Couverture du journal du 19/04/2024 Le nouveau magazine

Entreprises : l’art de se raconter

CHRONIQUE DE LA COM’ - Quête de sens, perte de lien due au télétravail, difficultés pour attirer les talents et recruter… plus que jamais les organisations ont besoin de réenchanter leurs relations en interne et en externe. Pour cela, elles introduisent dans leur communication de nouvelles narrations.

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Claire Goutines, rédactrice ©Louis Piquemil - Echos Judiciaires Girondins

Les entreprises comprennent de plus en plus l’importance de travailler leur storytelling, tant pour les équipes internes afin d’expliquer la genèse de la société et de valoriser les savoir-faire, que pour l’externe pour mieux humaniser leurs messages. Quels sont les bons leviers pour mettre en récit son activité, ses valeurs, ses spécificités ?

Une histoire unique… à partager

Les dirigeants ne voient pas toujours ce qu’ils peuvent raconter. Il y a pourtant 1 000 choses à dire, qui viendront compléter des messages publicitaires plus classiques. Le storytelling emprunte justement des chemins différents : au lieu de parler produits, l’approche narrative s’attache à montrer les projets, les relations humaines, les ambitions, les impacts positifs de l’activité. Cette prise de parole unique et personnalisée favorise l’adhésion du lecteur et son engagement, notamment sur les réseaux sociaux où les commentaires, partages et autres « like » augmentent l’e-réputation des entreprises.

« Le storytelling favorise l’adhésion »

Comment créer du contenu éditorial ?

En fait, tout le quotidien et l’actualité d’une organisation constituent potentiellement des pistes d’histoires, sur lesquelles le dirigeant peut développer une approche narrative. En voici quelques exemples :

– Un recrutement : ce sont des compétences qui arrivent et une personnalité qui a un parcours, des envies, de l’enthousiasme. Parler de ce nouveau collaborateur entraîne un double effet positif : exposer de façon détournée le dynamisme de la société et valoriser le salarié fraîchement embauché.

– Portrait du dirigeant. Montrer une vie d’entrepreneur, avec son lot de doutes, de tops et de flops, de changement de cap et d’espérances…

– Des projets commerciaux ou techniques, comme un appel d’offres remporté, l’investissement dans une nouvelle machine qui va multiplier vos opportunités, un marché qui s’ouvre à l’export… Le chef d’entreprise est légitimement fier de les présenter, dans la limite bien sûr de la confidentialité et de ce qu’il a envie de partager sans dévoiler ses axes stratégiques.

– Le lancement d’un produit. Plutôt que de parler technique, le storytelling interrogera ceux qui l’ont conçu ou qui l’utilisent déjà. Citer un salarié, un client ou un partenaire, c’est placer l’humain au cœur du récit et de l’expertise.

– La démarche RSE de la structure, via le soutien à une association locale ou à une action solidaire. En donnant la parole à ceux qui bénéficient de cette aide, la société illustre indirectement son engagement citoyen et responsable.

– Un fournisseur récemment référencé, qui amènera avec lui un gap technologique ou un sourcing propice à une labellisation orientée vers la qualité, l’environnement…

Renforcer la marque employeur

À l’heure où les entreprises peinent à trouver des candidats, ce qu’elles font à l’intérieur doit se montrer à l’extérieur. Elles ont compris la nécessité de travailler et maîtriser leur image pour attirer des talents. Comme l’écrivait Laëtitia Richez, Présidente de l’APACOM, dans une précédente chronique (lire EJG 7060-7061), la communication dans les organisations doit plus que jamais créer du lien en interne et en externe. À ce titre, les résultats de l’Observatoire des Métiers de la Communication en Nouvelle-Aquitaine mené par l’APACOM montrent, entre autres enseignements, l’émergence de la marque employeur parmi les préoccupations des annonceurs. Elle vient en 3e position dans leurs projets, illustrant ainsi les difficultés des entreprises à recruter.

Le storytelling en constitue un axe essentiel. Il fournit des éléments de réassurance sur ce que l’entreprise donne à voir d’elle. L’identité, les points forts, la qualité de vie au travail, la vision… est-ce une réalité ? L’une des meilleures manières de répondre consiste à recueillir et partager les avis des collaborateurs eux-mêmes.

Transformer les salariés en ambassadeurs 

Les paroles des salariés, la meilleure des preuves

Pour convaincre les candidats qu’elle est un endroit où il fait bon travailler, l’entreprise a tout intérêt à s’appuyer sur des témoignages de salariés. Leur donner la parole est un excellent moyen non seulement d’améliorer sa marque employeur, mais également de mobiliser les collaborateurs, développer leur sentiment d’appartenance à la structure et les transformer en ambassadeurs.

Car, quelle que soit la nature de leur poste, de nombreux salariés sont passionnés. Ils aiment raconter leur vécu et ce qui les fait vibrer. En région par exemple, une ETI dans le secteur de transport interroge tous les mois un conducteur, et diffuse son témoignage sur ses réseaux sociaux. L’un d’entre eux livre des matériaux de construction. Ce qu’il apprécie ? Qu’un chantier ne ressemble pas à celui d’à côté, que les accès sont souvent difficiles et qu’il doit trouver une solution coûte que coûte, parce que les équipes sur place comptent sur lui. Et il aime aussi manipuler l’immense grue qui ira déposer délicatement la palette de parpaing. Une autre conductrice, avec un profil plus rare donc dans cet univers masculin, effectue des ramassages de volailles en Bretagne. Ce qui la fait vibrer ? Le contact avec les éleveurs, et l’autonomie au volant de son camion. Tous ont en commun d’aimer leur travail. Ils sont fiers du matériel qu’ils utilisent, ils racontent l’entraide avec les collègues, et sont ravis de s’exprimer, à condition bien sûr d’avoir la garantie que leurs propos seront respectés. Car cette parole positive pour l’entreprise est tout aussi valorisante pour le collaborateur interrogé. Prendre le temps de l’écouter, de lui permettre d’expliquer son métier, de considérer que son quotidien est digne d’intérêt… a un impact très bénéfique.

Le storytelling a pour objectif de faire émerger la singularité de l’entreprise, les points saillants qui font sa différence et qu’on ne retrouve nulle part ailleurs. À l’heure où l’intelligence artificielle bouscule nos pratiques, y compris en communication, on peut noter que cette approche narrative basée sur la force du témoignage et du récit n’est pas (encore ?) disponible sur ChatGPT…

L’APACOM, association loi 1901, a pour objectif de promouvoir les métiers de la communication, de favoriser les échanges professionnels et de valoriser le rôle stratégique de la communication auprès des chefs d’entreprise et des décideurs de la région Nouvelle-Aquitaine. Avec près de 500 membres adhérents qui représentent la grande diversité des métiers de la communication : communicants en entreprises, agences, collectivités, administrations, prestataires, consultants, indépendants, formateurs et enseignants, elle représente l’une des plus importantes associations de communicants de France.

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