Parce que la musique n’est plus son seul mode d’expression, Pascal Obispo se lance dans la peinture. Mais son propos reste mesuré : « Ce n’est pas de la peinture, minore-t-il, c’est de la thérapie ». « Art Therapy », c’est justement le titre de cette exposition, sise au Musée Mer Marine, qui rassemble 68 toiles de l’artiste, essentiellement peintes ces 3 dernières années.
Des collages à la couleur
Tout a commencé il y a une quinzaine d’années par des collages de photos. Pascal Obispo s’inspire de ses voyages, ses rencontres, ses séjours sur le bassin d’Arcachon. Une rencontre fortuite avec l’artiste chinois Danhôo va précipiter les choses. Ce dernier lui conseille de se mettre à la peinture, le presse même en lui faisant livrer quelques jours plus tard peintures et pinceaux. Il commence sur des petites toiles qui prennent peu à peu de l’ampleur, réinvestissant les codes du graffiti, de la bande-dessinée ou du manga. Ses toiles, remplies de personnages et de couleurs, s’inspirent du street art. Parmi eux, La Cène (2019) révèle des apôtres aux yeux écarquillés entourés d’une mosaïque qui n’est pas sans rappeler celle de l’église du Cap-Ferret (où réside l’artiste, ndlr.) Quant à Philippe (2019), la toile revient sur le suicide de Philippe Pascal, l’ex-chanteur du groupe post-punk Marquis de Sade, représenté comme la mort de Marat, dans un bain de sang. « Un père spirituel que j’idolâtrais », commente Pascal Obispo à propos de Philippe Pascal.
Apaiser ses souffrances
C’est lors d’une visite à la clinique Saint-Paul, à Saint-Rémy-de-Provence que le travail de Pascal Obispo va trouver ses propres enjeux. Venu visiter ce service où Van Gogh a séjourné, l’artiste fait la connaissance du psychiatre Jean-Marc Boulon qui propose à ses patients des ateliers d’art-thérapie. Pascal Obispo réalise alors le sens de ses différentes démarches artistiques : « j’ai compris le sens de tout ce que j’ai fait pendant 40 ans, soutient-il, la peinture et la musique m’ont aidé à combattre la souffrance, les dépressions, à traverser la vie. » Touché par les travaux des patients, Pascal Obispo en emporte quelques-uns avec lui pour les reprendre dans son atelier dans une démarche collaborative, qui le mène plus loin dans son travail thérapeutique.
Cette œuvre n’est pas à vendre
Comment la production de Pascal Obispo se retrouve au Musée Mer Marine ? « La rencontre avec Norbert Fradin (propriétaire du musée, ndlr) a eu lieu dans une loge assez moche, lors d’un concert privé », s’amuse l’artiste, « Je lui ai montré des photos de mes peintures, et il a annoncé en direct qu’il allait m’exposer. » « J’ai été séduit par la qualité de son travail, renchérit Norbert Fradin, ça vient du plus profond de l’être. » Mis devant le fait accompli, l’artiste se satisfait finalement de ce choix d’un musée : « solliciter des marchands d’art, monétiser les choses ce n’est pas le sens de mon travail. Mes toiles sont exposées mais ne sont pas à vendre, c’est important. »
Artiste prolifique
Pascal Obispo, qui avait commencé à créer chez lui à Paris, a finalement posé pots et pinceaux au Cap-Ferret en 2020. Là, il a pu laisser libre cours à sa création, y compris sur des très grands formats jusqu’à plus de 3 mètres de haut et plus de 6 mètres de large. Recherche de l’enfance, solitude et surexposition sont des thèmes récurrents de ses nombreuses œuvres achevées depuis le confinement. « La fin de la visite s’achève par un œil qui est l’expression de la solitude et la souffrance » remarque-t-il. Ces toiles monumentales ne sont pas les seuls réceptacles de sa création car le chanteur continue de composer. Le titre de son dernier single, « J’étais pas fait pour le bonheur », comme un signe, une invitation à l’art-thérapie.
« Art Therapy », exposition de Pascal Obispo au Musée Mer Marine, jusqu’au 7 janvier 2024