Couverture du journal du 17/01/2025 Le nouveau magazine

La CCI Bordeaux-Gironde face à la « morosité ambiante »

Le baromètre trimestriel de la CCI Bordeaux-Gironde montre une dégradation de l’ensemble des indicateurs économiques, perçue par la majorité des chefs d’entreprise du territoire. La CCI et ses équipes occupent le terrain pour y répondre.

© Agence Appa CCIBG

« Morosité ambiante ». C’est avec ces termes que Patrick Seguin, président de la Chambre de commerce et d’industrie Bordeaux-Gironde, a présenté la situation économique sur le territoire en ce début d’année, lors d’un point presse le 21 mai dernier. « La situation est compliquée pour toutes les entreprises au premier trimestre 2024, avec des baisses sur l’ensemble des indicateurs : chiffre d’affaires, trésorerie, marges et carnets de commandes », déplore-t-il.

Selon les chiffres des tribunaux de commerce de Bordeaux et Libourne, le premier trimestre 2024 présente une augmentation de 55 % des dossiers de défaillance d’entreprise déposés (745) par rapport à 2023. « La fin des aides du quoiqu’il en coûte, l’inflation et les durcissements multiples entraînent la mise sous protection des tribunaux de commerce de nombreuses entreprises », constate Patrick Seguin. Avec deux principaux secteurs touchés : le bâtiment, « bloqué par la réduction drastique des décisions, entraînant un marasme inquiétant » ; et les cafés-hôtels-restaurants (CHR), qui ont enregistré une forte baisse de la fréquentation.

Tous secteurs confondus, 78 % des chefs d’entreprise interrogés affirment avoir rencontré des difficultés au premier trimestre, en lien avec la baisse de la demande et l’inflation, selon le baromètre trimestriel de la CCI Bordeaux-Gironde (1).

Mobilisés pour le secteur viti-vinicole

Si presque 70 % des dirigeants gardent malgré tout confiance dans la pérennité de leur entreprise, la CCI a souhaité répondre à cette situation préoccupante. « Nous mettons à leur disposition les plateformes CommentVaMaBoite.fr et QuiPeutAiderMaBoite.fr. Nous mobilisons les partenaires économiques, les maires des communes rurales… Et dans le cadre du CIP (Centre d’information sur la prévention des difficultés des entreprises), que je préside en Gironde, nous avons réactivé les entretiens avec les dirigeants, experts comptables, administrateurs, etc. afin de détecter les difficultés le plus tôt possible », détaille Patrick Seguin. « Nous restons mobilisés », a-t-il assuré.

Pour le secteur de la viti-viniculture, la CCI Bordeaux-Gironde utilise également sa filiale organisatrice de Vinexpo pour inciter les vignerons à mutualiser les moyens et solutions commerciales. L’ouverture de Vinexpo Hong-Kong le 27 mai, où Bordeaux est la 2e force commerciale représentée sur plus de 1 300 producteurs, est à ce titre l’occasion de proposer des stands communs pour les petits viticulteurs. « Il y a cette année plus de 10 000 inscrits à Vinexpo Hong-Kong, événement où se fait beaucoup de business », note-t-il.

Départ de Ryanair

C’est dans ce contexte chahuté que la société aéroportuaire de Bordeaux-Mérignac, dont la CCI Bordeaux-Gironde est le 2e actionnaire derrière l’État, est confrontée à l’annonce du départ de la compagnie Ryanair. « Ce départ n’était pas souhaité par l’aéroport, mais la renégociation des conditions tarifaires n’a pas abouti et c’est un contrat sur lequel nous perdions de l’argent. Une quarantaine de compagnies aériennes sont déjà sur les rangs pour reprendre les créneaux et nous activons les choses pour que cela se fasse rapidement », assure Patrick Seguin.

« Une quarantaine de compagnies aériennes sont déjà sur les rangs pour reprendre les créneaux de Ryanair »

Elles profiteront d’un aéroport repensé, qui doit bénéficier d’un programme d’investissement de 240 millions sur 5 ans, pour lequel le groupement Ingérop vient d’être retenu pour gérer les travaux de transformation durant 6 ans. « Le départ de Ryanair permet également d’accélérer la baisse du low-cost prévue dans la feuille de route aéroportuaire », se rassure Patrick Seguin, rappelant l’objectif de tomber à 50 % de low-cost d’ici 2027, contre 70 % avant le départ de Ryanair.

Mobilisation

La CCI Bordeaux-Gironde est par ailleurs intervenue auprès de la municipalité bordelaise afin de revoir le dossier de modification des sens de circulation à Bordeaux-Caudéran, qui ont entraîné une baisse estimée à 30 % du chiffre d’affaires pour les commerces situés sur les artères concernées. « La consultation publique a été élargie et la Mairie rendra sa nouvelle position sur le sujet d’ici septembre », s’est félicité Patrick Seguin.

La CCI a d’autre part relancé le Club de la logistique urbaine, commun avec Bordeaux Métropole, visant à cartographier les centres logistiques qui pourraient être installés autour la métropole, et à organiser la logistique du dernier kilomètre avec des véhicules propres. Enfin, la chambre consulaire a créé un Club Industrie en Haute-Gironde, « territoire désert en dehors de la centrale de Blaye, qui fédère entreprises et écoles, afin de travailler sur les sujets de transition écologique, recrutement, formation, etc. », explique Patrick Seguin. « Nous restons mobilisés », a-t-il assuré.

 (1) Enquête en solde d’opinion réalisée du 2  au 8 avril 2024 auprès d’un panel de 601 chefs d’entreprise girondins

Les coups de gueule de Patrick Seguin

Les délais de paiement de Bordeaux-Métropole. « La CCI a fait le choix d’être exemplaire en matière de relation fournisseurs, notamment sur nos délais de paiement, qui sont de moins de 30 jours. Contrairement à Bordeaux-Métropole, premier donneur d’ordre sur le territoire, qui paye à 140 jours au lieu des 30 autorisés par la loi. Je retape du poing sur la table, car de nombreuses entreprises sous procédure en ont été victimes. Pour que ça bouge, il faut facturer des intérêts moratoires pour chaque jour de retard ! »

Un métro bordelais. « Je ne suis pas favorable, à titre personnel, à ce projet, dont le coût pourrait être pharamineux et nous endetter sur des décennies. Le sous-sol de Bordeaux, un ancien marais traversé par 14 jalles, et dont le fleuve est sensible aux marées, est équipé de collecteurs pour éviter les inondations. Le métro devrait passer sous l’ensemble de ces ouvrages. Nous avons les compétences pour le faire. Mais Bordeaux est un grand village, quel en serait le bénéfice ? »