Echos Judiciaires Girondins : Vous êtes le président de l’UIMM Gironde-Landes et depuis novembre 2023, président de l’UIMM Nouvelle-Aquitaine pour deux ans. Quel rôle joue l’organisation professionnelle auprès des entreprises que vous représentez et combien sont-elles ?
Lionel Matias : En Gironde-Landes, les industries de la métallurgie représentent 1 420 entreprises et près de 35 700 salariés. En Nouvelle-Aquitaine, sur 200 000 emplois industriels, 110 000 concernent la métallurgie pour 4 390 entreprises. La filière aéronautique-spatial-défense est particulièrement représentée mais nous avons également des entreprises dans les domaines du travail des métaux, l’usinage, la maintenance, l’électronique, l’électrotechnique.
Sur Gironde-Landes, nous avons 350 adhérents dont une cinquantaine de grands groupes, mais majoritairement des PME, très peu d’ETI. Notre première mission est d’être au service des chefs d’entreprise de la métallurgie. Historiquement, nous les accompagnons sur les volets juridique et social et nous assurons de la formation pour les apprentis et les salariés.
Nous avons également pour mission de rendre notre filière attractive vis-à-vis de tout le système scolaire. Mais l’enjeu aujourd’hui est aussi d’apporter des solutions innovantes pour améliorer la compétitivité de nos entreprises.
EJG : De nouveaux locaux sont justement en construction à Bruges avec la volonté d’en faire une vitrine symbole de l’industrie 4.0. Quelle est l’ambition ?
L. M. : Le projet a pour objectif principal de montrer ce qu’est l’usine 4.0. Cela fait 25 ans que je suis dans le métier et j’ai toujours connu les usines le long des routes avec du bardage plein, sans fenêtre. Nous prendrons le contrepied avec une partie vitrée prévue sur tout le rez-de-chaussée pour en faire une vitrine des nouveaux outils de production de la filière. Il faut rendre nos métiers attractifs et parler des métiers de demain.
Cet espace disposera donc d’un plateau technique pour la formation mais aussi d’un tiers-lieu à destination des start-up à vocation industrielle incubées à Bordeaux et qui auraient un projet ou un besoin de prototypage. Ce lieu, qui sera livré à l’automne 2025 et dans lequel nous emménagerons en janvier 2026, leur sera également dédié.
Nos nouveaux locaux disposeront d’un plateau technique pour la formation mais aussi d’un tiers-lieu à destination des start-up
EJG : Quel est l’enjeu derrière l’accompagnement de ces start-up ?
L. M. : Nous sommes persuadés que la réindustrialisation ne se fera pas en déménageant les usines actuellement en Chine mais passera par de nouveaux usages, des améliorations de la compétitivité. Or les start-up vont nous « disrupter » et apporter des solutions. Il faut donc veiller à ce qu’elles restent sur le territoire, qu’elles participent à l’amélioration des industries déjà implantées, et qu’elles-mêmes deviennent des PME, des ETI, l’objectif étant d’avoir plus d’industries sur le territoire. À l’UIMM Gironde Landes, nous avons déjà créé le cercle de l’innovation qui met en relation des start-up et des industriels.
EJG : Quelles sont les attentes côté industriels ?
L. M. : Nous avons besoin de décarboner nos industries, d’améliorer nos process industriels et surtout de rendre nos métiers attractifs. Aujourd’hui, dans une usine 4.0, il n’y a plus de machines à l’ancienne. Pour autant, nous avons du mal à recruter. Mais en pleine réindustrialisation, si nous ne trouvons pas de main-d’œuvre, nous n’y arriverons pas ! Il faut continuer à amener de nouveaux outils numériques, à numériser nos chaînes de production et rendre nos postes plus ergonomiques.
Nous avons besoin de décarboner nos industries, d’améliorer nos process industriels et surtout de rendre nos métiers attractifs
EJG : Parmi les leviers également actionnés par l’UIMM figure la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Dans quelle perspective ?
L. M. : La RSE va nous permettre d’améliorer notre attractivité et notre visibilité. Aujourd’hui, les jeunes sont plus attentifs à ce que fait l’entreprise en termes de marque employeur, qualité de vie au travail, d’engagement sociétal et environnemental. La RSE est un levier pour améliorer notre impact et la compétitivité. À date, une quarantaine d’entreprises en Gironde-Landes ont franchi la première étape de l’accompagnement proposé par l’UIMM. Désormais, nous nous engageons dans une phase 2 au sein de l’UIMM avec la volonté d’aller vers une labellisation RSE spécifique aux industriels.
EJG : La réindustrialisation marquerait le pas en France. Comment se positionne la Nouvelle-Aquitaine ?
L. M. : Selon les chiffres de la Région, il y aurait plus d’ouvertures sur notre territoire où l’écosystème est très favorable. En revanche, notre principale difficulté est liée à l’instabilité politique et financière alors même que nous sommes sur du temps long, dans l’industrie, du point de vue des recrutements comme des investissements. Aujourd’hui le temps politique est trop court. N’oublions pas que nos concurrents sont mondiaux !