Couverture du journal du 17/01/2025 Le nouveau magazine

Gironde : la CPME près de chez vous

Présidente de la CPME Gironde depuis 2022, dont le mandat a été prolongé de trois ans jusqu’en 2027, Cécile Despons se mobilise constamment sur le terrain pour accompagner et soutenir les chefs d’entreprise confrontés à de multicrises et incertitudes. Dans ce contexte de forte hausse du nombre de défaillances d’entreprises particulièrement en Gironde, cette femme tonique au discours cash appelle les dirigeant (es) en difficultés à oser demander de l’aide bien avant qu’il ne soit trop tard.

CPME Gironde, Cécile DESPONS

Cécile DESPONS, présidente de la CPME Gironde © Louis Piquemil - Echos Judiciaires Girondins

Échos Judiciaires Girondins : Depuis deux ans que vous êtes présidente, quels enseignements et observations faites-vous de votre mission auprès des dirigeant(e) s d’entreprise ?

Cécile Despons : Je suis une inconditionnelle partisane des entreprises et admirative de celles et ceux qui les dirigent. C’est le sens de mon engagement depuis près d’une dizaine d’années, que ce soit avec l’association Femme Chef d’entreprise (FCE), dans les mandats patronaux ou encore dans ma mission de présidente de la CPME Gironde. Ces deux années m’ont conforté dans l’importance de l’action du monde économique auprès de nos institutions. Nous avons un rôle à jouer en tant que lanceurs d’alertes, force de propositions ou encore acteurs de solutions par notre expertise du territoire et de son écosystème. Cela m’a conforté dans l’idée que malgré l’impression de solitude que nous ressentons tous, nous ne sommes pas seuls ».

 

EJG : Depuis deux ans, quelles actions avez-vous initié, en succédant à Philippe Loiseau (ancien président de la CPME 33) ?

C.D. : Depuis deux ans, l’action initiée à la suite de Philippe Loiseau a été de renforcer et de conforter l’importance des territoires au sein de la CPME 33. La Gironde est le plus grand département de France géographiquement, le plus étendu. L’objectif que nous nous sommes fixés pour les trois prochaines années est de donc de renforcer notre présence sur les territoires avec une collaboration et une entraide avec des instances représentatives sur place. « La CPME 33 vient chez vous » : après notre ancrage à Libourne en début d’année, suivi du bassin d’Arcachon sur le 2e semestre, nous allons nous implanter en 2025, dans le Blayais et le Médoc.

L’objectif que nous nous sommes fixé pour les trois prochaines années est de renforcer notre présence et notre entraide sur les territoires

 

EJG : Quels autres types d’actions menez-vous auprès des entreprises ?

C.D. : Nous menons aussi une action d’entraide plus poussée. Après la création du groupement de prévention agréé (GPA) qui travaille avec le tribunal de commerce et l’association Apesa, nous renforçons notre soutien auprès des entreprises qui nous sollicitent (voir encadrés).

Le soutien passe aussi par l’aide développement. Notre vocation n’est pas d’apporter du business, mais en revanche nous avons, par nos signatures de convention, par nos commissions, par nos temps d’échange, la possibilité de permettre à chaque chef d’entreprise de trouver des portes auxquelles il n’aurait pas pensé pour se développer.

Nous avons entrepris une collaboration étroite avec les chambres consulaires et les institutionnels sur des sujets tels que la mobilité, le logement, l’emploi et la formation, la RSE… Nous avons aussi pris position auprès des institutions en faveur de la construction de deux EPR dans le Blayais et de la piste sécante de l’aéroport.

 

EJG : Comment jugez-vous la situation économique généralement des PME françaises et plus particulièrement des PME girondines actuellement : grave ? Désespérée ? Contrastée ? Éprouvante ?

C.D. : Depuis 2020, les entreprises de toutes tailles ont dû s’adapter en permanence. Certes, c’est leur rôle de s’adapter, c’est vrai. Sauf que là, elles ont été confrontées à un empilement de crises. Ça a démarré en 2019 avec les Gilets jaunes, ça a été suivi par le Covid puis la crise des matières premières. Puis la crise énergétique, puis le conflit ukrainien, puis l’inflation. Avec en prime une mutation sociétale entraînant un repositionnement interne concernant sa ressource première et ô combien fondamentale : l’humain. De mémoire, je ne me souviens pas d’une situation équivalente depuis longtemps.

Dans tout cela, je ne dirai pas que les PME girondines sont désespérées, mais assurément fatiguées ? L’adaptabilité constante que nous ont demandé ces cinq dernières années fait que nombre d’entreprises connaissent de grandes fragilités, avérées auprès du tribunal de commerce, entre autres. Au-delà de l’impact économique, il y a aussi d’autres fragilités mentales : on parle du burn out du salarié, on ne parle pas du burn out du chef d’entreprise. C’est pour cela que notre action de solidarité, de soutien, et d’entraide est pour nous capitale.

 

EJG : Vous êtes au quotidien auprès des dirigeant (es) : quels signes préoccupants voyez-vous : burn-out ? Dépressions ? Suicides ? Avez-vous des chiffres sur la Gironde ?

C.D. : Les dirigeant(es)d’entreprise sont comme l’ensemble des Français dans un panel de difficultés représentatif du plus terrible au plus positif. Je n’ai pas de chiffre précis. Mais nombre de chefs d’entreprise éprouvent un grand sentiment de lassitude voire d’abandon. Cela rend notre présence encore plus indispensable.

 

EJG : Vous travaillez en étroite collaboration avec les tribunaux de commerce de Bordeaux et de Libourne : quelles pistes proposez-vous aux dirigeants en difficulté ?

C.D. : Il existe effectivement un certain nombre de possibilités à la fois pour protéger le dirigeant, mais aussi sa société et entre autres, le mettre sous protection du tribunal. Nous faisons souvent intervenir le tribunal de commerce et ses représentants afin qu’ils expliquent leur rôle. Le tribunal de commerce n’a pas un rôle uniquement de sanction : il peut aussi aider les entreprises à se relever. L’échec n’est pas forcément et seulement dû au chef d’entreprise. Mais pourtant, il le vit comme un échec personnel. Parce qu’il y a mis ses économies, sa vie. Mais comme tout un chacun, il a besoin d’aide. Le mandat ad hoc est une solution, la sauvegarde aussi. Passer la porte du tribunal de commerce ne veut pas forcément dire liquidation.

 

EJG : La CPME a mis en place une structure appelée GPA : pouvez-vous nous en dire plus sur sa mission et ses résultats auprès des entreprises en difficulté ?

C.D. : La mission du GPA est d’accompagner à la viabilité économique de l’entreprise sur tous les pans de son activité. Malheureusement peu de chefs d’entreprise osent prendre contact avec le GPA. Nous allons insister sur son utilité, en proposant à nos adhérents une enquête de conjoncture, qui nous apportera des chiffres et permettra de sourcer les chefs d’entreprise qui seraient dans une situation alarmante.

 

EJG : Dans ce tableau plutôt sombre de l’économie française, voyez-vous toutefois des lueurs d’espoirs et même des opportunités pour les PME ?

C.D. : L’histoire nous montre bien que même dans les heures sombres, il y a toujours une lueur d’espoir. Alors oui c’est dur, difficile. Mais l’on voit émerger de nouvelles façons d’entreprendre qui ouvrent un champ d’opportunités. Il y a 5 ans, on parlait très peu des entreprises adaptées. Aujourd’hui, l’inclusion est un sujet majeur. On parle aussi des seniors qui peuvent être sources de solutions. Je constate aussi une quantité innombrable d’entreprises innovantes sur le plan technologique, sur le plan humain, sur le plan sociétal, sur le plan environnemental. Une nouvelle manière de vivre l’entreprise. Cela me conforte dans l’idée que nous sommes à un tournant.

 

EJG : Le gouvernement Barnier vient d’être formé. Quelles mesures attendez-vous de lui ?

C.D. : Les attentes de la CPME sont globalement les mêmes : la réforme de l’assurance chômage, la réforme des retraites à amender, et la réforme fiscale. Dans un contexte économique où les entreprises sont en difficulté, nous attendons que le gouvernement fasse preuve d’adaptabilité et d’innovation dans ses mesures afin de sortir du carcan systématique de la hausse des impôts, etc. Sans les entreprises, il n’y a pas d’économie. Sans économie, il n’y a pas de budget. Alors construisons-le ensemble.

La CPME Gironde en résumé

La CPME 33 représente 99,9 % des chefs d’entreprise de TPE-PME, dans tous les secteurs d’activité. 2e syndicat patronal, il compte un peu plus de 300 adhérents et quelques branches professionnelles qui sont membres associés, comme la FFB, l’UMIH… Le nombre d’adhérents est en progression (environ 80 de plus par an). « Nous avons un certain nombre de jeunes dirigeants qui nous rejoignent et s’impliquent. C’est d’ailleurs une orientation que nous avons souhaitée : aujourd’hui tant au sein du Conseil d’administration qu’au sein du bureau, des dirigeants de moins de 35 ans accompagnent la stratégie de la CPME », précise Cécile Despons. Et d’ajouter : « Notre positionnement par rapport au Medef Gironde est complémentaire. Nous sommes tous des chefs d’entreprise. Seules Nos tailles et nos gouvernances divergent. Nous portons un certain nombre de sujets conjointement. »

Temps forts événementiels

En plus des déjeuners hebdomadaires et des afterworks dans les territoires, la CPME Gironde organise son grand dîner de gala le 13 novembre prochain au Château Grattequina. Une soirée de solidarité, de prévention des difficultés des entreprises pour les adhérents aura lieu en décembre afin qu’ils puissent rencontrer les instances bancaires, fiscales et autres.

Défaillances : SOS d’entreprises en détresse

Depuis le début de l’année 2024, le tribunal de commerce de Bordeaux connaît une forte hausse (près de 40 %) du nombre de procédures collectives. Le BTP, l’agroalimentaire et le commerce sont particulièrement touchés. Au 2e trimestre 2024, la Nouvelle-Aquitaine enregistre globalement une hausse de 30,3 %.

À propos du GPA

Le GPA (Groupement de Prévention Agréé) est une association indépendante composée de chefs d’entreprise ou cadres retraités, experts du tissu économique de leur région et issus de tous secteurs, qui s’engagent à transmettre leurs connaissances et leur expérience à ceux qui en ont besoin de manière bénévole et confidentielle. Gratuitement, les experts du GPA aident les dirigeants à résoudre leurs urgences dans les domaines financiers, juridiques, comptables, etc. Ils sont joignables directement sur leur téléphone mobile et sans intermédiaire. Outre la confidentialité des informations transmises, les experts du GPA adhèrent à une charte exigeant le respect de l’égalité, la neutralité, la bonne foi, la loyauté et l’absence de conflit d’intérêts.

À propos de l’APESA

Initié au Tribunal de commerce, l’APESA est déployé dans l’ensemble des juridictions commerciales françaises. Cette association apporte un soutien psychologique d’urgence, gratuit, confidentiel (consultations avec des psychologues), à proximité du domicile, à l’entrepreneur en souffrance aiguë, hanté par les idées noires provoquées par les difficultés de son entreprise.