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Municipales : les maires pro-vélo récompensés

Dévoilé opportunément à quelques semaines des élections, le palmarès des « villes cyclables » incite les élus qui se représentent, et leurs opposants, à imaginer une voirie mieux adaptée au vélo, un mode de transport peu coûteux, peu encombrant et non polluant.

vélo bordeaux

Palmarès, trophée, podium, remerciements. Tout le vocabulaire des cérémonies de remise de prix est convoqué, ce jeudi 6 février, à la Chambre de commerce et d’industrie de Bordeaux, pour la présentation du « Baromètre des villes cyclables ». La Fédération des usagers de la bicyclette (FUB), qui rassemble 300 associations locales, célèbre les « capitales du vélo », ces villes où la pratique de la bicyclette est la plus aisée. La fédération, et ses partenaires, La Poste ou le transporteur Keolis, tentent de faire passer à cette occasion un message simple : le vélo constitue un moyen de transport légitime et à encourager, car peu encombrant, pratique, peu coûteux et non polluant.

Le classement des villes lauréates ne résulte pas des calculs plus ou moins opaques d’un consultant, mais d’un questionnaire mis en ligne à l’automne 2019. Les usagers du vélo, ou ceux qui ne le sont pas, étaient invités à répondre à une trentaine de questions, précisant par exemple si les itinéraires cyclables sont continus, si le service de location fonctionne bien, ou si la municipalité communique sur le sujet. Le baromètre de la FUB apparaît ainsi comme un sondage géant, une sorte de « grand prix du public ».

185 000 contributions ont été enregistrées, dont 5 500 à Lyon, 4 500 à Toulouse, 2 500 à Lille… Au total, 768 villes, grandes, moyennes, petites, villes-centre, banlieues ou périphéries, ont été gratifiées de plus de 50 réponses, le seuil fixé par la FUB pour participer au classement. Opportunément, la fédération a dévoilé les résultats quelques semaines avant le premier tour des élections municipales. Les élus ne s’y sont d’ailleurs pas trompés. Des adjoints aux maires, respectivement élus à Strasbourg, Rennes, Paris, Nantes ou Caen, ainsi que le maire d’Angers, ont fait le déplacement, attendant au premier rang de savoir s’ils allaient ou non monter sur le podium.

Strasbourg, Grenoble, La Rochelle

Comme souvent lors des remises des prix, il y a plusieurs gagnants. Strasbourg, Grenoble et La Rochelle sont classées « capitales du vélo » dans leur catégorie respective, définie en fonction de leur taille. Mais des victoires peuvent cacher des déceptions. Strasbourg obtient cette année une note inférieure à celles de La Rochelle et Grenoble, érigée ville la plus « cyclable » de France. Dans la catégorie des métropoles, Paris fait un remarquable bond en avant, devançant Lyon ou Lille. Les villes du sud de la France, en revanche, occupent, comme en 2018, le bas du classement. Derrière Toulouse ou Montpellier, Marseille est même désignée lanterne rouge.

Ces résultats ne surprennent pas les observateurs. À Paris comme à Grenoble, les municipalités s’étaient prononcées, au début du mandat, pour la réalisation d’axes sécurisés traversant la ville. Ces projets avaient été décriés par l’opposition, par une partie des commerçants, voire par les médias. Mais alors que le mandat s’achève, les pistes sont très utilisées et servent de référence aux élus d’autres villes qui veulent développer une politique cyclable.

À Strasbourg, où la municipalité s’engageait, dès les années 1970, à développer l’usage du vélo, une politique qui n’a pas été démentie ensuite malgré les changements de majorité, la relative contre-performance s’explique également. Un réseau d’itinéraires permettant aux cyclistes d’éviter l’hyper centre-ville, prévu pour 2020, a été reporté à 2030. « J’ai perdu mes arbitrages contre Robert Herrmann », le président (PS) de la métropole strasbourgeoise, admet Jean-Baptiste Gernet, adjoint (DVG) en charge des « nouvelles
mobilités ». 

Enjeu pour les municipales 

Le palmarès de la FUB, très médiatisé par les élus lorsqu’ils apparaissent comme gagnants, ou par les associations locales lorsque les villes sont mal classées, sera exploité comme il se doit lors de la campagne pour les municipales. En 2014, les programmes électoraux se contentaient, au mieux, de mentionner le vélo à la fin d’un paragraphe. Cette année, aucun candidat au poste de maire d’une grande ville ne peut ignorer cet enjeu.

Au-delà du classement et des podiums, la trentaine de questions auxquelles ont répondu les participants fournissent de précieuses informations. Comment améliorer la sécurité aux ronds-points, lutter contre le vol de vélos ? Faut-il détourner les flux cyclistes afin d’éviter les conflits avec les piétons, verbaliser les véhicules stationnés sur les pistes cyclables ? Les répondants pouvaient pointer, sur une carte, les carrefours les plus anxiogènes et les axes à aménager en priorité. Ces contributions sont essentielles. En effet, les ingénieurs et techniciens municipaux, formés à améliorer la fluidité et la vitesse de la circulation motorisée, demeurent encore démunis face à la montée de la demande des usagers.

Les cyclistes du quotidien ne sont pas les seuls à tenter de peser sur les élections. Les associations représentant les handicapés, les professionnels du tourisme, les groupements défendant la végétalisation ou la qualité de l’air décernent aussi des trophées. Les représentants des usagers des transports publics, en revanche, ne se prêtent pas à ce jeu. « C’est aux associations locales de faire savoir aux candidats ce qu’ils attendent d’eux », estime Bruno Gazeau, président de la Fédération nationale des usagers des transports (Fnaut). Un palmarès des villes les mieux dotées en transports publics inciterait pourtant peut-être les élus à soigner ce secteur, à la fois essentiel pour l’attractivité et très coûteux en termes budgétaires.

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