouter, interroger, décoder et conseiller les clients, l’enseigne cherche à développer des produits ou des services adaptés. Pour y parvenir, elle a lancé, en 2020, les ateliers « Parlez-nous de vous », dans l’objectif de faire révéler aux collaborateurs ce qu’ils aiment faire en dehors de leur travail, pour en savoir plus sur eux et sur leurs aptitudes.

C’est lors de l’un de ces entretiens que l’un des collaborateurs s’est révélé féru de vélo et que l’enseigne a eu l’idée de monter un service de réparation de vélos pour répondre aux besoins de ses clients. « Une autre a avoué adorer la peinture et a pu monter une exposition avec des peintres locaux dans son magasin », détaille Sandra Hazelart.

Et les évolutions de compétences

En termes de formation, l’enseigne ne parle plus de métiers mais de « compétences activables », en fonction des besoins des clients, soit des compétences techniques de boucher ou de fromager par exemple, et des compétences extraprofessionnelles pour apporter moins de contraintes et du bien-être aux clients. « Nous avons une dizaine de projets structurants en cours qui nécessitent des compétences qui n’existent pas encore. »

79 % des DRH contribuent à la construction de filières de formation et de compétences via des partenariats avec d’autres
organisations

De manière générale, les RH (à 86 %) recueillent systématiquement les aspirations de carrière des collaborateurs dans leur prise de décision. Un chiffre en hausse de 35 points par rapport à 2020. « Cette prise en compte assure le succès des entreprises », signale Vincent Binetruy. Monoprix accompagne la transformation de l’entreprise en étant transparente pour permettre aux collaborateurs de se projeter et de rendre moins anxiogène ces changements de métier. « Préserver les emplois ne signifie pas préserver les métiers. Il y a des métiers en croissance et d’autres en décroissance, comme les hôtesses de caisse », note Sandra Hazelart. 90 % de ses salariés n’ayant pas d’adresse mail, l’enseigne privilégie, pour communiquer, l’affichage en magasin, les offres sur son application, la communication via les managers et les brochures avec les fiches de paie pour montrer des exemples de collaborateurs. « Quand des pairs parlent à leurs pairs, cela a plus d’impact », soutient Sandra Hazelart.

Selon Top Employers, 79 % des DRH contribuent à la construction de filières de formation et de compétences à travers des partenariats avec d’autres organisations. Une tendance qui va s’accélérer avec le nouveau dispositif public de lutte contre le chômage « transitions collectives ». Monoprix ne déroge pas à la règle : l’enseigne a noué un partenariat avec le groupe Korian, qui gère notamment des Ehpad, et propose des parcours sécurisés avec des formations de 18 mois en alternance pour permettre aux collaborateurs qui exercent des métiers en décroissance d’obtenir un diplôme d’aide-soignant. « Nous le proposons en priorité à ceux qui apprécient d’être au contact de personnes âgées. Ils restent salariés de Monoprix pendant leur formation et bénéficient à la clé d’un CDI chez Korian, avec un salaire plus important. »

En trois semaines, plus d’une trentaine de collaborateurs ont déjà manifesté leur intérêt pour le dispositif. L’enseigne cherche à développer d’autres partenariats pour travailler sur des métiers pénuriques, notamment avec le secteur de la petite enfance. Dans cette optique d’évolution des carrières, elle propose également à ses salariés volontaires un dispositif multi-employeurs pour leur permettre de travailler dans plusieurs entreprises de différents secteurs d’activité. 1 975 collaborateurs ont ainsi évolué vers une fonction différente en 2020 se félicite l’enseigne, soit 31 % de plus qu’en 2019.