Couverture du journal du 02/10/2024 Le nouveau magazine

Médoc : reprise sereine pour l’entreprise Souslikoff

Depuis octobre 2022, Dominique Souslikoff a confié les clés de l’entreprise familiale à Fabrice Martinez. Le nouveau président de l’entreprise, spécialisée dans la conception, la construction et la distribution de matériel agricole, déploie son plan stratégique pour stimuler sa croissance. 

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Fabrice Martinez, président de Souslikoff © Louis Piquemil - Echos Judiciaires Girondins

À le voir cheminer, méthodique et déterminé, entre les différents postes de travail de son usine d’Arcins, pour nous expliquer la chaîne de production de ses machines viticoles, cela apparaît comme une évidence : Fabrice Martinez est un homme d’industrie. Et à l’écouter détailler les atouts de ses tarières et autre bineuses interceps, difficile d’imaginer qu’il a effectué la majeure partie de sa carrière dans l’industrie de la lingerie féminine et des collants. « J’ai travaillé chez Dim, chez Chantelle, chez Petit Bateau, toujours à la direction commerciale, au business développement, jusqu’à la direction générale », retrace ce Parisien de naissance.

Une histoire de confiance

Depuis le 10 octobre 2022, Fabrice Martinez détient les clés de la PME médocaine Souslikoff après l’avoir rachetée à son dirigeant Dominique Souslikoff, fils du fondateur de l’entreprise.  « Alexandre Souslikoff a créé la société en 1969, mon année de naissance », glisse le nouveau président dans un sourire.

Une reprise rondement menée. « J’ai rencontré Dominique Souslikoff pour la première fois ici (au siège de l’entreprise à Arcins, ndlr) le 11 février 2022. On a passé quatre heures ensemble. Lorsque je suis rentré chez moi le soir, j’ai dit à mon épouse que j’avais trouvé la boîte que je voulais racheter », se remémore Fabrice Martinez. Huit mois plus tard, l’affaire était bouclée.

Être capitaine à bord

Son envie de se lancer dans la reprise d’une entreprise avait éclos après sa dernière expérience professionnelle. « L’évolution vers la reprise, c’est une histoire de frustration. Quand vous êtes directeur général d’une entreprise et que vous êtes salarié, on vous dit que vous avez les clés mais vous ne les avez pas vraiment. Les clés de l’entreprise, elles appartiennent à l’actionnaire, au financier ou au président », souligne Fabrice Martinez.

 L’évolution vers la reprise, c’est une histoire de frustration

Après 30 années de salariat, il est désormais seul capitaine à bord d’un navire qui embarque 20 autres passagers répartis équitablement entre deux sites : Arcins, sur la rive gauche de l’estuaire de la Gironde, et le site historique de Saint-Yzans-de-Médoc.

Trois activités

Et le vaisseau Souslikoff est propulsé par trois moteurs. « J’ai réorganisé l’entreprise en trois entités : la partie que j’appelle Souslikoff Concept, à Arcins.  On conçoit et on fabrique toute sorte de matériel pour les viticulteurs. La deuxième entité que j’ai appelée Souslikoff Équipement, pour la vente de matériel agri-viticole. C’est notre concession de Saint-Yzans. Et Souslikoff Service, c’est la partie entretien et réparation », expose le dirigeant.

Avec un chiffre d’affaires de 3,5 millions d’euros, Souslikoff ronronne mais ne rugit pas. « La société est réputée pour son matériel de qualité et ses innovations, mais c’est une belle endormie », confesse-t-il volontiers.

Plan « Cinq sur cinq »

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©Louis Piquemil – Echos Judiciaires Girondins

Lorsqu’il prend les rênes de l’entreprise, Fabrice Martinez dresse donc, avec ses salariés et les managers clés de Souslikoff, un plan d’attaque baptisé « Cinq sur cinq » pour atteindre les 5 millions d’euros de chiffre d’affaires dans cinq ans. Des ambitions raisonnables compte tenu du potentiel de développement de la PME. Au cœur de sa stratégie, le développement de la business unit Souslikoff Concept, qui conçoit et produit des machines sous la marque Souslikoff. « C’est celle qui offre le plus de potentiel pour nous développer », souligne le PDG. Pour ses division Équipement, qui revend du matériel agricole de différentes marques, et Services, pour la réparation, le marché est captif et les revenus sont récurrents.

Mailler la France

« Mais nous sommes prisonniers du nord Médoc. Personne ne viendra de Libourne pour acheter ou faire réparer un tracteur sur notre site de Saint-Yzans ». Alors qu’avec son activité de constructeur de machines agricoles, Souslikoff pourrait viser le monde entier. « On pourrait étendre notre terrain de jeu. Actuellement, nous sommes pas mal en Bourgogne, mais je n’ai pas de revendeur en Champagne, ni en Alsace, ni dans le Sud-Est. On pourrait mailler beaucoup mieux le territoire français ».

L’idée est de regarder où en Europe nous pourrions proposer notre gamme de produits

Et ses ambitions ne se limitent pas à l’Hexagone. Fabrice Martinez pense déjà à l’export : « j’ai commandé une étude à la CCI Bordeaux-Gironde pour déterminer quel pays je pourrais aborder facilement. Sans aller tout de suite au Chili ou en Afrique du Sud, l’idée est de regarder où en Europe nous pourrions proposer notre gamme de produits ».

Diversifier ses marchés

Le dirigeant voudrait également sécuriser et diversifier ses sources de revenus. « Nos produits ne sont destinés qu’aux viticulteurs. Si une crise mondiale frappait le secteur du vin, la situation se compliquerait pour nous ». Des solutions se profilent, Souslikoff pense déjà maraîchage, arboriculture… Aucune piste ne sera écartée pour ce spécialiste du travail mécanique de la terre.  Avec ces nouvelles flèches à son arc, Fabrice Martinez espère doubler l’activité de sa division Concept qui réalise aujourd’hui un chiffre d’affaires d’un million d’euros.

Ce qui a fonctionné jusqu’à maintenant ne fonctionnera pas forcément demain. Il faut se remettre en question tous les jours

« Ce qui a fonctionné jusqu’à maintenant ne fonctionnera pas forcément demain. Il faut se remettre en question tous les jours ». Un mantra que le dirigeant transmet à ses équipes depuis son arrivée. Délicatement, veillant à ne pas faire d’accroc sur l’histoire de cet emblème du Médoc, Fabrice Martinez tisse la stratégie de Souslikoff qui fêtera, en même temps que son nouveau président, ses 55 ans en 2024. Comme quoi, l’industrie de la machine agricole n’est pas si éloignée de celle du collant.

 

La genèse de Souslikoff

En 1969, Alexandre Souslikoff, maréchal-ferrant d’origine russe et polonaise, commence à réparer des tracteurs dans le garage de sa maison à Saint-Yzans-de-Médoc. En observant ses clients viticulteurs, il invente des outils et des machines pour leur rendre le travail de la vigne moins pénible. « Tout ce qu’il faisait était frappé du bon sens, raconte Fabrice Martinez. Il cherchait à fabriquer des outils simples, faciles à entretenir, pas chers et increvables ». Dans les années 80, l’entreprise se développe et se dote d’une concession afin de distribuer dans le Médoc d’autres marques de matériel agri-viticole. Dans les années 90, son fils Dominique arrive à la tête de l’entreprise qu’il développe en mettant en place en réseau de distributeurs dans toute la France pour les produits de la marque Souslikoff. En 2019, la PME inaugure un site de production dédié à sa gamme Concept, à Arcins. Trois ans plus tard, la société est reprise par Fabrice Martinez.